L’UE travaille depuis des années à un projet de règlement sur l’intelligence artificielle (IA) qui serait la première législation d’envergure au monde pour encadrer le secteur. Avec comme objectif de placer le Vieux Continent en tête de la course à l’innovation tout en garantissant la sécurité et les droits des utilisateurs.
La Commission a présenté son projet en avril 2021. Les eurodéputés espèrent adopter leur position sur le texte fin mars, ouvrant la voie à une négociation avec les 27 États membres qui devrait prendre encore des mois. Le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, a expliqué que les trois institutions de l’UE travaillaient déjà ensemble pour “clarifier davantage les règles” sur les technologies de type ChatGPT.
“Nous avons besoin d’un cadre réglementaire solide”
Créé par la société californienne OpenAI, ce générateur de contenus rédactionnels a fait les gros titres des journaux depuis sa révélation en novembre. En quelques secondes, il peut répondre clairement et en plusieurs langues à des questions complexes, écrire des sonnets ou rédiger un article scientifique. Ses créateurs affirment que la dernière version, GPT-4, a même réussi l’examen du barreau.
Cette puissance ne va pas sans danger. Si les enseignants craignent que les élèves l’utilisent pour tricher, les décideurs politiques redoutent surtout qu’il puisse servir à la désinformation. “Comme le montre ChatGPT, les solutions d’IA peuvent offrir de grandes possibilités aux entreprises et aux citoyens, mais elles peuvent aussi présenter des risques. C’est pourquoi nous avons besoin d’un cadre réglementaire solide”, a déclaré Thierry Breton.
ChatGPT est seulement un exemple du potentiel des intelligences artificielles dites à usage général, c’est-à-dire capables d’accomplir une grande variété de tâches, dont font partie les IA génératives qui peuvent créer des contenus originaux comme des images et du texte, à partir de grandes quantités de données existantes.
“Nous proposerons un ensemble de règles pour régir l’IA à usage général”, a indiqué à l’AFP le député européen Dragos Tudorache, l’un des co-rapporteurs du texte. Avec l’autre co-rapporteur Brando Benifei, il a présenté la semaine dernière un document proposant des obligations pour les intelligences artificielles à usage général, qui ne figuraient pas dans la proposition initiale de la Commission.
Des experts avaient mis en garde contre les risques liés aux systèmes du type ChatGPT, et informé les fonctionnaires de l’UE dès le début du projet de réglementation. “Notre recommandation à l’époque était que nous devions également réglementer les systèmes d’IA qui ont un large éventail d’utilisations”, a déclaré Kris Shrishak, responsable des technologies au Conseil irlandais pour les libertés civiles. Il a souligné qu’il était tout aussi important d’identifier les risques liés aux systèmes d’IA générative après leur déploiement.
Pour Kris Shrishak, l’efficacité du nouveau règlement dépendra du texte final, mais le projet “représente une bonne base et contient des mécanismes pour identifier les nouveaux risques”.
Le problème le plus crucial sera cependant la capacité à faire appliquer la loi, a-t-il averti, ajoutant que le Parlement européen s’efforçait de renforcer cet aspect. “Le règlement n’est qu’un morceau de papier s’il n’est pas appliqué”, a-t-il déclaré à l’AFP.
La semaine dernière, le PDG d’OpenAI, Sam Altman, a proposé que les “principaux gouvernements du monde” et les “institutions internationales de confiance” se réunissent pour produire un ensemble de règles précisant ce que le système aurait le droit ou pas de faire.
Quant à la manière dont Bruxelles devrait réglementer l’IA, le générateur de contenu estime que “l’UE pourrait adopter une approche de réglementation progressive, en s’appuyant sur des principes de gouvernance éthiques, des normes de certification et d’évaluation, une surveillance appropriée et une collaboration internationale”.
(avec AFP)