Mohammed V, un aéroport de transit pour les trafiquants de cocaïne

L’aéroport Mohammed V de Casablanca enchaine les arrestations de trafiquants de drogue. Les saisies en grosse quantité, de cocaïne notamment, se sont accélérées ces derniers mois.

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aéroport Casablanca Mohammed V
L'aéroport Mohammed V. Crédit: Joris-Jan / Wikipédia

Début juillet, deux Capverdiennes avaient été arrêtées à l’aéroport Mohammed V de Casablanca, en possession de 6 kg de cocaïne. Le mois précédent, plusieurs trafiquants avaient déjà été appréhendés par les forces policières et les services de douane, en possession de cette drogue dure, dont un Burkinabé (3 kilogrammes en sa possession) et un Sierra-Léonais (4,9 kilogrammes).

Le décompte ne s’arrête pas la : samedi 18 juillet, une Lituanienne et un Bissau-Guinéen furent stoppés en possession de 13 kilogrammes de cocaïne pure. Les passeurs de drogue, étaient à bord d’un vol en provenance de Sao Paolo. Cinq jours plus tard, c’est un  Nigérian en possession de 2,95 kilogrammes de cocaïne, qui avait été appréhendé dans le terminal de l’aéroport. Le trafiquant, né en 1978, était, lui aussi, à bord d’un vol en provenance de la ville brésilienne de Sao Paulo à destination de la ville d’Abidjan.

Plus récemment, le mardi 11 août, une Sierra-Léonaise de 39 ans a été appréhendée à l’aéroport Mohammed V, en possession de 10 kilogrammes de cocaïne. La suspecte venait du Brésil en direction du Libéria et était de passage, en transit à Casablanca.

Toute une série d’actes malveillants que la douane marocaine a pu contrôler à temps. D’après les propos du service de la DGSN, rapportés dans un article de le360.ma « une hausse des actes de contrebande significative, a été constaté ces derniers mois. Nos services sont efficaces. Nous restons dans notre logique des mesures strictes prises par les différents éléments de sécurité de l’aéroport, en coordination avec la DGSN et sous la supervision du Parquet de Casablanca, afin de lutter contre le trafic de drogue. »

Seulement, à la question de savoir si oui ou non, certains ont pu passer à travers les mailles du filet, le service de sécurité de l’aéroport refuse de répondre à nos questions par téléphone. Dans le feu de l’action, certains individus mal intentionnés auraient pu s’en sortir. Derrière l’individu qui transporte la drogue, il y a d’ailleurs bien souvent une mafia, bien préparée, qui sait jouer de ruses pour arriver à ses fins. C’est un défi permanent pour les forces de l’ordre.

En se penchant sur les récentes affaires, nous constatons des similitudes : beaucoup venaient du Brésil, plaque tournante, avec la Colombie, des transferts de cocaïne, vers l’Afrique et l’Europe. Dans la relation qu’ils entretiennent avec les équipes des aéroports étrangers comme celui de Sao Paulo, notre contact n’est là encore pas très loquace : «Nous ne pouvons pas nous exprimer à la place de nos confrères. Chaque pays fait comme il peut, avec ses moyens. » Ce seront ses seuls mots.

Le transfert de la drogue n’est pas qu’une simple question d’allées et venues, par avion, entre un pays producteur, et une plaque tournante de l’exportation. C’est devenue une vraie hémorragie : cela fait déjà une vingtaine d’années que de nombreux trafiquants colombiens et vénézuéliens se sont largement implantés en territoire africain. Le golfe de Guinée, autrefois connu pour ses réserves faramineuses de pétrole, est devenu l’un des secteurs les plus dangereux de l’Afrique, carrefour de drogues et de piraterie moderne. En 2011 c’était plus de 60 ports maritimes qui avaient été attaqués. La présence d’hydrocarbure et la croissance accrue des productions de drogues de cette région, ne cessent d’attirer les plus dangereux criminels

Au départ, les trafiquants venus d’Amérique du Sud pour échapper à des contrôles et des politiques de plus en plus fermes dans leurs pays d’origines, se sont implantés en Afrique de manière légale, en achetant des petits commerces et des bateaux de pêche. Juste de quoi parcourir les mers et le golfe plus facilement. Au fil des ans, le mouvement s’est répandu, les parrains des mafias locales sont originaires d’Amérique du Sud, mais tout le réseau est quant à lui composé d’Africains de souche, souvent pris à leur famille très tôt et en rupture totale avec la société. Ce qui peut expliquer leur nombre élevé  en manque de repères et prêts à risquer leurs vies lors de traversées maritimes, ou lors de transport en avion, en échange d’un maigre salaire.

Un phénomène qui a grandi au point d’en devenir un réel problème économico-social. En 2008, à Toulon, dans le sud de la France, un centre spécialisé dans la lutte anti-drogue a été créé. Il regroupait lors de la création les fédérations françaises, espagnoles, italiennes, grecques et chypriotes, pays hautement concernés par les convois maritimes. Très rapidement, le Maroc s’est joint à eux, assistant, impuissant, à la montée en puissance du phénomène.

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