Diaspora : seuls 10% des transferts des MRE sont dirigés vers des investissements productifs

Les Marocains résidant à l’étranger (MRE) constituent un maillon essentiel de l’économie nationale, grâce à des transferts financiers qui ne cessent de croître. Selon un rapport récent de l’Observatoire de l’action gouvernementale, ces flux atteindront probablement 120 milliards de dirhams en 2024, après avoir culminé à 115,3 milliards en 2023.

Par

DR

Ce chiffre, en constante augmentation depuis 2019, reflète l’attachement des MRE à leur pays d’origine et leur contribution continue à son équilibre financier. Pourtant, ces transferts restent largement orientés vers la consommation et l’épargne, limitant leur potentiel à stimuler une croissance économique durable.

Près de 60% des fonds consacrés au soutien des familles

Malgré leur importance économique indéniable, les transferts des MRE souffrent d’une exploitation déséquilibrée. Près de 60% des fonds sont consacrés au soutien des familles et 30% à l’épargne, tandis que seulement 10% sont dirigés vers des investissements productifs. Ces chiffres révèlent une opportunité manquée pour mobiliser ces ressources dans des projets stratégiques générateurs de valeur ajoutée et d’emplois. En comparaison, des pays comme le Nigeria et le Kenya allouent respectivement 45% et 35% des transferts de leur diaspora à des investissements, ce qui souligne le retard du Maroc dans ce domaine.

à lire aussi

Cette situation s’explique par plusieurs obstacles structurels. D’abord, le Maroc ne dispose pas d’une vision stratégique claire pour intégrer les transferts des MRE dans le tissu économique national. À cela s’ajoute l’absence de mécanismes de financement adaptés.

Le fonds MDM Invest, destiné à soutenir les projets des MRE, a montré ses limites : en 20 ans, il n’a permis de concrétiser que 48 projets. De plus, les démarches administratives complexes et le manque de digitalisation des services freinent les initiatives des MRE, en particulier pour ceux vivant loin du Maroc. Cette bureaucratie, souvent décriée, oblige les investisseurs à effectuer des déplacements coûteux et chronophages, ce qui réduit leur engagement économique, selon le rapport de l’Observatoire.

Le système bancaire marocain, bien qu’il bénéficie directement des transferts des MRE qui constituent 20% de ses ressources, manque également de produits adaptés à cette population. Les crédits spécifiques aux MRE sont rares, et les démarches pour accéder à des financements sont souvent jugées dissuasives. Cette situation limite la possibilité d’utiliser ces transferts comme levier pour des investissements dans des secteurs porteurs tels que les énergies renouvelables, la technologie ou encore l’agro-industrie.

Pistes d’amélioration

Face à ces défis, plusieurs recommandations ont été formulées pour améliorer l’impact des transferts des MRE sur l’économie nationale. Parmi celles-ci figure la création d’une banque de projets dédiée. Cette structure, en rassemblant les opportunités d’investissement par région et secteur, pourrait offrir aux MRE une visibilité claire sur les options disponibles et leur potentiel de rentabilité.

Par ailleurs, le développement de mécanismes de financement innovants, tels que des fonds à conditions préférentielles ou des garanties de l’État, pourrait encourager les investissements à forte valeur ajoutée. Enfin, la simplification des procédures administratives grâce à la digitalisation apparaît comme une priorité pour surmonter les contraintes actuelles.

Le rapport souligne également l’importance de renforcer les incitations fiscales pour les MRE, en particulier pour les investissements dans les régions moins développées. À cela s’ajoute la nécessité de développer une communication proactive à travers les consulats et de créer des représentations économiques à l’étranger pour accompagner les investisseurs potentiels. Ces mesures pourraient transformer les transferts des MRE en un véritable levier de développement inclusif.