Si le Maroc a vu son PIB augmenter de près de 8 % en 2021 grâce à des facteurs tels que la reprise d’activité post-Covid ou à un climat favorable aux récoltes agricoles, la situation économique du pays a souffert cette année, tant à cause d’un contexte géopolitique international défavorable, que d’une vague de sécheresse sans précédent.
2022 a été l’année la plus sèche depuis 30 ans, ce qui a inexorablement entraîné une baisse de la valeur ajoutée du secteur primaire. Néanmoins, la reprise des activités touristiques a tout de même amorti cette perte, le tourisme étant un secteur particulièrement favorable à la création d’emplois (et qui équivaut à 7 % du PIB marocain).
Pour pallier l’impact des aléas climatiques, le gouvernement a mis en place des aides d’urgence afin de soutenir les producteurs. Matérialisées sous la forme de subventions et de réduction des charges, ces aides se sont avérées de première nécessité. En effet, la sécheresse a entraîné des répercussions considérables non seulement sur les récoltes, mais également sur la production d’autres produits à plus forte valeur ajoutée, dans la mesure où les ressources insuffisantes en eau ont été mobilisées pour le secteur agricole et ont donc manqué dans d’autres secteurs. Des mesures structurelles ont également été déployées, telles que le dessalement de l’eau ou la récupération des eaux usées.
Si la hausse des importations de marchandises alimentaires et énergétiques a creusé le compte courant du Maroc, les exportations d’engrais et d’automobiles ont quant à elles augmenté, couplées d’une hausse des IDE (+ 31 %) et des recettes des Marocains résidents à l’étranger (MRE).
Les plus vulnérables en première ligne
Concernant le pouvoir d’achat des ménages, afin de limiter les conséquences de l’inflation sur la population induite en partie par les répercussions de la guerre en Ukraine, le gouvernement a renforcé les dépenses publiques en maintenant les prix réglementés sur l’énergie et le blé et en octroyant des aides aux entreprises.
La catégorie la plus riche de la population est celle dont le panier de consommation comprend la part la plus élevée de produits subventionnés
Toutefois, l’allocation des dépenses de l’État fait l’objet de critiques de la part de l’institution de Bretton Woods. En effet, il apparaît que la catégorie la plus riche de la population est celle dont le panier de consommation comprend la part la plus élevée de produits subventionnés. L’alimentation représente par ailleurs plus de 50 % des dépenses des moins aisés.
Avec une diminution drastique du bien-être estimé des ménages, dont plus de 50 % considèrent que leur situation financière s’est dégradée en 2022, l’heure est à la réforme sociale. Les promesses du gouvernement de réformer le système de santé et de protection sociale ne doivent pas être que des paroles en l’air, car il est nécessaire de faire primer l’équité sur l’égalité en matière de dépenses publiques, souligne la Banque mondiale.
La pauvreté a augmenté de 4 % au Maroc, et ce de manière éparse. Cela s’explique par une moindre possibilité d’adaptation à l’inflation pour les ménages les plus vulnérables qui disposent de moins d’épargne, et par une catégorie de population qui fait face directement aux externalités de l’inflation ; en témoigne le contraste du potentiel de création d’emplois entre milieu rural et urbain.
À quoi doit-on s’attendre en 2023 ?
Si les conditions climatiques redeviennent favorables aux récoltes, le secteur primaire devrait rebondir et compenserait ainsi les externalités négatives de la guerre, si celle-ci se prolonge durant 2023. En effet, si les tensions géopolitiques se maintiennent, la demande intérieure devra compenser la fragilisation économique de la zone euro, principale partenaire commerciale du Maroc.
Toutefois, les récoltes pour 2023 partent avec certaines difficultés. En effet, la forte augmentation du prix des engrais avait amené à réduire leur utilisation, ce qui pourrait potentiellement fragiliser les rendements pour l’année à venir. Également, rappelons que les cultures irriguées ont subi de plein fouet le manque d’eau en 2022 ; à voir donc l’ampleur de cet impact sur un potentiel affaiblissement des récoltes en 2023.
Afin de pallier le déficit du compte courant et de pouvoir concrétiser les réformes sociales annoncées, qui devraient exercer une forte pression sur les dépenses publiques, le gouvernement a prévu d’augmenter les recettes de l’État par une hausse de la TVA et de l’impôt sur les sociétés (IS). Il mise également sur de fortes recettes touristiques ainsi que sur les investissements directs étrangers. Si l’on ne peut qu’espérer que ces promesses d’ordre social soient tenues, elles restent pour le moins incertaines à ce jour…