Loi de finances, code pénal, Moudawana, hydrocarbures : Damir tire à boulets rouges sur le gouvernement

Au terme d'une réunion de son bureau exécutif, le Mouvement Damir a passé au  crible les sujets et thèmes qui ont marqué l'année 2022 au Maroc. Loi de Finances 2023, réforme des Codes Pénal et de la Famille, Hydrocarbures, bonne gouvernance et même officialisation de l'Amazigh, le bilan du Mouvement critique vertement l'Exécutif. Les détails.

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Pour tirer la sonnette d’alarme, le Mouvement Damir pose sur la table 7 dossiers qui ont fait l’actualité de l’année 2022. De la loi de Finances à l’effectivité de l’officialisation de la langue amazighe en passant par le « scandale » des hydrocarbures et de la Samir, la nomination des membres des instances constitutionnelles et les révisions des codes pénal et de la Famille, tout est passé au crible.

Moudawana, réforme approfondie et radicale

Le mouvement militant plaide pour « une réforme approfondie et radicale » de la Moudawana afin d’en combler les « lacunes ». En creux, il souhaite l’interdiction de la polygamie, du mariage des mineurs, l’inégalité dans l’héritage mais aussi dans le partage des biens acquis par le couple. Le texte milite aussi pour la tutelle exercée par les femmes sur les enfants.

« Cet aggiornamento est de nature à assurer sa mise en conformité avec les dispositions de l’article 19 de la Constitution marocaine et avec le référentiel international des droits de l’Homme, que la Constitution considère comme étant supérieur à la législation nationale, les deux étant indivisibles« , écrit le communiqué

Code pénalisant?

Sans ambiguïté, « le Mouvement Damir appelle à l’abrogation de tous les articles du Code pénal qui criminalisent les libertés individuelles, notamment les articles 220, 222, 489 et 490« . Cela devrait permettre, selon le mouvement, un meilleur respect des choix de vie privée mais aussi les libertés individuelles notamment  de conscience, l’orientation sexuelle ou les relations sexuelles hors-mariage, l’avortement, les persécutions politiques, la rupture du jeûne pendant le Ramadan.

« Nombre de paragraphes de cette loi remontent au début de l’indépendance du Maroc, ce qui les met aujourd’hui en situation de déphasage avec les systèmes de relations et de valeurs prévalant dans la société marocaine. À cet égard, le Mouvement Damir dénonce la persistance des restrictions exercées par les autorités sur les libertés individuelles« , peut-on lire.

Loi de Finances 2023 conduite hors du NMD

« Le Mouvement Damir exprime sa consternation face à la hausse persistante des prix des produits essentiels, notamment les produits alimentaires et énergétiques, qui a généré un climat de ressentiment et de mécontentement général, et appelle le gouvernement à prendre en considération la situation des groupes sociaux vulnérables, dont la classe moyenne fait désormais partie suite aux politiques publiques adoptées qui ont conduit inexorablement à son appauvrissement« , écrit le bureau exécutif.

Pour Damir, la loi de Finances 2023 ne met pas en œuvre « les réformes de structure portées par le Nouveau modèle de développement et tant attendues par les Marocains« . Cette loi de Finances consacre « les choix injustes et déloyaux du programme gouvernemental« ,  réfractaire à « déconstruire l’économie de la rente, à lutter contre les conflits d’intérêts, la corruption et la fraude fiscale et à lancer sans plus tarder les grandes réformes ». Ces réformes, cite encore Damir, sont une série de réformes notamment  fiscale, des entreprises publiques, du secteur bancaire, du statut de Bank al Maghrib, de la politique monétaire, des médias audiovisuels publics, de la politique culturelle.

Une loi de Finances  qui manque d' »‘équité fiscale et amplifie les privilèges fiscaux accordés aux grandes entreprises et aux classes aisées, au détriment des classes moyennes et vulnérables, des petites professions, des auto-entrepreneurs et des petites et moyennes entreprises qui voient leur pression fiscale s’aggraver lourdement et leur pérennité mise en danger ». 

Gouvernement passif sur les hydrocarbures et sur la Samir

« L’Exécutif s’abstient de rechercher les responsabilités directes et indirectes à l’origine de la faillite de ce joyau de l’industrie nationale, dont certaines se situent au sein même de l’appareil d’État, comme il refuse de collaborer avec le système judiciaire afin de faciliter la reprise de l’activité de cette raffinerie par un pool d’investisseurs industriels et institutionnels.« , écrit Damir.

Le mouvement interprète également la situation de la raffinerie comme une tentative de « de dépecer le patrimoine de la Samir, à travers notamment la location de gré à gré de ses bacs de stockage à des opérateurs privés sans appel d’offres« . Il déplore également que ces locations qui devaient être provisoires, sont « non respectueuses de la transparence et de la mise en compétition via des procédures publiques d’appels d’offres« .

Et de dénoncer la « procrastination dont fait preuve le Conseil de la concurrence dans le traitement du dossier contentieux des soupçons d’ententes illicites sur les prix pesant sur certains opérateurs des hydrocarbures« . Damir relève également de « nombreuses anomalies des deux textes législatifs récemment adoptés et formant le nouveau droit marocain de la concurrence ». Et de proposer « un changement des membres du Conseil de la concurrence avant que cette instance constitutionnelle ne statue définitivement sur le dossier contentieux précité« .

Instances constitutionnelles, mauvais casting?

« Le Mouvement Damir se félicite de la récente nomination des membres de certaines instances constitutionnelles de bonne gouvernance, s’agissant d’une étape indispensable à l’effectivité de ces instances et à la mise en œuvre pleine et entière des dispositions de la Constitution de 2011. Néanmoins, le Mouvement Damir regrette l’absence de transparence dans les critères de choix des candidats à ces fonctions et note avec stupéfaction la désignation de certaines personnes dont les zones d’ombre dans leur parcours personnel, professionnel et, pour certains, politique, les disqualifient pour pouvoir siéger au sein de ces instances constitutionnelles« .

Amazigh, langue officielle à moitié?

Tout en se félicitant de l’officialisation de la langue amazighe, le Mouvement Damir relève « à regret une certaine procrastination, des atermoiements et une perte de temps depuis l’année 2011 de la part des gouvernements successifs quant à la mise en œuvre effective du caractère officiel de la langue amazighe dans tous les secteurs de l’État »

Son bureau exécutif « attire l’attention des responsables sur le fait que la promulgation depuis le 1eroctobre 2019 de la loi organique relative à cette mise en œuvre, dans un contexte de persistance des régressions dans l’enseignement de l’Amazighe et son intégration dans les médias publics, le système judiciaire et l’administration, est incompatible avec les engagements de l’État et va à l’encontre de l’annonce du gouvernement d’allouer un budget pour l’Amazighe, dont les effets tardent encore à se manifester au niveau des principaux chantiers de mise en œuvre« , souligne encore le Mouvement Damir