Ouverte le 31 octobre, l’exposition « De Goya à nos jours » animera jusqu’au 4 février 2018 le Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain (MMVI). En choisissant le Maroc comme première destination en dehors de la péninsule ibérique, cette exposition vient couronner une histoire d’influences et de confluences entre le Maroc et l’Espagne et poursuivre l' »orientation ibérique » du MMVI après les expositions « Volumes fugitifs: Faouzi Laatiris et l’Institut national des Beaux-arts de Tétouan » et « Face à Picasso ». « De Goya à nos jours » se veut donc une occasion pour les férus d’art d’explorer l’éventail de l’héritage pictural espagnol du XVIIIe siècle à nos jours.
La richesse de l’exposition, divisée en compartiments, réside dans sa capacité à refléter l’histoire politique, économique et culturelle traversée par l’institution et dans une certaine mesure, le pays, depuis sa création jusqu’à nos jours. Ces regards sur la collection de Banco de Espana nous offrent ainsi un voyage au coeur de l’histoire de l’art espagnol à travers une séquence riche et éclectique.
Aux origines de la collection
En guise de prélude c’est un tableau représentant du roi Charles III qui oriente les visiteurs vers la galerie des portraits royaux de la collection. Cette galerie a été lancée en 1782, par une commande faite au peintre Mariano Salvador Maella. Ce dernier avait été chargé de réaliser des portraits pour le roi Charles III et des princes des Asturies. Finalement, les oeuvres ont été produites par son élève Andrés Ginés de Aguirre.
L’une des particularités de ce tableau est qu’il possédait un « jumeau »: le roi se montrant dans un cas sous l’aspect d’un courtisan et dans l’autre, sous celui d’un soldat. Les deux toiles deux auraient été peintes par l’élève doué de Maella qui a suivi des prototypes dont la pose et les attributs soulignent la dignité du modèle.
Mémoire du mécénat
Parallèlement à la galerie des portraits royaux, la collection comprend une autre série reflétant l’évolution du portrait sur commande qui a lieu aux XIXe et XXe siècles en Espagne. La tendance a été inaugurée avec les portraits des premiers directeurs confiés à Fransisco de Goya en 1784.
Le peintre aragonais, désigné pour cette exposition comme l’apport espagnol fondamental à la concrétisation de la modernité artistique, peint en 1976 le portrait de Miguel Fernandez Duran, marquis de Tolosa (Tolède, 1720 – Madrid, 1798), directeur du Banco de San Carlos, l’ancêtre de Banco de Espana. Goya réussit ici un portrait du marquis remarquable par sa simplicité, la captation instantanée du personnage et le reflet magistral de sensibilité qui émane de son visage.
Les ménines
Organisée selon un critère chronologique, l’exposition s’articule ensuite autour de plusieurs chapitres de l’histoire de l’art contemporain espagnol. Ici, Soledad Sevilla recourt aux réticules superposés pour représenter l’espace à travers les éléments immatériels qui le composent. Meninas V appartient à la série Les ménines de Vélazquez, datant des années 1980 qui marquent un tournant dans l’oeuvre de l’artiste, qui s’articule désormais autour des trames géométriques.
Vestiges d’une histoire
Ces iconographies sont recontextualisées par l’Equipo Cronica (collectif de pop art actif de 1961 à 1981) qui les a fait cohabiter avec des représentations provenant de l’art populaire et des mass médias. Elles se connectent non seulement par l’engagement par rapport à la question des médias, la consommation et la diffusion de ces images transformées en clichés de la culture contemporaine, mais aussi par rapport aux vestiges d’une histoire d’Espagne que le franquisme utilisait comme propagande. Le collectif se sert aussi bien de la peinture acrylique que de la sculpture en carton-pâte et de la sérigraphie.
Post-minimalisme
Cette pièce, réalisée par Pello Irazu, expérimente les notions d’espace occupé et d’espace vide. Contreplaqué, peinture vinyle et acrylique, elle est construite comme un bloc présentant des espaces intermédiaires éliminés et colorés. Avec une sculpture petite et des mesures modestes, elle renverse ainsi la logique de magnificence de la sculpture basque et se présente comme une oeuvre post-minimaliste.
Les habitations inexactes
Le diptyque Habitaciones no exacta a été exposé en 1933 par Pep Agut, en guise de réplique auto-imposée à sa série Habitaciones exactas, où il construit certaines scènes domestiques dans un même espace contemporain. Ce sont deux photographies identiques des chambres en réticule, encadrées ici en cercle comme deux yeux avec chacun son iris en guise de point de fuite. Un jeu entre l’observateur et l’observé, entre le « je » de l’artiste et le « tu » que semblent énoncer les espaces qui s’offrent au regard du spectateur comme un miroir obscur.
L’or aux tréfonds
Ces deux photos de La camara del tesero font partie d’une exposition réalisée sous le titre Es capital par Cristina Lucas. Elles ont été prises dans la réserve du Banco de Espana. Il s’agit d’ailleurs des premières réalisées dans cet espace par un artiste. Cristina élabore ici à partir des réserves d’or de l’État espagnol, gardées aux tréfonds du bâtiment de Banco de Espana, un conte sur le capitalisme « historique et subjectif. »
Informations pratiques :
Adresse. Musée Mohammed VI d’Art moderne et contemporain (MMVI), angle avenue Moulay El Hassan et Avenue Allal Ben Abdellah 10 000 à Rabat.
Horaires. Le MMVI est ouvert tous les jours, de 10h à 18h (fermé le mardi).
Tarifs. Adultes 30 dirhams.
Étudiants et enfants de moins de 12 ans : 10 dirhams (Accès gratuit le mercredi pour les étudiants et le vendredi pour les nationaux et les résidents étrangers au Maroc)
Contact. Email : [email protected]
Web: www.museemohammed6.ma
Facebook.com/museemohammed6
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