La croissance sera en dessous de 1% “dans les meilleurs scénarios”, selon CDG Capital

Croissance en dessous de 1 %, inflation en hausse, dégradation des réserves de change... CDG Capital s’attend à une année 2020 difficile pour le Maroc.

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Sidi Boulaalam, Essaouira, en 2017. Crédit: Yassine Toumi/TelQuel

La banque d’investissement CDG Capital, filiale de la Caisse de Dépôt et de Gestion, a publié dimanche 12 avril une étude sur l’impact de la crise sanitaire couplée à la sécheresse traversée par le royaume en ce début d’année 2020.

Dès les premières lignes du document long de 25 pages, le ton est pessimiste. Le Maroc souffrira cette année. “En plus de cette crise sanitaire drastique et ses répercussions néfastes sur les équilibres macro-économiques nationaux, la confirmation d’une deuxième année de sécheresse devrait accentuer l’impact négatif, recensé en 2019, sur le pouvoir d’achat des ménages, particulièrement ceux du monde rural (le secteur agricole concentre environ 40 % de la population active nationale, ndlr)”, peut-on lire au préambule de l’étude.

CDG Capital s’attend ainsi à une croissance en dessous de 1 % “dans les meilleurs des scénarios” alors que l’inflation, mesurée par l’Indice des prix à la consommation (IPC), “devrait subir l’impact du renchérissement des prix des produits alimentaires frais”.

Une production agricole dans le rouge

Concernant la production céréalière, la moyenne (calculée sur la décennie écoulée) de 80 millions de quintaux “semble difficile à atteindre” pour les auteurs de l’étude qui tablent “sur une saison quasi similaire à celle de 2016” avec une production céréalière autour de 30 millions de quintaux, faisant ainsi baisser la valeur ajoutée agricole “pour la deuxième année consécutive” pour s’établir a -6 % contre -4 % en 2019.

Pour ce qui est de la croissance non agricole, elle “devrait fortement ralentir à un niveau historiquement bas de 1,2 %”, estime CDG Capital, compte tenu de l’arrêt d’activité dans de larges pans des secteurs secondaire (BTP et industrie manufacturière et extractive) et tertiaire (activités financières, transport, hôtels et restaurants…).

Selon les analystes de CDG Capital, la demande intérieure ne devrait contribuer au PIB qu’à hauteur de 0,9 % (contre 2,8 % en 2019). La raison ? La détérioration du pouvoir d’achat dans le monde rural suite à deux mauvaises saisons agricoles, le ralentissement de la distribution des crédits bancaires, mais aussi les pertes d’emploi causées par la crise sanitaire, “et ce en dépit des mesures prises par le Conseil de veille économique pour soutenir les ménages à travers les indemnités de 2000 dirhams/mois pour les employés du secteur formel et de 800 à 1200 dirhams/mois pour les ménages opérant dans l’informel”. Sans oublier “la forte dégradation prévue des transferts des Marocains résidents à l’étranger (MRE) compte tenu de la conjoncture difficile de la Zone euro”.

Moins de déficit extérieur, plus d’inflation

Pourtant, l’étude s’attend à un redressement de la demande étrangère “pour contribuer à hauteur de 1,13 % au PIB en 2020 contre -0,4 % l’année précédente”. CDG Capital explique cela par “une atténuation du déficit du commerce extérieur” grâce au recul en volume et en valeur des importations et à la baisse moins atténuée des exportations, “compte tenu de la hausse de la demande sur l’agroalimentaire et la résistance de la chaîne d’expédition des phosphates et dérivés”.

Pour ce qui est de l’inflation, après une année 2019 marquée par une inflation quasi nulle autour de 0,2 % contre 1,9 % en 2018, l’année 2020 devrait connaître un léger rebond à 1,3 %”, prévoit CDG Capital, qui s’attend également à une inflation alimentaire supérieure à 2 % à l’image des années 2015 (2,7 %) et 2016 (2,5 %), et ce “après une année 2019 caractérisée par une déflation alimentaire de -0,5 %, particulièrement liée à un effet de base de l’année 2018, ayant connu un cycle particulier avec une envolée des prix de l’alimentation frais en début d’année”.

Dégradation des réserves de change

S’il est prévu que le déficit commercial baisse à 16,7 % du PIB contre 18,2 % en 2019 — en raison du recul des cours des matières premières et énergétiques et de la résistance des exportations d’agroalimentaire et de phosphate —, les réserves de change devraient prendre un coup cette année 2020. En cause, la baisse des recettes du tourisme, des transferts des MRE et du flux net des investissements directs étrangers (IDE).

Ainsi, sur la base d’une hypothèse de recul de 50 % du solde voyage, de 30 % des transferts des MRE, ainsi qu’une baisse similaire à celle de 2019 des IDE, soit -42 %, le flux net global émanant de ces trois sources devrait reculer de 54,5 milliards de dirhams pour s’établir à 87,3 milliards de dirhams”, précise l’étude.