Fini le règne de la zone euro sur l’économie marocaine ? Le cours du dirham était jusque-là fixé à 80% sur l’euro (et à 20% seulement sur le dollar). Mais le ministère de l’Économie et la banque centrale viennent de décider, le 13 avril dernier, de modifier la proportion de ce panier de devises sur lequel est amarrée notre devise. Si l’euro reste prédominant, il descend à 60% de ce panier de devises, l’influence du dollar dans le cours du dirham passant donc de 20 à 40%. Eléments d’explication.
Comment interpréter ce changement ?
Sur le marché des monnaies, on distingue en général les pays à change flexible et ceux à change fixe.
Le système de change flexible prévoit que le cours de la devise est déterminé par l’offre et la demande de cette monnaie sur le marché des changes. La devise s’apprécie et se déprécie au gré des échanges.
Dans un système de change fixe, le cours de la devise est déterminé politiquement par rapport à une autre devise, ou par rapport au cours de l’or. La devise est stable, sauf lorsque les autorités décident de changer le cours de la monnaie, il s’agit alors d’une dévaluation ou d’une réévaluation. C’était le système monétaire majoritaire au niveau mondial jusqu’aux années 1970.
Au Maroc, le dirham évolue selon un régime mixte : son cours est fixé sur l’évolution de deux monnaies, le dollar et l’euro.
Le Maroc diversifie ses relations avec le monde
Jusque-là, c’était donc surtout l’euro et de façon très secondaire le dollar qui déterminaient la valeur du dirham. Si l’euro s’appréciait alors que le dollar perdait de sa valeur dans des proportions comparables, le dirham s’appréciait donc, comme pour suivre l’euro, mais un peu moins fort que lui, le dollar modérant l’influence de l’euro. Et vice-versa.
Evolution du dollar et de l’euro, exprimés en dirhams. On constate que le change euro-dirham varie peu
Dorénavant, le cours du dirham sera – un peu – plus proche des variations du dollar et un peu moins de celles de l’euro, ce qui, indique le communiqué de Bank Al-Maghrib (BAM), permettra « de refléter la structure actuelle des échanges extérieurs de notre pays ».
Les autorités prennent acte du poids du dollar dans les échanges internationaux, d’autant que c’est la devise dans laquelle sont notamment échangés les produits pétroliers. Le ministre de l’Économie, Mohamed Boussaïd, indiquait ainsi récemment à Médias 24 qu’en 2013, 55% des échanges extérieurs du royaume s’étaient faits en euros, 36 % en dollars et le reste dans d’autres devises.
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Mais dans une seconde justification complémentaire, la BAM indique que c’est également une façon pour elle de se préparer à adopter le régime de change flexible. « Le taux de change fixe a beaucoup servi, mais il peut devenir un handicap pour l’économie » a notamment argumenté Mohamed Boussaïd, toujours à Médias 24. Ce changement de régime de change, Abdellatif Jouahri, gouverneur de Bank Al-Maghrib, l’a annoncé comme prévu pour « les mois à venir ».
Curieusement, cette décision intervient alors que le cours des deux monnaies, après avoir fortement divergé, notamment en 2008, tendent à se rapprocher, certains observateurs évoquant même la parité en préparation de « l’eurodollar ».
Cours du dollar exprimé en euros, sur les 10 dernières années
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