La prise en charge pré-hospitalière au Maroc, un terrain à conquérir

En dépit des progrès observés ces dernières décennies en matière de médecine d’urgence, la qualité de la prise en charge pré-hospitalière, un des indicateurs de la performance des filières de soins, demeure en deçà des attentes.

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Tel est le constat dressé lors de la 7e édition du Congrès international de la médecine d’urgence qui a conclu ses travaux le week-end dernier à Rabat sur un appel à se pencher sur les insuffisances ayant trait au système de gouvernance de l’ensemble de la filière.

Dans une déclaration à la MAP en marge de ce rendez-vous annuel, le spécialiste en anesthésie-réanimation et professeur à la Faculté de médecine et de pharmacie de Casablanca, Mohamed Mouhaoui, a insisté sur le besoin de mener une réflexion au niveau national sur la question de la prise en charge pré-hospitalière.

Il a appelé, à cet égard, à la tenue d’un colloque national en vue de mettre en place un état des lieux de la médecine d’urgence pré-hospitalière et d’évaluer les acquis, les besoins et les prévisions en termes de logistique et de recrutement.

Sous cet angle, la formation reste d’une importance capitale afin de pallier au manque des ressources humaines qualifiées, avec un accent particulier sur la formation aux premiers secours et soins de base destinée au grand public, notamment les générations montantes, et ce dès les premières années de l’école, a-t-il recommandé.

Afin de faire face au manque cruel de médecins urgentistes, Mouhaoui, également chef de services des urgences au CHU de Casablanca, propose de mettre à disposition des services d’aide médicale urgente (SAMU) des infirmiers qualifiés et capables d’assurer les premiers secours aux victimes, le temps de les ramener aux urgences pour une prise en charge plus complète.

À ce jour, il n’existe pas de numéro d’appel unique auquel le citoyen peut recourir en cas de survenue d’une urgence médicale. Plusieurs entités peuvent être sollicitées en fonction du lieu et de la nature de l’urgence, ont relevé les congressistes lors des débats.

De fait, les services relevant de la protection civile sont seuls habilités à intervenir pour le ramassage et l’évacuation des blessés et accidentés de la voie publique.

En 2013, le département chargé de la santé et de la protection sociale a mis en place un système de régulation médicale, le Service d’aide médicale urgente (SAMU), joignable sur un numéro national, le 141.

Le SAMU, service hospitalier rattaché à un Centre hospitalier universitaire (CHU) ou à un Centre hospitalier régional, a pour mission de garantir une écoute médicale permanente, d’orienter le patient, de déclencher la réponse la mieux adaptée et d’organiser, le cas échéant, le transport dans une structure de soins.

Toutefois, son opérationnalisation rencontre toujours des difficultés. Il est peu connu, indisponible au niveau de trois régions (Guelmim Oued Noun, Draa Tafilalet, Dakhla Oued Eddahab) et limité aussi bien en capacités humaines, qu’en moyens logistiques, relève le Conseil économique, social et environnemental (CESE) dans son avis intitulé “Améliorer la prise en charge des urgences médicales pour préserver et sauver des vies et contribuer à assurer des soins de qualité pour tous”, adopté le 30 mars 2023.

De plus, la Société marocaine de médecine d’urgence (SMMU), fait état d’une absence d’assistants à la régulation médicale (ARM), dont le rôle est de répondre en premier aux appels et de faire le premier recueil d’informations avant de les transférer aux médecins régulateurs du SAMU.

La SMMU pointe, également, du doigt une absence de protocoles de régulation basés sur les ressources humaines et matériels de chaque région par rapport à chaque spécialité afin de faciliter la gestion des dossiers de régulation dans les meilleures conditions, entre autres contraintes qui entravent la mise en œuvre de ce système de prise en charge.

Dans le même sens, le CESE appelle à renforcer la coopération et la contractualisation entre le SAMU, la protection civile, les CHU et hôpitaux provinciaux, les cliniques privées et les collectivités territoriales en matière d’organisation du ramassage, de transport, de formation, de simulations de catastrophes, d’élaboration et de mise en œuvre de projets d’infrastructures de secours.

Il invite également à doter le SAMU de moyens logistiques, humains et financiers, étendre sa mission et son champ d’intervention pour inclure les secours sur la voie publique, en étroite coordination avec la protection civile, et rendre possible le transfert des patients vers les établissements du secteur privé.

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(avec MAP)