Pour le patron de Médi1 TV, le procès du Hirak est un « non-événement ». Le 26 juin dernier, quelques minutes après l’annonce des peines de prison à l’encontre des 53 détenus du Hirak par la cour d’appel de Casablanca, Hassan Khiyar a donné ses consignes pour ne pas couvrir le procès, estimant que la « condamnation de Zefzafi est un non-événement ». Comme le montre la capture d’écran ci-dessous, un mail a été adressé dans ce sens, le soir même, à la rédaction de la chaîne de télévision privée.
« Suite aux consignes de M. Khiyar, […] l’info est à ne pas traiter, ni dans les éditions (ndlr, des bulletins d’informations et des JT), ni (dans) les RP (revues de presse) », peut-on lire dans le mail. A la place, le PDG de Medi1 demande à ses journalistes de traiter le point de presse prévu le lendemain, 27 juin, par le gouverneur de la province d’Al Hoceima, Farid Chourak, sur l’état d’avancement du programme « Al Hoceima, Manarat Al Moutawassit ».
Dans les éditions du JT du mercredi, le procès du Hirak n’a, en effet, pas été abordé. Et comme demandé dans le mail en question, le JT du midi débute par un sujet consacré au projet « Manarat Al Moutawassit », dont les « chantiers vont bons trains » selon la chaîne de télévision.
Contacté le 28 juin par Telquel.ma qui souhaitait l’interroger sur ses « consignes », Hassan Khiyar, le PDG de la chaîne, est resté injoignable.
La chaîne de télévision publique Al Aoula, elle, ne s’est pas empêchée de couvrir le sujet, sans pour autant donner les noms des 53 condamnés, à l’instar de l’agence MAP. Dans son JT en français du mercredi, celle-ci a consacré un peu plus d’une minute au procès lié aux « événements d’Al Hoceima ».
« La juridiction a prononcé une peine de 15 ans de prison ferme à l’encontre de trois accusés et a condamné quatre autres à une peine de 20 ans de prison ferme chacune », explique notamment la présentatrice du JT dans cette édition. Le sujet a été abordé en milieu de journal, entre un reportage sur les « nouveaux feux de forêt qui embrasent la Californie » et un autre sur le Congrès de la femme africaine artisane de Casablanca.
Pour ce qui est de la deuxième chaîne de télévision nationale, 2M, plusieurs sujets ont été consacrés au procès du Hirak, que ce soit dans ses JT, ou à travers son site web et sa radio. Les sit-in et manifestations qui ont suivi l’annonce des peines ont également été couverts.
#Procès #AlHoceima
Selon le correspondant de @2MInteractive à #Rabat, plusieurs centaines de personnes se sont retrouvées devant le parlement pour protester contre les #condamnations prononcées à l'encontre de 53 personnes.#Hirak pic.twitter.com/U9HIUZEZ7m— 2M.ma (@2MInteractive) June 27, 2018
#Procès #Hirak
A #Casablanca , sit in de protestation Place des Nations-Unies en ce moment même.
Les manifestants dénoncent les verdicts qu'ils jugent "sévères" des personnes condamnées dans le cadre des événements de #AlHoceima pic.twitter.com/Iaon6jC9Ls— 2M.ma (@2MInteractive) June 27, 2018
Faites Entrer l'Invité, spécial procès du #Hirak. @AnnaElaouni reçoit les deux parties: Mohamed Aghnaj, l'un des avocats des accusés et Mohamed Karrout El Hoceini, avocat de l'Etat, qui s'est porté partie civile.https://t.co/amx88nL2Z7
— Radio 2M (@Radio2M) June 27, 2018
Après un procès de neuf mois, le leader du mouvement Nasser Zefzafi et trois autres de ses co-détenus ont été condamnés le 26 juin, à Casablanca, à 20 ans de prison notamment pour « atteinte à la sécurité de l’Etat ».
49 autres prévenus ont écopé de peines comprises entre un et quinze ans de prison pour « tentatives de sabotage, de meurtre et de pillage », « réception de fonds destinés à une activité de propagande » et « participation à l’organisation de manifestations interdites », entre autres. Les dernières audiences du procès ont été boycottées par les prévenus, qui ont dénoncé dans une déclaration commune la « partialité de la justice », rappelle l’AFP.
Ces condamnations, jugées « lourdes » par plusieurs ONG nationales et internationales dont l’AMDH et Amnesty International, ont été suivies par une vague d’indignation au Maroc, notamment sur les réseaux sociaux.
Vous devez être enregistré pour commenter. Si vous avez un compte, identifiez-vous
Si vous n'avez pas de compte, cliquez ici pour le créer