Nous sommes en 2019. Pouvons-nous maintenant appeler un chat un chat : dérèglement climatique, crise climatique, urgence climatique, dérèglement environnemental, crise et urgence écologique ?”, déclarait l’adolescente Greta Thunberg, jeune activiste suédoise à l’origine de la grève mondiale pour le climat.
It’s 2019. Can we all now please stop saying “climate change” and instead call it what it is: climate breakdown, climate crisis, climate emergency, ecological breakdown, ecological crisis and ecological emergency?#ClimateBreakdown #EcologicalBreakdown
— Greta Thunberg (@GretaThunberg) May 4, 2019
Sixième extinction des espèces, réchauffement de 3 °C d’ici 2100, perturbation des cycles biogéochimiques… L’urgence écologique n’a pas grand chose du prophétisme. Sans tomber dans la collapsologie — courant de pensée des années 70 qui prédit un effondrement à court terme des grandes structures productives et politiques du monde industriel —, une réflexion s’articule aujourd’hui autour du vocabulaire euphémistique usité pour parler de l’environnement.
Si António Guterres, secrétaire général des Nations Unies et le professeur Hans Joachim Schellnhuber, spécialiste des sciences du climat et ancien conseiller d’Angela Merkel, de l’UE et du pape, utilisent l’expression “crise climatique” depuis déjà plusieurs mois, le Guardian est le premier média à introduire de nouveaux termes à sa charte typographique pour décrire plus justement la crise environnementale à laquelle nous somme confrontés. “Crise ou urgence climatique” au lieu de “changement climatique” ; “surchauffe planétaire” pour remplacer “réchauffement climatique” et “négationniste de la science climatique” au lieu de “climatosceptique”. Car la guerre du climat est aussi idéologique.
NEW: In email to staff, The Guardian says it’s changing the style guide when reporting on climate change…
– “Climate emergency, crisis” instead of “climate change”
– “Global heating” instead of “global warming”
– “Climate science denier” instead of “climate sceptic” pic.twitter.com/HDtZEuIkqK
— Mark Di Stefano 🤙🏻 (@MarkDiStef) May 17, 2019
“La négation du réchauffement climatique s’inscrit dans une longue tradition de lobbying, lié à des positions idéologiques et non scientifiques”, expliquaient Naomi Oreskes, professeur d’histoire des sciences de la terre à l’Université de San Diego et Erik Conway, historien à la Nasa, dans leur ouvrage Merchants of doubt (2010).
“Nous voulons nous assurer que nous sommes scientifiquement précis, tout en communiquant clairement avec les lecteurs sur cette question très importante”, a déclaré la rédactrice en chef du Guardian, Katharine Viner. “L’expression changement climatique par exemple, semble plutôt passive et douce alors que les scientifiques parlent d’une catastrophe pour l’humanité.”
“De plus en plus de climatologues et d’organisations, de l’ONU au Met Office, changent de terminologie et utilisent un langage plus ferme pour décrire la situation dans laquelle nous nous trouvons”, a-t-elle ajouté. “Les gens ont besoin de rappeler que la crise climatique n’est plus un problème futur : nous devons y faire face maintenant et chaque jour compte.”