On disait la 9e circonscription des Français de l’étranger favorable à la gauche. Après 2012, c’est une nouvelle fois le cas depuis ce dimanche 19 juin après l’élection de Karim Ben Cheikh au second tour des élections législatives françaises, dans la circonscription du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest.
Le candidat investi par la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) s’est imposé à 54,07 % des voix face à Elisabeth Moreno, candidate soutien du président de la République, Emmanuel Macron. Il défait ainsi la majorité présidentielle sur un territoire qu’elle avait conquis en 2017, par M’jid El Guerrab. Karim Ben Cheikh siègera avec le groupe écologiste – partie prenante de la Nupes – à l’Assemblée Nationale.
En tête dans 15 des 16 pays de la circonscription
Dans une première réaction, le nouveau député s’est félicité de sa victoire qu’il dédie aux Français.e.s du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest : « Vous avez exprimé un choix clair pour la justice sociale et la défense de nos services publics. Dès demain, je serai votre voix à l’Assemblée Nationale » s’est exprimé Karim Ben Cheikh sur Twitter.
Cette victoire est la vôtre, vous les Français.e.s du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest. Vous avez exprimé un choix clair pour la justice sociale et la défense de nos services publics. Dès demain, je serai votre voix à l’@AssembleeNat. Merci #9eCircoFDE 🇫🇷 pic.twitter.com/URioBGtSzJ
— Karim Ben Cheikh (@K_BenCheikh) June 19, 2022
Dans le détail, l’ancien diplomate, passé notamment par l’ambassade de France au Maroc, s’est imposé plus ou moins solidement dans 15 des 16 pays de la circonscription. Il l’emporte avec jusque 67,7% des suffrages au Mali alors qu’il s’en sort également dans le royaume (52,8%) en gagnant la ville de Casablanca, réputée pourtant peu encline à voter à gauche. Agadir et Marrakech sont cependant restés à l’avantage d’Elisabeth Moreno, comme la Côte d’Ivoire.
Abstention et fronts
Marqué par une abstention encore très élevée, 82% des inscrits ne s’étant pas exprimés, ce second tour aura donné lieu à un duel de fronts communs. D’un côté l’union de la gauche donc, conclu dans cette 9e circonscription plus tôt qu’au niveau national. De l’autre, une tentative de front voulu par Elisabeth Moreno après sa mise en ballotage face à Karim Ben Cheikh au premier tour.
L’ex-ministre, investie par Emmanuel Macron lui-même afin de conserver cette circonscription pour le parti présidentiel, avait espéré pouvoir fédérer contre le candidat de l’union de la gauche.
Il faut dire que sa position était loin d’être la meilleure, largement devancée par Ben Cheikh dès le 1er tour : respectivement 28,1% contre 40%. Ainsi avait-elle réussi à récolter les soutiens formels des importants candidats défaits au 1er tour : Naïma M’Faddel (Les Républicains), Mehdi Reddad (ancien dissident à Moreno), ou Mohammed Oulkhouir (indépendant) pour maximiser son report de voix.
Force est de constater qu’il lui a manqué une dynamique de plus long terme, symptomatique d’un lancement de campagne plus que tardif dans la circonscription. Dans la soirée de dimanche, Elisabeth Moreno a pris acte des résultats et adresse ses félicitations à Karim Ben Cheikh. La Franco-Capverdienne a ajouté également qu’elle « garderai[t] de nombreux liens personnels et professionnels » et qu’elle « continuerai[t] à [s]’engager pour la France et le continent africain et celles et ceux qui y vivent. »
Je continuerai à m’engager pour la France et le continent africain et celles et ceux qui y vivent.
Fidèlement,
Elisabeth Moreno
— Élisabeth Moreno (@1ElisaMoreno) June 19, 2022
Une majorité relative pour les députés macronistes
Au niveau de la France métropolitaine, les résultats quasi-définitifs de ces législatives donnent une simple majorité relative à la coalition soutenant la politique du président Macron, et de la Première ministre, Elisabeth Borne. Avec un total de 245 sièges (sur 577), Ensemble ! devra donc s’accorder avec d’autres partis afin d’atteindre la majorité absolue, fixée à 289 députés, synonyme de gouvernance solide. Chose inédite depuis l’organisation des législatives directement après l’élection présidentielle.
Deux gros blocs d’opposition émergent : l’union de la gauche, Nupes, est arrivée à truster 133 sièges, faisant d’elle une force politique d’ampleur si tant est qu’elle reste unie. Plus surprenant, le score du Rassemblement National (RN), parti de Marine Le Pen, qui réalise une percée inédite avec 89 députés à l’Assemblée Nationale. Si ce résultat reflète la dynamique de l’élection présidentielle (Le Pen avait échoué au deuxième tour), les déclarations des soutiens de Macron n’avaient pas été unanimes pour faire barrage à l’extrême-droite lorsqu’un candidat Nupes l’affrontait.
Il ne faut également pas sous-estimer le groupe des Républicains (64 sièges), historique parti de droite en recul mais qui pourrait s’avérer décisif pour donner une majorité absolue au gouvernement macroniste.
Un député d’opposition face aux enjeux diplomatiques
En attendant une recomposition du gouvernement selon divers paramètres, ces élections pourraient marquer un tournant dans la capacité de leadership d’Emmanuel Macron, notamment au niveau international. Dans cette 9e circonscription des Français de l’étranger qui réunit des enjeux diplomatiques majeurs pour la France avec l’Afrique, il sera intéressant d’observer quel rôle peut jouer un député d’opposition sur place, dans les affaires étrangères françaises. Affaire à suivre.