Des dizaines de milliers d’Américains ont manifesté ces derniers jours à Washington, New York et Boston contre le décret anti-immigration promulgué le 27 janvier par Donald Trump qui interdit l’entrée du territoire américain aux ressortissants de sept pays (Irak, Syrie, Iran, Soudan, Libye, Somalie et Yémen). Alors que le décret a été immédiatement effectif, des centaines de personnes se sont retrouvées bloquées dans des aéroports en Autriche à Beyrouth en passant par Le Caire, les États-Unis et la France, suscitant une vague d’indignation à travers le monde.
Si le but annoncé est de lutter contre les « terroristes islamistes radicaux« , Trump a du mal à convaincre. « Pour que les choses soient claires, il ne s’agit pas d’une interdiction visant les musulmans, comme les médias le rapportent faussement« , s’est justifié le 29 janvier Donald Trump dans un communiqué. « Cela n’a rien à voir avec la religion, il s’agit de terrorisme et de la sécurité de notre pays« , a-t-il déclaré.
Pour calmer les contestations, Donald Trump a ajouté: « nous allons émettre à nouveau des visas à tous ces pays lorsque nous serons sûrs que nous avons mis en place les politiques les plus sûres au cours des 90 prochains jours« . Des propos qui ne passent pas.
La foule devant JFK chantant "Let them in" et réclamant la fin du #MuslimBan. Des images folles. pic.twitter.com/nlnkEX14vk
— Léo Mouren (@leomouren) January 29, 2017
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1- Un décret légal?
La mobilisation des défenseurs des droits civiques et de la société civile a déjà commencé à donner des résultats. Un juge fédéral américain a émis un arrêt partiel d’urgence le 29 janvier. Seuls les citoyens des sept pays visés déjà arrivés aux États-Unis et interpellés alors qu’ils détiennent des visas valides sont concernés par la suspension du décret, rapporte CNN.
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Les procureurs généraux de 15 États et du district de Columbia ont condamné ce décret le 30 janvier, le jugeant « anticonstitutionnel, non américain et illégitime« . Ils ont promis d’agir rapidement et « d’utiliser tous les outils (…) pour combattre ce décret anticonstitutionnel et préserver la sécurité nationale et les valeurs fondamentales » du pays. La question de la légalité de la fermeture des frontières va énormément focaliser l’attention au cours des prochains jours.
2- L’Iran applique la réciprocité
L’Iran a dénoncé la décision « insultante » des États-Unis et annoncé le principe de réciprocité pour les voyageurs américains. Il est le pays qui a réagi le plus vivement, alors qu’aucun des six autres pays concernés n’a pris une telle mesure.
En Irak, la commission des Affaires étrangères au Parlement irakien et la coalition paramilitaire du Hach al-Chaabi, dominée par des milices chiites, ont appelé Bagdad le 29 janvier à appliquer la réciprocité.
Le gouvernement yéménite a exprimé lundi son « mécontentement » de la décision du président américain Donald Trump, estimant qu’elle encourageait « l’extrémisme« . Au Soudan, le ministère des Affaires étrangères a déploré que cette décision intervienne après la levée « historique » de sanctions économiques américaines le 13 janvier. La Syrie et la Libye n’ont pas encore réagi à l’annonce.
De son côté, la Ligue arabe s’est dite « très préoccupée » par les restrictions d’entrée aux États-Unis dans un communiqué.
3- Indignation internationale
La vague d’indignation qui s’est répandue dans les pays arabes concernés s’étend peu à peu au monde entier. La chancelière allemande Angela Merkel désapprouve les restrictions à l’immigration aux États-Unis, a affirmé son porte-parole le 29 janvier. « Elle est convaincue que même dans le cadre de la lutte indispensable contre le terrorisme il n’est pas justifié de placer sous une suspicion généralisée des gens en fonction de leur origine ou croyance« , a-t-il dit dans un communiqué rapporté par l’AFP.
Même son de cloche en France et au Royaume-Uni. Le 28 janvier au soir, le président François Hollande a mis en garde Donald Trump, lors d’un entretien téléphonique, contre « le repli sur soi » et appelé au « respect » du principe de « l’accueil des réfugiés ». « Nous ne sommes pas d’accord avec ce type d’approche« , a affirmé un porte-parole de la Première ministre britannique Theresa May le 29 janvier, ajoutant qu’elle interviendrait si le décret touche des citoyens britanniques. Le ministre suisse des Affaires étrangères, Didier Burkhalter, a même affirmé que ce décret était « contraire aux conventions de Genève« .
Le Canada, voisin des Américains, s’est érigé en opposant direct à la nouvelle politique migratoire américaine. « À ceux qui fuient la persécution, la terreur et la guerre, sachez que le Canada vous accueillera indépendamment de votre foi« , a tweeté le 28 janvier le Premier ministre Justin Trudeau. De plus, Ottawa accordera des permis de résidence temporaire aux ressortissants des sept pays musulmans visés par le décret américain qui seraient bloqués au Canada, a annoncé le 29 janvier le ministre canadien de l’Immigration Ahmed Hussen.
4- Mobilisation de la Silicon Valley
Mark Zuckerberg, patron de Facebook, et Sundar Pichai, patron de Google, ont condamné ce décret et se sont inquiétés de la possibilité de leurs employés à ne pas pouvoir venir aux États-Unis. Le PDG de Air Bnb a lui proposé d’aider directement les personnes qui se feraient refouler à la frontière: « Air Bnb fournit un logement gratuit aux réfugiés et à tous ceux qui ne sont pas autorisés à entrer aux États-Unis. Contactez-moi si vous avez une urgence« , a-t-il écrit directement sur Twitter.
De son côté, le groupe américain Starbucks prévoit d’embaucher 10.000 réfugiés sur cinq ans dans 75 pays, a annoncé dimanche son PDG, Howard Schultz, deux jours après l’adoption du décret par le président américain.
(Avec agences)
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