J’ai toujours eu plus de facilité à aller vers les personnes qui elles aussi ont plusieurs nationalités et plusieurs cultures, parce que j’ai l’impression que je ne me suis jamais sentie à l’aise avec les gens qui étaient complètement marocains ou français. J’ai toujours eu besoin d’avoir ce juste milieu entre les deux. […] J’ai l’impression que ça t’apporte une expérience différente et ça te fait voir les choses avec une perspective que ceux qui ont vécu dans un seul endroit ou connaisse une seule culture ne peuvent avoir.”
Le ton est donné par ce premier ressenti, celui de Lina, Franco-Marocaine vivant à Paris. Il constitue un terreau fertile sur lequel nos deux intervenants, la journaliste Hanane Harrath – qui a fait carrière en France et au Maroc – et l’étudiant à Sciences Po Reims Chams Fares, peuvent faire éclore leurs arguments et partager leur vécu. Pour eux, l’identité est avant tout individuelle et la somme de multiples influences, qu’il n’a aucun sens de vouloir diviser en demandant de choisir l’une plutôt que l’autre, à l’occasion par exemple de rencontres sportives ou d’épisodes de tensions politiques.
Pistes pour assumer ses différences
Entrecoupée de déclarations iconoclastes du footballeur Karim Benzema et de l’humoriste Gad Elmaleh, la suite des échanges porte sur certaines injonctions contradictoires et sur le sentiment d’être toujours considéré comme étranger de part et d’autre de la Méditerranée. Une impression également éprouvée parfois par les jeunes pensionnaires des établissements français du royaume… et par nos interlocuteurs, qui racontent comment ils ont réussi à surmonter les malaises pour assumer leurs différences et faire de la singularité de leur parcours une force.
“C’est comme si c’était marqué gaouri sur ma tête ! Même au souk, j’ai toujours eu droit au prix des touristes, et ce malgré mon accent chleuh impeccable”
“Ma binationalité, ça a toujours été une source de fierté quand j’étais en France, et une énorme source de frustration quand j’étais au Maroc. Je m’explique : j’ai passé presque tous mes étés dans les rues d’une petite ville au sud d’Agadir qui s’appelle Tiznit, et j’ai systématiquement été l’attraction du quartier. C’est comme si c’était marqué gaouri sur ma tête ! Même au souk, j’ai toujours eu droit au prix des touristes, et ce malgré mon accent chleuh impeccable”, développe Max, un autre contributeur.
Des anecdotes comme celles-là et d’autres réflexions plus abstraites alimentent notre intense discussion, qui s’achève par quelques références et conseils de lecture afin de (re)découvrir les grands penseurs de l’altérité, des identités plurielles ou encore du féminisme arabe.
Bonne écoute !