La commission de la justice à la Chambre des représentants a approuvé à l’unanimité le 24 juillet le projet de loi amendant l’article 4 du Code de droit réel, qui concerne les actes de procurations pour effectuer une transaction immobilière. « Nous avons constaté que des procurations falsifiées étaient souvent utilisées pour pouvoir spolier des biens immobiliers« , nous indique le député PAM Adil El Bitar, président de la commission en question.
L’amendement propose de soumettre les procurations « par acte authentique ou acte à date certaine, dressé par un avocat agréé près la Cour de cassation, sauf si une loi spécifique stipule le contraire« . En d’autres termes, « la procuration devrait être faite par des notaires ou des avocats qui ont plus de 15 ans de bar, au lieu d’être rédigée par n’importe qui« , résume Moussa El Khal, juriste et membre de l’Association pour le droit et la justice au Maroc (ADJM).
Selon lui, « c’est une avancée, car cela pourrait diminuer le nombre de spoliations, mais on est loin d’une mesure pour éradiquer ce fléau« , estime-t-il. Initialement proposé par le précédent gouvernement, le projet de loi devrait passer lundi ou mardi prochain en séance plénière à l’Assemblée estime Adil El Bitar.
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Dans ce projet de loi, la proposition des partis de la majorité, notamment le PJD et le PPS, de créer un registre national des actes de procuration a été retirée par manque de consensus. « Le ministère [de la Justice, NDLR] avait répondu favorablement à l’idée, mais il avait prétendu que ce n’était pas le texte adéquat. Son idée était plutôt de faire un fichier central de testament comme en France qui centralise les informations et les droits sur toute personne, comme le testament, les legs, les atteintes à la capacité juridique et les procurations« , détaille Adil El Bitar.
« En cas d’extinction d’une procuration comme un décès ou une révocation, cette information ne serait pas publiée dans le registre que proposaient les partis de la coalition« , souligne le député PAM. Une autre proposition à ce sujet est attendue de la part du département de Mohamed Aujjar.
Débat autour du délai pour porter plainte
Un autre amendement, concernant l’article 2, sera examiné en sous-commission à la Chambre des représentants « à partir de la semaine prochaine« , nous annonce Adil El Bitar. Depuis 2011, cet article très critiqué par les associations de victimes de spoliations permet à toute personne lésée de porter plainte pour récupérer son bien en cas de falsification ou de vol d’un acte à la conservation foncière, à condition qu’il intente l’action en justice dans un délai de quatre ans. Un délai bien trop court pour certaines victimes, qui se rendent compte de la spoliation des dizaines d’années plus tard.
« Au PAM, nous sommes contre la proposition des partis de la coalition gouvernementale de donner un délai qui commence à courir à partir de la date où la personne se rend compte de la falsification, car ce délai devient indéfini dans le temps puisqu’il est conditionné par la prise de connaissance de la falsification« , explique Adil El Bitar. Le PAM propose alors de revenir sur la loi précédant l’amendement de 2011 qui accorde un délai de 15 ans.
Encore loin de l’indemnisation des victimes
« Mais il n’y a surtout aucune loi pour indemniser les victimes de spoliation immobilière« , s’insurge Moussa El Khal de l’ADJM qui demande au gouvernement et aux parlementaires de se saisir de cette problématique. Selon Adil El Bitar, le sujet serait évoqué au niveau des organes du ministère de la Justice. « Jusqu’à présent, nous ne sommes pas au courant d’un projet de loi pour donner un cadre juridique à ces potentielles indemnisations« , explique le député PAM.
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Moussa El Khal demande que les victimes de spoliation et la société civile soient entendues en commission, alors qu’elles n’ont pas été impliquées dans le processus de recherche des solutions plus globales pour éradiquer ce fléau. « Ce sont elles qui ont soulevé le lièvre« , rappelle-t-il. « Nous avons adressé une demande officielle d’audience avec le nouveau ministre de la Justice, Mohamed Aujjar, mais nous attendons toujours« , constate-t-il, dépité.
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