Les médecins du public luttent toujours pour de meilleures conditions de travail. Le syndicat indépendant des médecins de santé publique appelle à la grève le 30 avril. « De meilleures conditions se répercutent forcément sur les citoyens marocains », estime El Mountadar Alaoui, secrétariat général national du syndicat. Parmi les demandes de l’organisation : meilleure rémunération, transparence dans les mutations et les retraites anticipées, réorganisation des astreintes et des gardes…
La grève épargnera certains services comme les urgences, la réanimation et les CHU mais touchera surtout les centres de santé. « Nous sommes forcés de faire grève et nous demandons pardon aux citoyens mais nous transmettons la responsabilité à monsieur le ministre qui est resté trois ans sans bouger », nous explique El Mountadar Alaoui.
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Un service sanitaire obligatoire ?
Cet appel à la grève arrive quelques jours après l’annonce par le ministre de la santé de sa volonté d’instaurer un service sanitaire qui obligerait les médecins à exercer un à deux ans en zones rurales. Mais El Mountadar Alaoui assure qu’il s’agit du hasard du calendrier. « Nous avons déjà réalisé un sit-in le 21 mars dernier donc c’est une pure coïncidence. Nous défendons nos revendications depuis longtemps », nous explique-t-il.
Mais le syndicat a quand même un avis sur la question du service sanitaire : « Selon nous, c’est une tactique politique pour améliorer son image auprès des citoyens sur notre dos », pense El Mountadar Alaoui. Le docteur l’assure : le passage dans les zones rurales est déjà de mise : « Ce n’est pas la peine de faire une loi. Ce n’est pas obligatoire mais déjà systématique. Nous travaillons depuis longtemps dans les zones rurales et lointaines, et sommes oubliés là-bas. On doit attendre deux ans avant de prétendre à une mutation. Moi j’y suis resté dix ans par exemple ». Mais il concède : « Si la loi assure qu’il ne s’agit que de deux ans et donne l’assurance de partir après, ce serait une bonne loi ». En réalité, les affectations de jeunes médecins se font en général dans des petites villes parfois loin de celles d’origine des médecins, mais pas toujours en zone rurale.
Un manque de moyens en zone rurale
El Mountadar Alaoui explique que la mouvance actuelle chez les jeunes médecins est au rejet des zones rurales, mais que des raisons pratiques l’expliquent, comme par exemple le fait qu’une fois là-bas, les jeunes qui décident de passer le concours de spécialité ne pourraient pas prétendre à toutes les spécialités.
« Personne ne veut travailler dans les patelins isolés », avoue Kaoutar Belbsir, en train de préparer sa thèse. Elle explique surtout son refus d’exercer en zones rurales par le manque d’infrastructures sur place. Même position pour Abir Alafifi « Oui je veux bien travailler à la campagne mais si mon travail est rémunéré, si je peux travailler dans de bonnes conditions (assez de masques à oxygène, de défibrillateur, bloc opératoire…) ». Pour elle, elle n’a rien à rembourser à l’Etat . « C’est de l’esclavage. On assure des gardes, on va dans des hôpitaux périphériques […] tout ça payé 130 dirhams par mois. J’ai 27 ans et je dois toujours demander de l’argent de poche à mes parents. », nous explique Abir Alafifi, qui nous décrit un hôpital public sans moyens : « L’hôpital ne dispose pas de salle de repos, il n’y a pas de bouteille d’oxygène pour les asthmatiques, pas assez de seringues, de fil se suture… ».
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Quelle solution aux déserts médicaux ?
« Pourquoi un étudiant en ingénieurie ne passerait-il pas lui aussi un service obligatoire ? N’a-t-il pas lui aussi fait des études à zéro dirham ? », se questionne la jeune médecin. Une position qui rejoint celle d’El Mountadar Alaoui : « S’il y a une loi, il faut l’appliquer à tous les secteurs de la même façon ».
Mais alors comment résoudre le problème des déserts médicaux ? Le syndicat concerné propose entre autres une meilleure rémunération spécifique à ces zones rurales et pourquoi pas des stages dans ces zones pendant les études. « Il ne faut pas les forcer mais les motiver, en proposant un travail réalisé dans de meilleures conditions », conclut secrétaire général.
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