Lahcen Daoudi parviendra-t-il à plafonner les marges des pétroliers ? Après des mois d’hésitation, il semblerait que le ministre a fini par trancher. Dans un entretien accordé le 10 décembre au site d’information 2m.ma, le ministre délégué chargé des Affaires générales et de la Gouvernance a déclaré qu’il avait entamé la procédure pour plafonner la marge des distributeurs de carburants. L’objectif étant d’empêcher ces derniers de « gagner de l’argent sur le dos des citoyens », a-t-il affirmé.
Pourtant, ce même ministre avait déclaré, en novembre dernier, que « le plafonnement des prix des carburants » n’était « plus nécessaire » puisque « la majorité des distributeurs ont déjà appliqué une baisse significative sur leurs prix », avait jugé Lahcen Daoudi. Pourquoi alors ce revirement ? « Lorsque j’ai demandé à ces sociétés de fixer leur marge à 60 centimes, certaines d’entre elles l’ont effectivement appliquée, mais d’autres ne l’ont pas fait. Cela ne pouvait durer », explique Lahcen Daoudi à 2m.ma. Cette baisse avait été demandée à l’occasion d’une réunion organisée avec les pétroliers, le 29 novembre dernier, dans un contexte de baisses des cours internationaux du pétrole.
L’Etat souverain ?
A en croire le ministre, sa décision a également été motivée par la réactivation du Conseil de la concurrence. Il développe en ce sens : « Je ne pouvais pas auparavant mettre en place le plafonnement des marges parce que le Conseil de la concurrence n’était pas actif. Or, l’avis du Conseil de la concurrence est obligatoire ».
En effet, l’article 7 de la loi n° 20-13 relative au Conseil de la concurrence dispose que : « le Conseil est obligatoirement consulté par le gouvernement sur les projets de textes législatifs ou réglementaires instituant un régime nouveau ou modifiant un régime en vigueur ayant directement pour effet d’imposer des pratiques uniformes en matière de prix ou de conditions de vente. » Le ministre affirme ainsi qu’il a déjà envoyé une lettre au Conseil afin qu’il lui fasse part de son avis sur le sujet.
« Nous n’avons pas été informés de manière officielle de cette décision du ministre », nous affirme pour sa part Adil Ziady, président du Groupement des pétroliers du Maroc (GPM). « Le plafonnement des prix dépend des objectifs du gouvernement. Si c’est pour revenir sur la libéralisation et mettre un prix réglementé, l’Etat est tout à fait souverain. Il peut le faire quand il veut. On ne connait pas la stratégie du gouvernement : Est-ce qu’il veut revenir sur la libéralisation et réinstaurer une subvention ainsi qu’un suivi des prix ? C’est tout à fait possible », poursuit-il.
Au gré du cours du pétrole
Ce plafonnement des marges pourrait se faire selon le modèle belge. « Nous avons fait un benchmark avec le modèle belge. Nous y travaillons au ministère », déclarait Lahcen Daoudi en mai dernier. Toutefois, le ministre spécifiait : « On ne va pas prendre tout le modèle belge, mais on va prendre simplement le principe du plafonnement ».
En Belgique, « les prix maxima des produits pétroliers sont calculés par le département énergie du service public fédéral économie selon le contrat de programme », lit-on sur le site de la Fédération pétrolière belge. Le contrat du programme en question « fixe une marge brute maximale de distribution par produit en valeur absolue (centime par litre). Elle ne varie donc pas en fonction des changements du ‘prix produit ex-raffinerie’ », poursuit le texte explicatif. Un décret devrait ainsi plafonner les marges des pétroliers en prenant en compte le prix du pétrole sur le marché international, ainsi que les coûts de stockage et de distribution afin de déterminer un plafonnage tarifaire.
Toutefois, Lahcen Daoudi tient à tempérer la portée de cette mesure : « Les gens croient que le plafonnement va baisser les prix à la pompe. Nous n’allons pas plafonner les prix, mais les marges des distributeurs. Si le cours du pétrole à l’international est haut, même si on plafonne les marges, le prix à la pompe restera élevé », déclare-t-il à 2m.ma.