Le verdict est tombé tard hier soir. Mercredi 8 décembre, 10 mois après le drame, le tribunal de première instance de Tanger a condamné le propriétaire de l’usine AM Fashion, qualifiée de “clandestine” par la wilaya, où 29 ouvriers et ouvrières ont trouvé la mort noyés en février dernier, à un an et demi de prison ferme et à une amende de 1 000 dirhams.
La société Amendis, filiale du géant Veolia, a été de son côté condamnée à une amende de 200.000 dirhams de dédommagement aux ayant-droits de 28 des 29 victimes.
Il a été poursuivi pour “avoir causé la mort sans intention de la donner et des blessures involontaires, à cause du non-respect des lois en vigueur et la violation de l’état d’urgence sanitaire, l’ouverture d’une entreprise sans permis, l’exploitation de mineurs sans autorisation et le non-respect des conditions d’hygiène et de sécurité au sein de l’entreprise”.
Le 8 février dernier, le sous-sol de l’usine s’était transformé en fosse commune pour les ouvriers qui y travaillaient. L’hécatombe s’était produite vers 9 heures du matin, lorsque des pluies torrentielles avaient balayé les quartiers de Bendibane et d’El Mers dans la ville du détroit. En l’espace de quelques secondes, les crues avaient complètement inondé le sous-sol et piégé les travailleurs.
Dans les mois qui ont suivi le drame, les familles des victimes ont interpellé à plusieurs reprises l’ancien chef du gouvernement Saâd-Eddine El Othmani, réclamant “un intérêt particulier” de sa part afin qu’il réponde “dans les plus brefs délais” à leurs demandes.
Elles l’exhortaient à intervenir “pour soutenir financièrement et moralement les familles qui vivent dans des conditions tragiques” et exigeaient “la création d’une commission d’enquête indépendante sur l’incident, afin d’arrêter les vrais responsables”.
Elles assuraient ainsi détenir “des preuves impliquant la responsabilité des institutions de l’État dans l’accident mortel”, notamment des documents et des études attestant que l’usine AM Fashion opérait depuis plus de 15 ans “sans respecter le Code du travail”, et pointaient du doigt “l’absence de contrôle par l’inspection du travail et les inspecteurs de la sécurité sociale, alors même que l’usine est domiciliée dans une villa située dans un quartier de récente construction, où 150 ouvriers et ouvrières viennent quotidiennement, jour et nuit, et à la vue des autorités”.