La surprenante communication de l’ambassade américaine au Maroc

L’ambassade des Etats-Unis a contacté des médias marocains pour leur déclarer avoir présenté ses excuses aux autorités marocaines pour une erreur présente dans le rapport du département d’Etat, mais sans publier de communiqué.

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Mohamed Hassad et Dwight Bush. Crédit : MAP

Le 20 mai dans l’après-midi, des représentants de l’ambassade des États-Unis à Rabat ont entrepris de contacter plusieurs médias marocains. Les déclarations concernent le rapport du département d’État américain sur les droits de l’Homme au Maroc, à l’origine de la convocation de l’ambassadeur américain par le ministère des affaires étrangères. L’ambassade s’excuse d’une erreur concernant les poursuites judiciaires engagées contre le journaliste Hamid Mahdaoui, imputées dans le rapport à l’actuel patron de la DGSN Abdellatif Hammouchi alors qu’il n’occupait pas à ce poste au moment des faits. Dans la foulée, plusieurs médias (parmi lesquels Le360.ma, LeDesk.ma, Telquel.ma…) ont donc diffusé ces déclarations.

Une ambassade qui prend contact avec les médias pour un sujet diplomatique, la pratique peut surprendre. «Nous avons eu instruction de contacter les éditeurs qui nous avaient sollicités», nous explique un membre du service presse de l’ambassade. La veille de cet appel, les rédactions continuaient de recevoir en guise de réponse le communiqué écrit de l’ambassade, mais qui ne comportait pas les termes «erreur», ni «excuse», et faisait référence à la coopération entre les deux Etats.

D’après Samir Chaouki, directeur de publication du quotidien Les Inspirations Eco, les fonctionnaires de l’ambassade américaine, lorsqu’ils l’ont contacté, lui aurait assuré qu’un communiqué était «en cours de rédaction», nous explique-t-il. Le responsable médiatique a donc décidé de ne pas relayer les déclarations de l’ambassade, et a même consacré son éditorial du 23 mai, intitulé «Le délire de l’US Embassy», à cet épisode.

Pourquoi ne pas avoir choisi la voie de communiqué ? Le représentant de l’ambassade nous précise : «Nous n’avons pas reçu de document écrit donc nous l’avons fait oralement». Mais en diplomatie, les mots et la forme ont toute leur importance. Ces déclarations ont-elles valeur de communiqué ? Pourquoi ne s’excuser que sur l’un des trois points dont le Maroc réfute la véracité ? Sur ces questions, l’ambassade ne préfère pas s’exprimer. «Nous n’avons rien à ajouter aux déclarations de vendredi», nous répond le service presse de l’ambassade. De son côté, le département d’État (qui correspond à un ministère des Affaires étrangères) a pour le moment maintenu le contenu de son rapport.

Les excuses présentées par l’intermédiaire de la presse (et semble-t-il, directement auprès des parties concernées mais pas de manière publique), ne semblent pas avoir apaisé les choses. Le 21 mai, le porte-parole du gouvernement Mustapha El Khalfi a enfoncé le clou, justifiant la réaction marocaine par le refus de «recevoir des leçons».

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