Le conflit s'enlise en Centrafrique malgré un apparent retour au calme

Les récentes attaques armées en Centrafrique ont fait des centaines de morts et d'innombrables blessés, provoquant le déplacement de milliers de personnes.

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Crédit: AFP/ISSOUF SANOGO

La situation sécuritaire en République centrafricaine se dégrade, comme en témoigne le tribut payé par les Casques bleus onusiens, notamment les soldats marocains. La reprise des combats entre groupes armés Séléka (pro-musulmans) et anti-Balaka (majoritairement chrétiens) dans certaines zones de Centrafrique, jusque là considérées comme relativement stables, a fait plusieurs dizaines de victimes au cours des dernières semaines. Ainsi, les zones du nord, du nord-est et récemment de l’est et du sud du pays sont concernées par cette flambée de violences. En plus des morts, ces récentes attaques armées ont augmenté le contingent de populations déplacées.

Un premier bilan sanglant

En moins d’une semaine, six Casques bleus de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique (Minusca), quatre Cambodgiens et deux Marocains, ont été tués à Bangassou, localité située à environ 470 km à l’est de la capitale Bangui. On rapporte également d’autres heurts ayant fait des dizaines de morts à Alindao (centre).

Par ailleurs, l’attaque d’un groupe armé contre un quartier musulman de Bangassou samedi dernier a fait au moins 26 morts d’après un premier bilan de la mission onusienne. Le comité local de la Croix-Rouge évoque de son côté 115 morts, regrettant la sous-évaluation du nombre des victimes par la Minusca. L’origine du groupe armé ainsi que les véritables motivations de l’attaque demeurent jusqu’à présent inexpliquées.

Ce mardi encore, de violents affrontements entre les Séléka et les anti-balaka ont éclaté à Bria dans le nord du pays, faisant 5 morts et 29 blessés selon les Nations Unies. Ce regain de violences survient après plusieurs mois d’accalmie à Bria, l’une des régions centrafricaines où les rivalités entre les deux principaux protagonistes de la crise restent tenaces, en dépit de la mise en place de nouvelles institutions démocratiquement élues en 2016.

Traverser la frontière pour survivre

Face aux violences perpétrées à Bangassou, une bonne partie de la population a fui en République démocratique du Congo, avec qui la Centrafrique partage une frontière au sud. « Au moins 3.000 réfugiés sont arrivés pendant le week-end dans les provinces du nord de la République Démocratique du Congo« , selon les premières estimations des autorités congolaises et du Haut-commissariat de l’ONU aux réfugiés (HCR). « Les réfugiés arrivent dans des conditions difficiles et avec peu d’effets personnels« , et certains sont « blessés« , indique le HCR ajoutant que les réfugiés centrafricains sont logés « dans des familles d’accueil, des écoles et autres bâtiments publics« .

La Minusca se voulait pourtant rassurante mercredi matin. « La situation globale en Centrafrique est calme. Dans le centre de Bangassou, les combats ont cessé depuis hier mardi. Nous contrôlons les points stratégiques. La priorité est maintenant d’assurer la sécurité de la population« , a ainsi déclaré le porte-parole de la mission onusienne.

Le pays ne semble trouver aucune issue à la crise et au chaos nés en 2013 après le renversement de l’ex-président, François Bozizé, par les rebelles Séléka pro-musulmans. Un coup d’État qui a entraîné la contre-offensive de groupes anti-Balaka majoritairement chrétiens. Ces violences compromettent le processus de désarmement que le président Faustin-Archange Touadéra appelle en vain de ses vœux depuis son élection début 2016. « Les groupes armés jouent un double jeu en participant aux réunions du comité de désarmement à Bangui et en continuant leur violence et leur prédation sur le terrain. Ils ont tout intérêt à enliser les discussions« , analyse ainsi Thierry Vircoulon, spécialiste de l’Afrique subsaharienne à l’Institut français des relations internationales (IFRI).

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