Un juge de San Isidro (nord de Buenos Aires) a suivi mercredi 22 juin les réquisitions en avril du parquet, et renvoyé en procès ces praticiens, parmi lesquels un neurochirurgien et un médecin traitant, un médecin clinicien, une psychiatre, une psychologue, un responsable infirmier, des infirmiers.
Maradona est décédé d’une crise cardio-respiratoire le 25 novembre 2020 à l’âge de 60 ans, seul, sur un lit médicalisé d’une résidence de Tigre, au nord de Buenos Aires, où il était en convalescence après une neurochirurgie pour un hématome à la tête. L’ancienne star du football souffrait de pathologies multiples : problèmes rénaux, au foie, insuffisance cardiaque, détérioration neurologique et dépendance à l’alcool et aux psychotropes.
La mort de Maradona, considéré comme l’un des plus grand génies du football, idole en Argentine avec laquelle il avait remporté le Mondial-1986, avait créé une onde de choc planétaire et bouleversé l’Argentine. Des dizaines de milliers de personnes avaient participé à la veillée funèbre de sa dépouille autour du palais présidentiel.
Les huit suspects sont renvoyés devant un tribunal pour “homicide simple avec dol éventuel”, une infraction qui est caractérisée lorsqu’une personne commet une négligence tout en sachant que celle-ci peut entraîner la mort de quelqu’un.
Devront ainsi comparaître le neurochirurgien Leopoldo Luque, la psychiatre Agustina Cosachov, le psychologue Carlos Diaz, la coordinatrice médicale Nancy Forlini, le coordinateur infirmier Mariano Perroni, les infirmiers Ricardo Almiron et Dahiana Madrid, le médecin clinicien Pedro Pablo Di Spagna.
Une hospitalisation “totalement déficiente et imprudente”
Dans ses attendus, le juge Orlando Diaz a estimé que “chacun des accusés, par la place qu’il occupait spécifiquement dans la configuration globale (…) aurait exercé la co-maîtrise des faits”, déterminant l’événement final “en fonction des apports de chacun d’eux”.
Un rapport d’expert avait conclu que l’ancien joueur avait été “abandonné à son sort” par son équipe soignante, le menant à une “période d’agonie prolongée”
Le magistrat a relevé “l’absence d’interposition, de toute action salvatrice qui aurait pu empêcher la mort”. Ils encourent des peines allant de 8 à 25 ans de prison, mais devraient comparaître libres au procès, le parquet de San Isidro n’ayant jamais requis leur détention provisoire. Aucune date n’a été avancée à ce stade pour la tenue du procès.
Selon les procureurs, le personnel en charge de Maradona avait été “protagoniste d’une hospitalisation à domicile sans précédent, totalement déficiente et imprudente”, et aurait commis une “série d’improvisations, de fautes de gestion et de manquements”.
Un rapport d’expert accablant, produit en mai 2021 par une commission médicale dans le cadre de l’enquête, avait conclu que l’ancien joueur avait été “abandonné à son sort” par son équipe soignante, le menant à une “période d’agonie prolongée”.
L’équipe des médecins se dit “fière” de ce qu’elle a fait
Les suspects avaient tous lors de leurs auditions, défendu leurs actions, dans le cadre de leur domaine de compétence, au chevet du champion. En renvoyant la balle dans le camp des autres professionnels.
Ainsi Leopoldo Luque, médecin traitant et confident de Maradona, s’était dit “fier de ce qu’(il) a fait”, assurant à tout moment avoir “essayé d’aider” Maradona. Il était “médecin de famille, pas en charge de l’hospitalisation à domicile”, avait souligné son avocat.
Le psychologue Diaz avait estimé que son travail de spécialiste des addictions n’avait eu “aucune sorte d’interférence” avec le décès, celui-ci n’ayant eu “rien à voir avec une question clinique ou psychiatrique”.
Et l’infirmière Dahiana Madrid, qui avait découvert Maradona sans vie, avait assuré n’avoir fait que “se conformer aux indications des médecins”. Il y avait “beaucoup de signaux d’alerte selon lesquels Maradona allait mourir du jour au lendemain. Et aucun des médecins n’a rien fait pour l’éviter”, avait plaidé son avocat.
Le parquet avait ouvert une enquête, cherchant une éventuelle négligence ou imprudence, à la suite de déclarations de deux filles de Diego Maradona, pointant notamment du doigt le Dr Luque.
D’autres procédures restent pendantes dans le sillage posthume du légendaire footballeur : une procédure au civil, sur le partage de l’héritage de Maradona, aux cinq enfants reconnus. Et une procédure entre ses deux filles aînées et son avocat pour l’utilisation commerciale de la marque ou du nom.