Un deuxième conflit entache les relations entre Mustapha El Khalfi et les responsables de la télévision publique en mai 2014. Lors d’un discours au parlement, le ministre de la Communication et Porte-parole du gouvernement reproche aux chaines publiques leur non-respect des valeurs nationales et déclare qu’« il est inadmissible que des fonctionnaires puissent contrôler les mœurs des Marocains ». La réponse ne se fait pas attendre, et une pétition dénonçant « toute tutelle sur les medias est signée par des journalistes, artistes et intellectuels parmi lesquels figurent la directrice adjointe de 2M, Samira Sitail. Dans une déclaration a l’agence MAP le ministre rétorque que les signataires de la pétition visent à « stéréotyper les médias et à confisquer l’opinion »
1- Le rétropédalage des cahiers de charge
En avril 2012, le ministre de la communication veut marquer la télévision nationale de son empreinte et décide de changer radicalement la programmation d’Al Aoula et de 2M. La mouture proposée par le département de Mustapha El Khalfi imposait à la première chaine de diffuser 80% de ses émissions en langue arabe. Du côté de la deuxième chaine, le journal télévisé francophone se retrouvait relégué en deuxième partie de soirée. La proposition a été rejetée par le management de 2M et le présentateur du JT, qui ont critiqué une approche «interventionniste ». Mustapha El Khalfi est obligé de reculer et de revoir sa copie.
2- Un code de la presse qui se fait désirer
La refonte de la législation concernant la presse est devenue un serpent de mer depuis le temps qu’on entend parler. Mustapha El Khalfi a annoncé que le code de la presse sera prêt pour le mois de juin 2014. Pourtant la nouvelle mouture tant attendue de ce texte peine à être finalisée. « La commission scientifique du syndicat national de la presse marocaine (SNPM) a reçu une première copie du code de la presse qu’elle a évalué » se contente d’indiquer le président du SNPM, Younes Moujahid. Le SNPM affirme avoir reçu 2 projets de réformes concernant le statut de journaliste professionnel et le conseil de la presse. La deuxième version du code de la presse n’a toujours pas été présentée au corps syndical mais « le ministre a promis qu’on la recevrait prochainement » indique Moujahid. Mustapha El Khalfi respectera-t-il la deadline qu’il s’est fixé ?
3- Tensions avec les journalistes
Lorsque Mustapha El Khalfi répond, en septembre 2013, aux ONG critiquant l’arrestation du journaliste, El Khalfi en profite pour enfoncer son ex-confrère :
« L’essence de cette affaire se rapporte à une vidéo d’environ 41 minutes attribuée à l’AQMI, qui fait l’apologie du terrorisme et constitue une menace directe à la stabilité du pays. »
Quelques mois plus tard, Ali Anouzla attend toujours son verdict. Si l’affaire se tasse, elle est tout de même rappelée aux bons souvenirs du ministre par la société civile et les ONG internationales. Dernier coup d’éclat en date, celui de l’homme d’affaire et militant Karim Tazi qui tance sérieusement Mustapha El Khalfi.
D’autres journalistes ont également de quoi nourrir une rancœur envers le ministre de la communication. Parmi eux, on peut compter le journaliste de l’agence AFP Omar Brouksy, qui, en 2012, s’est vu retirer son accréditation pour un article mettant en opposition le palais et le gouvernement. On peut également citer le journaliste Mustapha Hassnaoui qui croupit actuellement en prison après avoir été refoulé par les autorités turques pour « terrorisme ». A noter que Hassnaoui avait entrepris son voyage en Turquie pour effectuer une enquête sur le jihadisme.
4- Un discours qui tourne en boucle
Les sorties médiatiques de Khalid Naciri, prédécesseur de Mustapha Khalfi, lui avaient valu le surnom peu flatteur de « Comical Khalid ». Mustapha Khalfi n’en est pas (encore ?) là, mais le ministre actuel adopte la même ligne quand il s’agit de dénoncer des rapports d’ONG internationales.
Lorsque le Maroc stagne à la 136e place du classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières (RSF) en 2013, le ministre qualifie le travail de RSF de : « surprenant, approximatif et non conforme à la réalité de la pratique journaliste dans notre pays ».
Une réaction similaire est observée lorsque le Maroc se classe au 147e rang du classement établi par Freedom House. « Le classement de Freedom House est inéquitable et ne reflète pas la réalité de la liberté de la presse au Maroc », avait déclaré El Khalfi à la publication des résultats en mai 2014.
5- Les atermoiements sur les droits d’auteur
En décembre 2013, El Khalfi prévoit de règlementer la copie privée et de transformer le Bureau marocain des droits d’auteurs (BMDA) en organe public. Des projets ambitieux au vu de la refonte totale que cela signifie, mais qui peinent à se concrétiser. Le ministre n’a plus communiqué sur le sujet depuis la présentation de son plan.
6- CCM : un départ et des questions
Nourredine Sail, ancien patron du Centre cinématographique marocain (CCM) apprend son départ effectif à la retraite le 8 avril sur le site du ministère de la communication. Une mise à la retraite conforme au règlement certes, mais dont le timing semble mal choisi : Saïl planchait sur un système d’avance sur recettes pour encourager la création de nouvelles salles de cinéma.
7- Une nomination sous haute tension
La nomination d’un nouveau secrétaire général du ministère de la Communication s’est faite dans la controverse. Ce n’est qu’après la polémique qu’Ahmed Yaacoubi est finalement choisi par une commission interne. L’opposition a reproché un temps au ministre de favoriser son chef de cabinet, un cadre dirigeant du MUR (Mouvement Unicité et Reforme) pour briguer ce poste. Le ministre s’en était vivement défendu.
Vous devez être enregistré pour commenter. Si vous avez un compte, identifiez-vous
Si vous n'avez pas de compte, cliquez ici pour le créer