Dans une précédente interview accordée à TelQuel, vous disiez être vegan, ne pas boire ni fumer. Ramadan, pour vous, c’est facile ?
Oui (rires). En plus, je pratique le jeûne intermittent toute l’année. Plus sérieusement, j’ai toujours aimé les vibes du ramadan. Surtout si on se coupe un peu des gens, on évite de voir ceux qui se battent. Par contre, j’ai souvent mal à la tête à cause du manque de café. J’en bois beaucoup en temps normal.
Avant le ftour, vous êtes plutôt sport ou canapé ?
Sport, mais à partir du troisième jour du ramadan. J’ai appris à courir beaucoup cette année parce que les salles de sport étaient fermées. Je vais courir quand le soleil se couche, en plus j’habite à côté de la plage…
Et lorsque le ftour approche, vous êtes derrière les fourneaux ou déjà à table ?
Ni l’un ni l’autre. J’habite seul. Mon rituel de ftour, c’est deux ou trois dattes, un café et de l’eau. Pas besoin de plus que ça. Je préfère faire un dîner plus copieux plus tard, quand j’ai vraiment faim. Je n’aime pas me bâfrer dès la rupture du jeûne !
Et vous vous réveillez pour le shour ?
Jamais de la vie. Je ne comprends pas comment on peut se réveiller pour manger puis se rendormir.
Pour l’animation, vous êtes plutôt télévision ou radio sur fond de tarrab al andaloussi ?
J’écoute de la musique. Je n’ai pas la télé, même quand j’étais marié, c’était interdit à la maison. La télé, c’est beaucoup de choses en pilotage automatique, et je me méfie de ça.
Donc pas de sitcoms de ramadan ?
Non, même quand j’en réalisais. Je ne suis pas un bon public pour les sitcoms et sur ce qu’il se passe à la télé de manière générale. Je suis plutôt un grand lecteur.
Ce ramadan, vos dattes viennent d’où ? Vous aussi vous boycottez l’Algérie ?
Absolument pas ! Je n’ai aucune raison de boycotter quoi que ce soit, à part ce qui entrave les libertés individuelles.
Lecture spirituelle ou littéraire pour le ramadan ?
Lire le Coran ? Non. Je continue à lire ce que je lis le reste de l’année.
Est-ce que ramadan change vos habitudes, d’une manière générale ?
Si on tourne un film, c’est un peu plus “mou du genou”, les gens sont légèrement plus à cran. Sinon, je continue mon programme comme le reste de l’année, à part le fait que je ne peux plus m’asseoir à la terrasse d’un café et regarder passer les gens.
Vous auriez préféré que les cafés restent ouverts après le ftour ?
Je pense que ça aurait pu donner quelque chose d’intéressant de ne pas enfermer les gens chez eux au moment de la rupture du jeûne. Ce n’est pas un bon geste. Les gens peuvent sortir la journée, mais ne peuvent pas se soulager le soir. Il y a des gens qui fument, qui ont besoin de sortir de chez eux pour respirer un peu, d’autres qui n’ont pas beaucoup d’espace là où ils habitent. Une autorisation d’une heure ou deux n’aurait pas changé grand-chose à la pandémie. Les dégâts psychologiques du couvre-feu seront beaucoup plus importants.
Les mosquées auraient donc dû rester ouvertes pour les Tarawih ?
Mosquées ou bars, ce sont des lieux qui appartiennent aux gens qui ont besoin d’y passer des moments, il faut respecter l’un et l’autre. Après, j’aurais aimé que cette pandémie, à travers ce qu’elle a imposé, nous fasse basculer vers un système un peu plus laïc et qu’on sorte la tête du pilotage automatique religieux. Au Maroc, les gens sont religieux seulement quand ça les arrange, par mimétisme. Certains dégainent leur Coran uniquement pendant ramadan pour avoir l’air pieux. J’ai toujours trouvé ça étrange, sans être forcément dans le jugement. Pourquoi sommes-nous à ce point drivés par une énergie de groupe qui, finalement, ne fait que nous tirer vers un dénominateur commun, à savoir une sorte de latence, de mollesse sociale ?
Qu’est-ce qui vous manque du monde d’avant ?
J’attends juste qu’on ouvre les lieux pour aller danser !