S’il était initialement question de présenter le bilan politique de l’année 2018 et des perspectives pour 2019, la session ordinaire du Conseil national du Parti de la justice et du développement (PJD), tenue les 12 et 13 janvier à Salé, a été dominée par d’autres sujets principaux. La première est celle de Amina Maelainine, qui fait l’objet d’une vive polémique depuis quelques jours, après la publication de photos d’elles prises à Paris, où on la voit sans son voile, contrairement à ses apparitions publiques au Maroc. Sans la citer, le secrétaire général du parti et chef du gouvernement, Saad Eddine El Othmani a consacré une partie de son intervention à la « référence islamique » du parti.
« Il y a des partis politiques et des lobbies qui essaient d’attirer des tempêtes au-dessus du parti (…) Bien que beaucoup souhaitent la scission du parti, cela ne se fera pas grâce à la vigilance de tous ses militants », a d’abord déclaré Saad Eddine El Othmani lors de la présentation de son rapport politique aux membres du Conseil national, samedi. Pour le chef du gouvernement, certaines parties font usage d’un « mécanisme de distraction dans cette bataille qui vise le parti ».
Un choix « irréversible »
« Nous en sommes conscients », a affirmé El Othmani, soulignant que « le PJD restera attaché à son référentiel islamique. C’est un choix de sa constitution qui est irréversible, qui est même mentionné dans son statut ». « L’attachement du parti à son référentiel islamique est un exercice et non une illusion. Nous devons veiller à ce que l’on soit toujours rattaché (ndlr, au référentiel islamique). Nous devons donner l’exemple, en particulier ceux qui sont en première ligne de l’opinion publique », a encore estimé El Othmani.
Le président du Conseil national, Driss El Azami Idrissi est du même avis. Dans son allocution prononcée pendant la session, il a également insisté sur l’importance du référentiel islamique pour son parti. « Les principes de base du parti sont fondés sur les principes fondamentaux de la Oumma (communauté musulmane, ndlr), à leur tête les préceptes islamiques (…) La religion islamique occupe une place prépondérante dans l’identité marocaine. Elle est inscrite dans la légitimité religieuse du système politique marocain, du fait de la fonction religieuse de Sa Majesté le roi en tant qu’émir de croyants, protecteur de la religion », a déclaré El Azami Idrissi, cité dans un communiqué publié ce lundi sur le site du parti.
« Ce n’est pas un parti de voilées »
Présent également à la session ordinaire du conseil, l’ancien secrétaire général du parti, Abdelilah Benkirane a tenu un tout autre discours concernant la députée. « A mon avis il faut remettre les choses dans leur contexte. Cette affaire, elle est entre qui et qui ? Est-ce que le voile est une question qui se pose entre Dieu et l’être humain ou est-ce que la loi est concernée ? C’est entre elle et Allah. Si elle l’a désobéi, c’est entre elle et Dieu. Si elle n’a pas désobéi, c’est entre elle et Dieu aussi. En tant que parti politique, cela ne nous concerne pas », a d’abord tranché Benkirane, le 12 janvier, dans une déclaration à la presse.
Pour lui, le port du voile relève de sa « liberté individuelle ». « Ce n’est pas une tenue du travail. Ceux qui le portent le font par conviction (…) Si par conviction, ces personnes veulent le faire, c’est leur choix », a-t-il ensuite estimé, affirmant que lorsqu’il était secrétaire général, il avait lui-même cherché à recruter des femmes non-voilées dans le parti.
Soutien unanime à Hamieddine
Accusé d’être le coauteur de l’assassinat de l’étudiant gauchiste Benaissa Ait El Jid en 1993, Abdelali Hamieddine a lui aussi fait l’objet de plusieurs interventions pendant la session ordinaire du parti. « La défense de Hamieddine n’émane pas d’une position émotionnelle, sectaire ou partisane. (…) C’est plutôt une position basée sur les règles fondamentales qui forment le noyau d’un procès équitable« , a fait savoir El Othmani.
« La justice a déjà dit son mot dans ce dossier en 1993« , a-t-il ajouté, rappelant que l’Instance équité et réconciliation a confirmé le caractère arbitraire de l’arrestation de Abdelali Hamieddine » par le passé. « Cela ne signifie en aucun cas qu’on remet en cause le principe d’indépendance de la justice. Notre parti étant un parti national et démocratique, nous nous engageons à respecter le pouvoir judiciaire et les engagements de ses autorités, en particulier à ce stade de l’instauration de l’indépendance du pouvoir judiciaire », a-t-il poursuivi. Sur la même longueur d’ondes, Driss El Azami a lui aussi estimé que la défense de leur frère n’était pas contre les principes d’une « justice indépendante« , mais plutôt en ligne avec ceux d’un « procès équitable« .
« Nous le soutenons. Cette affaire ne devait pas être réouverte. Nous estimons que Abdelali Hamieddine a été inculpé à tort« , a de son côté affirmé Abdelilah Benkirane, estimant que c’est une victime d’une « ruse politique« .