Quand nos politiques dérapent

Suite à la bagarre entre Hamid Chabat et Aziz Lebbar au parlement, Telquel.ma revient sur les dérapages les plus marquants de nos hommes politiques.

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Le combat Chabat-Lebbar au parlement.
Le combat Chabat-Lebbar au parlement. Crédit : Rachid Tniouni.

Lors de la rentrée parlementaire, le vendredi 10 octobre, le roi Mohammed VI a appelé les parlementaires à avoir une attitude conforme « aux lois et aux règles de déontologie ». Une instruction qui devrait être suivie par la mise en place d’une charte éthique adoptée par les deux chambres du parlement.

Pourtant, quelques minutes après ce discours, Hamid Chabat, secrétaire général de l’Istiqlal, et Aziz Lebbar, conseiller du Parti authenticité et modernité (PAM), se sont battus dans l’enceinte même de l’hémicycle. Cette rixe entre les deux hommes politiques, qui a eu lieu suite à une réunion des partis de l’opposition, serait due à un désaccord concernant le plan de réaménagement de la ville de Fès, si l’on en croit les propos de Hamid Chabat à nos confrères du 360.

De son coté, Lebbar affirme, selon la même source, avoir été passé à tabac par le chef de l’Istiqlal et le député du même parti, Abdelkader Kihel, pour avoir répondu à une pique de Chabat. Cette bagarre s’inscrit dans une longue tradition d’attitudes déplacées de nos parlementaires sur le champ public. Florilège du « meilleur du pire » de nos hommes politiques.

14 février 2013 : Driss Radi montre son ventre

Lors de l’un de ses discours sur la politique immobilière de l’État, Abdelilah Benkirane est interrompu par le sénateur de l’UC (Union constitutionelle), Driss Radi. Le chef du gouvernement interpelle Radi en lui disant : « Tu devrais te taire. Tu n’es qu’un conseiller et moi je suis le chef du gouvernement à qui tu dois t’adresser avec politesse ». Il ponctue son attaque par cette remarque : « Regarde ce qu’il y a dans ton ventre avant de parler ». Suite à cette intervention, Radi lève sa chemise et exhibe son ventre devant les conseillers. Cette scène n’apparaît pas dans les images enregistrées par les caméras mais des photos du ventre de Radi ont été prises.

17 juillet 2013 : Benkirane veut plus de temps

Mercredi 17 juillet 2013, le Maroc célèbre le mois de ramadan. Un mois qui fatigue autant le corps que l’esprit, comme en témoigne l’intervention d’Abdelilah Benkirane au parlement. Alors qu’il était interrogé sur la question de l’investissement au Maroc, Abdelilah Benkirane est interrompu par le président de la chambre des conseillers, Mohamed Cheikh Biadillah, qui l’avertit au sujet du temps de parole. Benkirane s’emporte et insiste sur le fait que la constitution lui donne le droit de parler. Il accuse également des forces qui cherchent à affaiblir son gouvernement.

 1er mai 2014 : Le duel Chabat-Benkirane

Les manifestations  du 1er mai servent de théâtre à l’affrontement entre le chef du PJD, Abdelilah Benkirane, et son homologue de l’Istiqlal, Hamid Chabat. Lors du défilé de l’Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM, proche de l’Istiqlal), Chabat compare le gouvernement, que l’Istiqlal a quitté, à un patient dans le « coma » et qualifie le chef du gouvernement de « mcharmel ». Il invite même Benkirane à « dégager au plus vite du gouvernement ».

De son côté, le secrétaire général du PJD, présent à la manifestation de l’Union nationale des travailleurs du Maroc (UNTM, proche du PJD), évoque également le départ de l’Istiqlal de son gouvernement en des termes peu flatteurs : « Quand nous avons constitué le gouvernement avec les autres partis de la majorité, nous étions sur le chemin des réformes jusqu’à ce qu’un sga3 (un agitateur, en référence à Chabat, ndlr) en décide autrement ».

20 mai 2014 : la cuillère d’or

Une session de questions orales au gouvernement se tient au parlement lorsque Yassine Radi, député de l’UC, interpelle le ministre des Affaires générales, Mohamed El Ouafa, sur la question des hausses de prix et lui pose la question suivante : « Mettez-vous à la place du peuple. Si vous ne gagniez que le salaire minimum, pourriez-vous supporter ces hausses ? ».

Une intervention qui n’a pas été du goût d’Abdelaziz Aftati, député du PJD, qui crie alors : « Ce n’est pas à des gens qui sont nés avec une cuillère en or de parler des souffrances du peuple marocain ». Et d’ajouter : « C’est cette caste de nantis qui a volé l’argent des Marocains ». L’opposition s’énerve et quitte la salle au moment où El Ouafa répond : « Je n’ai pas besoin de gagner le Smig pour connaître les souffrances du peuple et si vous (Yassine Radi, ndlr) pouvez aider le peuple avec votre modeste fortune, ce serait une sage initiative ». La dispute se poursuit même lorsque le quatrième vice-président du parlement, Abdelattif Wahbi, suspend la session. Lors de la joute verbale opposant El Ouafa à  des membres de l’opposition, le ministre, un brin poétique, invite le député de l’Istiqlal, Mohamed Sobhi, à aller « se faire f….. ».

Juillet 2014 : Benkirane collabore avec Daech et le Mossad (selon Chabat)

Dans une vidéo publiée le 6 juillet sur YouTube, le secrétaire général du parti de l’Istiqlal, Hamid Chabat, accuse les dirigeants du PJD de financer l’organisation terroriste Daech. L’argument du chef du parti de la balance repose sur une liste de personnalités qui financerait le califat ; liste publiée, selon Chabat, par un journal américain, et dans laquelle figure six membres du PJD. Quelques jours plus tard, c’est dans l’enceinte du parlement (et devant un Benkirane hilare) qu’il accuse le PJD d’être soutenu par le Mossad tout en réitérant son accusation selon laquelle le parti de la lampe soutient l’État islamique.

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  • Incroyable mais vrai. Quelquefois le ridicule atteint des sommets insoupçonnables. Le spectacle de ces représentants du peuple entrain de dialoguer à coups de poings, comme de vulgaires voyous dans la rue, soulève beaucoup d’interrogations. Allons-nous dorénavant être gouvernés par ce genre de personnages qui ne semblent avoir reçu aucune éducation? Ne seraient-ils pas en fin de compte représentatifs de notre société marocaine devenue, à notre insu, méconnaissable, perdant progressivement mais sûrement tout ou partie de ses repères, de ses valeurs et de son âme? N’appartiendraient-ils pas à une nouvelle classe d’individus mal élevés, dépourvus de scrupules, sans valeurs ni principes? Une classe qui serait en voie de s’installer au pouvoir en lieu et place des intellectuels vertueux, honnêtes et responsables démoralisés et épouvantés par les spectacles actuels de la vie politique marocaine ? Si la tendance se confirme, la politique ne riquera-t-elle pas de devenir chez-nous une chose répugnante, repoussante et dont les acteurs n’auraient plus du tout droit au respect du citoyen et encore moins de l’Histoire?