Malgré la pression du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres qui craint un “effondrement total de l’ordre public” dans le territoire palestinien en guerre, un projet de texte réclamant ce cessez-le-feu humanitaire s’est heurté vendredi au Conseil de sécurité à un véto des États-Unis, puissant allié d’Israël.
Le Conseil avait déjà mis plus d’un mois après le début de la guerre entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas pour réussir à parler d’une seule voix, se contentant mi-novembre, après quatre textes rejetés, de demander des “pauses” humanitaires.
De nombreux pays et organisations de défense des droits humains ont déploré l’échec de vendredi, y compris Antonio Guterres qui a décrit un Conseil de sécurité à l’autorité et la crédibilité “compromises”.
Plus de deux mois après l’attaque sanglante et sans précédent perpétrée par le Hamas sur le sol israélien le 7 octobre — qui a fait 1200 morts selon les autorités —, Israël accentue son offensive dans la bande de Gaza, contrôlée par le mouvement palestinien.
L’ONU ne cesse d’alerter sur la situation catastrophique à Gaza, où le système humanitaire est “au point de rupture” et où plus de 18.000 personnes ont été tuées selon le ministère de la Santé du Hamas.
“Nous devons arrêter cette guerre, et nous devons l’arrêter maintenant”, a martelé mardi l’ambassadeur palestinien à l’ONU Riyad Mansour, insistant sur le “droit” des Palestiniens à être “en colère”. “Nous pensons que nous allons réussir à ce que la quasi-totalité de la communauté internationale appelle à un cessez-le-feu humanitaire”, a-t-il ajouté, espérant ainsi envoyer “un message à Washington et à d’autres”.
À la demande des pays arabes qui veulent maintenir la pression après l’échec au Conseil, l’Assemblée générale votera mardi après-midi sur un texte qui reprend en grande partie la résolution bloquée vendredi par les États-Unis.
S’inquiétant de la “situation humanitaire catastrophique dans la bande de Gaza”, il “exige un cessez-le-feu humanitaire immédiat”, réclame la protection des civils, l’accès humanitaire et la libération “immédiate et inconditionnelle” de tous les otages.
Mais comme le texte adopté par l’Assemblée générale fin octobre — qui appelait à une “trêve humanitaire immédiate, durable et soutenue, menant à la cessation des hostilités” —, il ne condamne pas le Hamas. Une absence systématiquement fustigée par Israël et les États-Unis.
Les Américains ont d’ailleurs déposé un amendement qui “condamne les attaques terroristes abominables du Hamas” du 7 octobre. Un amendement à la résolution de fin octobre contenant une condamnation similaire avait été rejeté.
Un autre amendement préparé par l’Autriche veut préciser que les otages sont détenus par “le Hamas et d’autres groupes”.
La résolution de fin octobre avait recueilli 120 voix pour, 14 contre (dont Israël et États-Unis) et 45 abstentions, sur 193 États membres.
“L’objectif est de mettre les Américains de plus en plus mal à l’aise”
Les appels à un cessez-le-feu se multipliant, “on peut anticiper que la majorité sera plus grande” cette fois, a indiqué à l’AFP Richard Gowan, de l’International Crisis Group. Elle se rapprocherait alors peut-être des quelque 140 voix qui ont plusieurs fois dénoncé l’invasion de l’Ukraine, un résultat que les États-Unis avaient vu comme une preuve de l’isolement de la Russie.
Mais même avec un soutien massif, “personne n’imagine que l’Assemblée générale puisse persuader Israël de cesser le feu, comme elle ne peut ordonner à Poutine de quitter l’Ukraine. L’objectif est de mettre les Américains de plus en plus mal à l’aise”, a commenté Richard Gowan.
Même non contraignants, les “messages (de l’Assemblée générale) sont aussi très importants”, a noté Stéphane Dujarric, porte-parole d’Antonio Guterres.
(avec MAP)