Portrait. La Tangéroise d’Hollywood

Des épisodes de Desperate Housewives et de Grey’s Anatomy portent sa signature, des stars internationales lui obéissent au doigt et à l’œil quand elles sont devant sa caméra… Sanaa Hamri est l’une des réalisatrices les plus en vogue aux Etats-Unis. Récit de la success story d’une 3ayla qui a conquis l’Amérique.

Quel est le point commun entre Prince, Sting, Mariah Carey ou encore Lenny Kravitz ? Tous ont déjà fait appel à Sanaa Hamri pour réaliser un de leurs clips. Certains ont été de grands succès et ont tourné en boucle sur MTV ainsi que sur des centaines d’autres chaînes TV musicales. Sur la Toile, les vidéos de la réalisatrice maroco-américaine créent le buzz également. L’une de ses toutes dernières, celle de la chanson Super Bass de Nicki Minaj, a été visionnée plus de 300 millions de fois sur Youtube, et lui a valu un trophée lors de la prestigieuse cérémonie des Video Music Awards (VMA) il y a quelques mois. Une belle consécration pour cette jeune femme née à Tanger, qui affirme s’être retrouvée derrière la caméra un peu par hasard.

Papa was a Rolling Stone…

Son enfance, elle la passe dans sa ville d’origine, entre sa mère américaine et son père, le peintre Mohamed Hamri. L’homme est très impliqué dans la vie culturelle de Tanger, et dans les années 1960, il croise même la route de Brian Jones des Rolling Stones, à qui il présente des musiciens locaux. En résultera l’album Brian Jones Presents The Pipes Of Pan At Joujouka, sorti en 1968. “Mon père était quelqu’un de très authentique, il avait le Maroc et ses traditions dans la peau”, raconte-t-elle. A l’époque, bien qu’inscrite à l’Ecole américaine, elle est loin d’être déconnectée de la réalité marocaine. “Mon enfance, je ne l’ai pas passée cloîtrée dans une villa, loin de là. Je jouais dans la rue avec les enfants des voisins, ou à la plage, comme n’importe quelle jeune Tangéroise”, poursuit Sanaa Hamri, aujourd’hui âgée de 37 ans.
Adolescente, la jeune fille commence à s’intéresser à la musique, et écoute quotidiennement Médi 1, ainsi que les radios espagnoles. Mais elle est encore très loin de s’imaginer qu’un jour elle sera une réalisatrice reconnue. A 17 ans, lorsqu’elle décroche son baccalauréat, elle s’envole pour New York où elle étudie le théâtre et la psychologie. “Je n’étais pas spécialement attirée par le cinéma ou la télévision”, se souvient-elle. C’est en essayant de filmer et de monter une vidéo dans le cadre d’un de ses cours qu’elle découvre sa vocation.
En 2000, une fois diplômée, la jeune femme réussit à décrocher un poste d’assistante dans la société de production de Malik Sayeed, réalisateur célèbre dans le milieu musical new-yorkais, connu pour avoir travaillé, entre autres, avec Mariah Carey ou Denzel Washington. Après avoir vu quelques-uns de ses travaux, il décide de la prendre sous son aile et de devenir son mentor. Son premier test ? Une vidéo pour le groupe Reggae Born Jamaicans. Test concluant. Malik Sayeed la présente à plusieurs artistes. La carrière de Sanaa Hamri est lancée.

