Ynna versus Fives: la dernière carte de Miloud Chaâbi

La sentence est tombée le 13 février : les actions Snep que détient Ynna Holding vont être mises aux enchères le 25 février. C'est le dernier rebondissement du long contentieux opposant Ynna Asment à CPC Maroc, filiale marocaine de l’entreprise Fives FCB. Retour sur l’affaire.

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Miloud Chaâbi
Miloud Chaâbi, dirigeant d'Ynna Holding.Crédit : Yassine Toumi

En 2008, Ynna Asment (filiale spécialisée dans le ciment) passe un contrat avec CPC Maroc pour la construction d’une cimenterie. En 2009, CPC Maroc reproche à Ynna d’avoir rompu le contrat de manière non conventionnelle. Chacune des deux parties se renvoie la balle. D’après Ynna Asment, il n’est pas question de payer son client étant donné qu’il n’a pas honoré ses engagements : indexer la facture sur le prix du fer.

Un arbitrage international a sanctionné Ynna Holding

En 2009, Fives FCB décide de s’en remettre à un arbitre international basé à Genève, comme le contrat la liant à Ynna le prévoit. L’arbitre statue en sa faveur : Ynna Holding et Ynna Asment doivent payer une amende de 292 millions de dirhams à Fives FCB. La sentence ne concerne donc seulement la filiale mais aussi la maison mère. Mais la holding refuse de se reconnaître responsable de Ynna et ne respecte pas le jugement.

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En vertu d’une convention internationale ratifiée par le Maroc et de la loi 08-05 de 2007, il est revenu ensuite au tribunal de commerce de Casablanca de faire exécuter la décision de l’arbitre, sans revenir sur le fond de l’affaire mais seulement en vérifiant si la décision n’était pas contraire au droit national. Mais là, surprise: le tribunal décide de ne sanctionner qu’Ynna Asment, pas Ynna Holding. Fives FCB ne s’en contente pas, et dénonce le fait que cette filiale ne soit qu’une « coquille vide ». Elle n’est en effet pas solvable. Et pour preuve : pour exécuter la décision de justice, un huissier se rend en février 2014 au siège de Ynna Asment et saisit ses biens (tableaux, meubles, ordinateurs…).

Le plaignant se base, entre autres, sur le fait que le contrat signé mentionne la Holding en en-tête. Un argument que le groupe de Miloud Chaâbi juge insuffisant. Mais il n’a pas pourtant pas réussi à convaincre l’arbitre de Genève que la Holding n’était pas solidaire de la filiale.

Ynna Holding se pourvoit en cassation

Fives FCB décide donc de faire appel et la Cour d’appel de commerce a finalement statué le 15 janvier dernier : la décision de l’arbitre concerne également Ynna Holding. Fives FCB obtient gain de cause. Du coup, la justice marocaine demande la mise aux enchères des actions que Ynna Holding détient dans la Snep, cotée à la bourse de Casablanca.

Le 13 février, le Conseil déontologique des valeurs mobilières traduit la décision de justice et annonce que la vente aux enchères aura lieu le 25 février. Mais le PDG Miloud Chaâbi n’accepte toujours pas cette décision. Ce 17 février, il annonce qu’il va demander à la Cour de cassation (troisième instance, donc) de statuer. Dans un communiqué de presse, l’entreprise maintient que « Ynna Holding n’a pas signé de contrat avec la société française Fives FBC ».

Et considère qu’en étendant la clause compromissoire à la société mère, la Cour d’appel se fonde sur « des théories doctrinales non applicables en droit marocain ». La ligne de défense est claire : Ynna ne conteste pas la sanction mais l’entité qui en fait l’objet. Quoi qu’il en soit, un pourvoi en cassation ne suspend pas un arrêt,  la vente aux enchères devrait bien avoir lieu.

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