La France, les Européens et le Canada annoncent le retrait de leurs forces militaires au Mali

Poussés dehors par les “obstructions” de la junte au pouvoir à Bamako, la France et ses partenaires européens ont officialisé ce 17 février leur retrait militaire du Mali au terme de neuf ans de lutte antijihadiste menée par Paris.

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Soldats français au Mali. Crédit: AFP

En raison des multiples obstructions des autorités de transition maliennes, le Canada et les Etats européens opérant aux côtés de l’opération (française) Barkhane et au sein de la Task Force Takuba estiment que les conditions ne sont plus réunies pour poursuivre efficacement leur engagement militaire actuel dans la lutte contre le terrorisme au Mali et ont donc décidé d’entamer le retrait coordonné du territoire malien de leurs moyens militaires”, soulignent-ils dans une déclaration conjointe.

Paris et ses partenaires souhaitent toutefois “rester engagés dans la région” sahélienne et “étendre leur soutien aux pays voisins du Golfe de Guinée et d’Afrique de l’Ouest” pour contenir la menace jihadiste. Les “paramètres” de cette réorganisation seront arrêtés “d’ici juin 2022”.

Emmanuel Macron a tenu à l’Élysée une conférence de presse à 8 h GMT, notamment aux côtés du président du conseil européen Charles Michel, pour annoncer les décisions actées mercredi soir lors d’un sommet réunissant plusieurs dirigeants européens et africains.

Obstructions

La France est militairement présente depuis 2013 au Mali et a mis sur pied une vaste opération régionale, Barkhane, déployant des milliers de soldats pour lutter contre les franchises locales d’Al-Qaïda et du groupe État islamique. Malgré des victoires tactiques, le terrain n’a jamais été véritablement repris par l’État malien et ses forces armées.

Facteur aggravant, le gouvernement malien a été renversé lors d’un double coup d’État en 2020 et en 2021, aboutissant à l’arrivée au pouvoir d’une junte qui refuse d’organiser des élections avant plusieurs années et qui surfe sur un sentiment antifrançais croissant dans la région.

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Mises au ban par les États ouest-africains, les autorités de transition maliennes fustigent la présence militaire occidentale sur leur sol et font désormais appel, selon les Européens, aux mercenaires russes de la société Wagner.

Déplacement de la lutte anti-terrorisme

Quelque 25.000 hommes sont actuellement déployés au Sahel, dont environ 4300 Français (2400 au Mali dans le cadre de Barkhane), selon l’Élysée. Le pays accueille aussi 15.000 soldats de l’ONU au sein de la Minusma, dont l’avenir est désormais en suspens puisqu’elle comptait sur un large soutien de Barkhane.

Le Mali était au cœur du dispositif antiterroriste français et européen au Sahel. Emmanuel Macron avait déjà décidé d’amorcer à l’été 2021 une réduction des effectifs français au profit d’un dispositif régional moins visible, mais ce départ contraint du pays va forcer Paris à accélérer cette réorganisation dans d’autres pays de la région menacés par la contagion jihadiste, notamment dans le golfe de Guinée.

Nous considérons que la lutte contre le terrorisme est quelque chose d’essentiel pour le Mali, pour le Burkina, pour le Niger et pour les pays côtiers”, a assuré le président ivoirien Alassane Ouattara mercredi sur RFI et France 24.

“Nous avons besoin de réinventer notre partenariat militaire avec ces pays”

Emmanuel Macron

Le départ de Barkhane et de Takuba (groupement de forces spéciales européennes, ndlr) crée un vide. Nous serons obligés d’acheter des armes, d’avoir une plus grande professionnalisation, mais c’est notre devoir aussi. Les armées nationales doivent régler les problèmes sur nos territoires nationaux et c’est cela notre philosophie”, a-t-il estimé.

Nous avons besoin de réinventer notre partenariat militaire avec ces pays”, a souligné mardi la présidence française. “Il ne s’agit pas de déplacer ce qui se fait au Mali ailleurs, mais de renforcer ce qu’on fait au Niger et de soutenir davantage le flanc sud”, a-t-elle ajouté.

Selon une source proche de l’Élysée, la France a promis de coordonner son retrait avec la mission de l’ONU au Mali et la Mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM), qui continueront de bénéficier d’un soutien aérien et médical français sur place, avant le transfert ultérieur de ces moyens.

Hors du Mali, Paris compte poursuivre la lutte antijihadiste dans la région, où les mouvements affiliés à Al-Qaïda ou au groupe État islamique ont conservé un fort pouvoir de nuisance malgré l’élimination de nombreux chefs.

Outre un possible renforcement de sa présence au Niger voisin, qui héberge déjà une base aérienne française et 800 militaires, Paris ambitionne de proposer ses services à d’autres pays d’Afrique de l’Ouest (Côte d’Ivoire, Sénégal, Bénin…) pour les aider à contrer la propagation du jihadisme vers le golfe de Guinée.

(avec AFP)