Une proposition de loi interpelle la société civile sur les mariages de mineurs

Une proposition de loi du MP sur le prolongement de la période transitoire permettant de régulariser les mariages pourrait être utilisée pour légaliser des mariages de mineurs.

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Une proposition de loi du Mouvement populaire (MP) a été adoptée, le 12 janvier, à la commission de la justice et de la législation au sein de la Chambre des conseillers. Le texte porte sur la modification de l’alinéa 4 de l’article 16 de la Moudawana qui instaurait une période transitoire de 5 ans pour la régularisation de mariages traditionnels, conclus par la simple lecture de la Fatiha.

L’alinéa 4 de l’article 16 du Code la famille de 2004 , stipule en effet que  « l’action de reconnaissance est recevable pendant une période transitoire ne dépassant pas cinq ans, à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi ». Cette période transitoire avait déjà été prolongée de 5 ans en 2009. Or, cette période transitoire a été utilisée pour légaliser de nombreux mariages de mineures, interdits par le Code de la famille, selon une étude par l’association « Initiative pour la promotion des droits des femmes » (IPDF). Ainsi, entre novembre 2012 et juin 2013, 25% des verdicts favorables dans les demandes d’authentification concernent des filles mineures, dont l’âge au début du mariage ne dépassait pas 15 ans.

Une proposition « de bonne foi » selon le MP

Or, cette fois-ci, la proposition de loi, si elle est adoptée, accordera encore cinq années supplémentaires aux couples pour régulariser leur situation. L’alinéa 4 de l’article 16 stipulerait que « l’action de reconnaissance est recevable pendant une période transitoire ne dépassant pas quinze ans, à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi ».

« Nous avons émis cette proposition de loi car nous avons remarqué que de nombreux mariages n’ont pas encore été authentifiés, surtout dans les campagnes et dans des villes où les gens n’ont aucune connaissance de cette loi. C’est une chance pour les citoyens », nous confie Mohamed Laâraj, député du MP. Quant aux mariages de mineurs, celui-ci assure que « cette proposition de loi concerne l’authentification des mariages des adultes (à partir de 18 ans) et a été émise de bonne foi. Si il y’a dérive, ce sera à la loi de trancher ».

« Une proposition de loi pour cacher les mariage de mineurs »

Toutefois, cette proposition de loi ne plaît pas à la Fédération de la ligue démocratique pour les droits de la femme. « Il est vrai que, dans la réalité, de nombreux mariages n’ont pas encore été authentifiés. Malheureusement cette période transitoire est utilisée pour cacher les mariages de mineurs et la polygamie », nous indique Fouzia Assouli, la présidente de la fédération.

L’association souhaite que le Code de la famille soit renforcé afin de sanctionner tous ceux qui pratiquent encore des mariages de mineurs : « Les partis politiques n’ont pas écouté nos propositions. Au delà du prolongement, il faut sensibiliser les gens et installer des magistrats mobiles dans les communes afin que la justice soit au courant de toute affaire de polygamie ou de mariages de mineurs ».

De même, elle précise que la fédération avait proposé que la prolongation soit d’une année seulement afin de « mettre plus de pression contre les mariages de mineures ».

A noter que plus de 35.000 mariages de mineurs ont été enregistrés en 2013 contre 18.000 en 2004 soit une progression de 91%, selon une étude réalisée par l’Unicef, le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) et l’Association meilleur avenir pour nos enfants (Amane). Quant à la proposition de loi, adoptée en commission, elle sera soumise au vote en session plénière à la Chambre des représentants.

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