Amie des stars

Quelques années plus tard, la jeune femme réalise des clips vidéo pour les Destiny’s child, Mary J.Blige, Dr Dre ou encore Cristina Aguilera. Certains de ces artistes deviennent même des amis très proches. C’est le cas de Mariah Carey et Prince. “Ce sont des artistes exceptionnels, je les considère comme de véritables amis. D’ailleurs, je suis déjà venue avec eux au Maroc il y a quelques années, pour leur faire découvrir mon pays d’origine”, confie la réalisatrice. Aurait-elle un lien avec le fameux salon marocain de Mariah Carey, qui l’a inspirée d’ailleurs pour baptiser son fils “Moroccan” ? “Effectivement. C’est après notre voyage à Marrakech il y a plusieurs années qu’elle a découvert l’artisanat marocain, et qu’elle a décidé d’aménager tout un salon à la marocaine dans sa résidence new-yorkaise”, raconte Sanaa Hamri.
Très vite, la jeune femme prend la décision de ne pas rester cantonnée aux vidéos musicales. Elle se lance dans les documentaires musicaux et réalise The Adventures of Mimi, un film sur Mariah Carey, ainsi que The Art of Musicology pour Prince. Elle se positionne ainsi comme la réalisatrice la plus en vogue de l’industrie musicale américaine, surtout que ces deux artistes sont connus pour être perfectionnistes. Mais Sanaa Hamri veut aller toujours plus loin. Ce qu’elle souhaite, c’est faire des séries télévisées ou des films. “Pour moi, le plus important c’est de raconter à travers mes travaux des histoires fortes sur le plan humain”, affirme-t-elle. Elle réalise alors quelques épisodes de séries TV très populaires, telles que Desperate Housewives ou encore Grey’s Anatomy. Un challenge réussi qui l’encourage à faire le grand saut : réaliser son premier long-métrage.
En 2006, elle sort Something New, une comédie romantique avec Simon Baker (Le Mentaliste). Le film reçoit des critiques plutôt positives et la jeune Tangéroise décide de persévérer sur cette voie, tout en continuant à réaliser des clips vidéo. Deux ans plus tard, elle récidive et réalise le deuxième volet du film Quatre filles et un jean, une comédie pour adolescents, avec America Ferrara et Blake Lively, futures stars du petit écran, respectivement dans les séries Ugly Betty et Gossip Girl. Mais le vrai tournant dans sa carrière, elle le connaîtra en 2010, avec son long-métrage Just Wright, dont le rôle principal est campé par Queen Latifah. Même si le film n’est pas un succès au box-office, il est plébiscité par la critique.

Le meilleur est à venir

Et cette superwoman de la réalisation ne compte pas s’endormir sur ses lauriers. Travailleuse, elle planche déjà sur un nouveau projet de long-métrage et a réalisé plusieurs épisodes des séries Shameless, Men in Trees ou encore Life Unexpected. Un autre projet qui lui tient à cœur, la série Bounce, dont elle vient de réaliser un épisode pilote pour la chaîne TV musicale VH1. Si le projet est retenu, il s’agirait de la première série à être diffusée par la chaîne. Un challenge que Sanaa Hamri souhaite relever avec succès. Des projets au Maroc dans tout ça ? “Je rêve d’y tourner un film, en darija et avec des acteurs marocains. Une histoire totalement ancrée dans le quotidien du pays”, explique-t-elle. Des idées de scénario ? Pour le moment, elle ne sait pas encore. Mais la jeune femme compte sur ses séjours réguliers au royaume pour l’inspirer. Dès qu’elle peut, Sanaa Hamri saute dans un avion et vient rendre visite à sa famille dans sa ville natale. “C’est une véritable bouffée d’air frais pour moi. J’adore ma maison en pleine médina, et l’un de mes moments préférés, c’est lorsque je mets ma djellaba et que je sors faire les courses au souk”, raconte-t-elle. Fidèle à ses origines, Al 3ayla !

 

Sanaa & RedOne. Chamal Connection

“J’adore croiser RedOne, ça me fait toujours du bien de parler darija avec lui, surtout qu’on a vraiment le même accent vu qu’il est de Tétouan”, raconte la réalisatrice. Il est vrai qu’en plus d’être tous les deux marocains, ils sont tous les deux originaires du nord. Ce qui a donné naissance à plusieurs sujets de conversation. “On a beaucoup à se dire vu qu’on a plus ou moins le même âge et qu’on vient de la même région”, souligne Sanaa Hamri. Mais avec leurs plannings très chargés, ils se croisent surtout lorsqu’ils doivent travailler ensemble. L’an dernier, Sanaa a réalisé “This is what rock n’roll looks like”, le premier clip de Porcelain Black, une artiste découverte par le producteur tétouanais. “Sur le plateau, pendant le tournage, tout le monde voulait savoir ce qu’on pouvait bien se dire”, se rappelle la réalisatrice. Mais ils n’étaient pas les seuls Marocains présents, puisque Bilal The Chief, collaborateur de RedOne et DJ au sein du groupe The WAVS fait également une apparition dans le clip.

 

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