Pour ses “deux coups de casque” de scooter “d’une extrême violence, coup sur coup et en armant son bras”, la procureure a réclamé trois ans de prison dont un ferme, “aménagé” — par exemple : avec un bracelet électronique —, et trois ans d’inéligibilité. Le tribunal correctionnel rendra sa décision le 12 mai.
Poursuivi pour avoir “volontairement commis des violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours” avec “une arme par destination”, M’jid El Guerrab encourt jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende.
“Je suis sorti de mes gonds”
“Je suis sorti de mes gonds, j’ai perdu toute forme de raison, on parle de quelque chose qui est encore incompréhensible pour moi aujourd’hui, je ne sais pas l’expliquer”, a déclaré à plusieurs reprises le député aujourd’hui âgé de 38 ans, tout en réitérant avoir réagi à un geste agressif de Boris Faure.
“J’estime avoir été victime d’une deuxième agression, avoir été diffamé. Mettre sur le même plan l’agresseur et l’agressé, je trouve ça insupportable”, a répliqué ce dernier, partie civile au procès.
Ce 30 août 2017, celui qui est alors premier secrétaire PS de la Fédération des Français de l’étranger, croise dans la rue le nouveau député La République en marche (LREM) des Français de l’étranger, à proximité du domicile de ce dernier dans le Ve arrondissement de Paris.
“Je traverse pour le féliciter”, explique Boris Faure, assurant que la rencontre était fortuite. Mais M’jid El Guerrab dit voir une forme de “harcèlement dans sa présence en bas de chez (lui)”, alors qu’un contentieux les oppose depuis son départ du PS pour le mouvement d’Emmanuel Macron, fin 2016, avec, selon lui, des “menaces de mort” de la part de Boris Faure. Mensonges selon ce dernier, qui évoque seulement un “combat politique”.
Tour à tour, les deux parties ont maintenu leurs versions divergentes sur “l’altercation”. Selon M’jid El Guerrab, qui avait dans un premier temps évoqué des insultes racistes, il s’énerve quand Boris Faure insinue qu’il doit son élection sur la circonscription des Français du Maghreb et d’Afrique de l’ouest à ses relations avec le pouvoir marocain et le taxe de “communautariste”.
Alors que le ton monte, “j’ai eu un geste d’apaisement. (…) je pose ma main sur son avant-bras”, raconte Boris Faure, costume bleu, masque en tissu blanc, dont la cicatrice est nettement visible sur le crâne. “Il m’a attrapé la main, a serré comme ça, m’a fait mal”, mime au contraire M’jid El Guerrab, en jean et veste grise, expliquant avoir voulu se “dégager de cette emprise”.
“Ce n’est pas un pur réflexe : vous changez votre casque de main avant de reculer et de porter un coup”, lui fait remarquer la présidente. “Il n’est plus face à vous au moment du deuxième coup”, ajoute-t-elle.
Traumatisme crânien et hémorragie cérébrale
Les images filmées par deux caméras de vidéosurveillance, diffusées à la demande de la défense, sont peu éclairantes : la scène y est masquée par un panneau de signalisation et par la porte vitrée d’un café. On voit néanmoins que M’jid El Guerrab “voulait retourner au contact et a dû être empêché par les témoins sur place”, observe la procureure.
Atteint d’un traumatisme crânien et d’une hémorragie cérébrale, Boris Faure avait été opéré en urgence et avait passé trois jours en réanimation, avant d’être hospitalisé à nouveau quelques jours plus tard. Son pronostic vital avait été un temps engagé.
Celui qui est aujourd’hui représentant du personnel du syndicat UNSA à l’AEFE explique souffrir aujourd’hui de maux de tête et de pertes de mémoire. “Ma vie politique — la mienne — s’est arrêtée après mon agression”, souligne le “simple militant” de 48 ans, se disant “dégoûté de la politique”. M’jid El Guerrab envisage lui de se représenter, si le jugement ne l’en empêche pas. “Je n’ai pas encore pris de décision”, précise le député.
Face au tollé provoqué par l’affaire, il avait démissionné du parti présidentiel en septembre 2017, tout en gardant son mandat parlementaire, ce qu’il explique aujourd’hui par la volonté “d’essayer de (se) rattraper, de faire (son) maximum pour (ses) compatriotes”.