Le phénomène mondial a suscité un fort engouement sur tous les réseaux sociaux ces derniers jours. Le « #10yearchallenge », né sur Facebook, a été repris près de 3 millions de fois sur Instagram. Il est devenu un des hashtags les plus utilisés sur Twitter. Le concept? Poster, côte à côte, une photo de soi il y a 10 ans et une autre datant d’aujourd’hui pour montrer l’évolution. Une occasion de montrer à ses ami(e)s comment notre vie, notre look, nos attitudes ont changé.
Mais depuis un article publié dans Wired, le célèbre mensuel américain spécialisé dans les nouvelles technologies, ce challenge, qui semble inoffensif, a fait naître des doutes sur la sécurité des données des utilisateurs. Et si ces réseaux sociaux profitait du buzz pour rassembler des millions de données afin de construire des algorithmes capables de prédire le vieillissement ?
Un vrai risque ?
Wired alerte sur le risque de récolte de données sur la reconnaissance faciale à grande échelle: « Imaginez que vous vouliez entraîner un algorithme de reconnaissance faciale basé sur des critères liées à l’âge (par exemple, pour savoir à quoi vont ressembler les gens en vieillissant) ». Si facebook dispose de milliards de photos , il n’a pas toujours la possibilité de connaître le moment précis ou ces clichés ont été pris, et d’en distinguer le contenu (exemple: une vieille photo de profil postée récemment, un visage sans rapport avec l’utilisateur, etc.). Des utilisateurs qui contextualisent eux-même ces photos, c’est donc une bénédiction.
Le #10yearchallenge a donc servi des millions de données sur un plateau. « De plus ces photos sont enrichies avec des informations comme : moi en 2008 à l’Université telle, photo prise par X ; 2018 en train de visiter telle nouvelle ville pour le Nouvel an à tel ou tel événement » indique Wired.
Que dit Facebook de cette polémique naissante? Le réseau social se défend dans un Tweet :
The 10 year challenge is a user-generated meme that started on its own, without our involvement. It’s evidence of the fun people have on Facebook, and that’s it.
— Facebook (@facebook) January 16, 2019
« Le 10year challenge est un concept qui a été lancé à l’initiative d’un utilisateur, sans notre implication. C’est une preuve de l’humour que les gens partagent sur Facebook. Rien de plus ».
Dans les faits, il est effectivement impossible de dire si Facebook se servira de ces données ou pas. Mais comme le remarque Wired, c’est aussi aux utilisateurs d’être vigilants et d’anticiper l’usage qui pourrait être fait de leurs données. « Il est important de considérer la profondeur et l’importance des données personnelles que l’on partage et la manière dont elles peuvent être utilisées », note la journaliste.
Ce ne serait pas la première fois…
Former une intelligence artificielle à deviner notre futur faciès pourrait permettre au géant américain de dresser des tendances de vieillissement, normaliser l’aspect esthétique de l’évolution. Cela peut servir par exemple à déterminer qu’un consommateur vieillit « trop vite » et qu’il a donc plus de chance d’avoir une santé précaire. Cela pourrait être utilisé pour le ciblage publicitaire de personnes ayant tel type de peau, tel âge et vivant à tel endroit, etc.
Les soupçons pèsent davantage au regard du passif de la firme américaine, récemment épinglée dans le scandale de Cambridge Analytica. Une affaire qui avait mis en lumière l’extraction des données personnelles de 70 millions de profils Facebook aux États-Unis en mars 2018.
Cambridge Analytica a utilisé une application sous forme de questionnaire psychologique pour siphonner les données (orientation politique, situation maritale, sexe, lieu de résidence, etc…) de Facebook qui ont été utilisées pour prédire les votes aux élections américaines de 2016. Cette question des données personnelles est encore une fois au cœur du débat technologique et de l’innovation.