Dans une note à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, le Conseil souligne que l’égalité entre les femmes et les hommes et la pleine participation des femmes à l’ensemble des aspects de la vie active “ne peut se faire sans un cadre juridique en harmonie avec les ambitions du pays, qui permet aux femmes de jouir pleinement de leurs droits, sans discrimination”.
Le CESE considère ainsi qu’il “est temps d’opérer une révision du Code de la famille, en conformité avec la Constitution et en accord avec les Conventions internationales ratifiées par le Maroc, et en ligne avec les ambitions d’émancipation des femmes et d’égalité des sexes inscrites dans le Nouveau modèle de développement”.
Après la ratification de conventions internationales
Près de 20 ans après la disposition d’un nouveau Code de la famille en 2004, le Maroc a ratifié de nombreuses conventions internationales portant sur les droits des femmes, dont la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), se dotant ainsi d’une nouvelle Constitution qui institue le principe d’égalité entre les femmes et les hommes et appelle à la mise en conformité des lois en vigueur avec les engagements internationaux du pays, souligne la même source.
“Il est temps de faire évoluer le Code de la famille pour le faire correspondre aux juridictions nationales et internationales”
Face à ces changements, et au vu des transformations profondes de la société lors des dernières décennies, vers plus d’exigence d’égalité, d’équité et de justice sociale, le CESE considère “qu’il est temps de faire évoluer le Code de la famille pour le faire correspondre aux juridictions nationales et internationales”.
Garde des enfants, mariage précoce, héritage…
D’après le CESE, des discriminations existent toujours à plusieurs niveaux, citant notamment la tutelle sur les enfants. “Les femmes ne peuvent être tutrices de leurs enfants. Dans les faits, la mère a la garde exclusive des enfants par défaut, sauf cas particuliers, et le père est considéré comme l’unique tuteur légal des enfants. Cette situation va à l’encontre des principes de partage entre les conjoints des responsabilités familiales, et notamment celle des enfants. Elle porte également préjudice aux droits et aux obligations des parents divorcés vis-à-vis de leurs enfants lorsque les conflits entre époux séparés se poursuivent. En plus, le droit de se remarier est sanctionné pour les femmes par la perte de la garde des enfants, sauf dans des cas exceptionnels”, indique le CESE.
Il s’agit également du mariage précoce, une pratique qui continue à faire l’apanage du pouvoir discrétionnaire des juges, relève le CESE, ajoutant qu’elle doit être abolie en vertu de l’intérêt supérieur de l’enfant garanti par la Constitution et les conventions internationales ratifiées par le Maroc notamment la CIDE et la CEDAW.
Il est aussi question des biens acquis durant la vie conjugale, dont le partage entre époux, en cas de divorce ou de décès du conjoint, constitue également un point à faire évoluer dans la juridiction. “En effet, le travail domestique des femmes pendant la durée du mariage n’est pas reconnu et conduit à leur privation de leur part des biens acquis par le ménage durant la vie de couple lorsqu’elles ne sont pas en mesure de prouver leur contribution directe à fructifier les biens familiaux”, explique la note.
Le CESE a également mis l’accent sur les délais des procédures de divorce pour cause de discorde “Chiqaq” qui sont souvent longs et dépassent les 6 mois. “Lors de cette période, les conditions de vie du ménage deviennent compliquées et les tensions autour de la procédure peuvent conduire à des violences conjugales et familiales”, souligne le Conseil.
Pour un débat “ouvert, pluriel et responsable”
Ces discriminations participent au renforcement du sentiment d’insécurité juridique et judiciaire, économique et sociale des femmes, estime le conseil, notant qu’elles conduisent à des restrictions de leurs libertés et de leurs droits et les renvoient à une dépendance d’autrui.
“Dans ces conditions, il devient difficile de lutter contre la persistance des violences à l’égard des femmes lorsque celles-ci risquent de se retrouver dans une situation de précarité financière suite au divorce, en raison d’un système de partage des biens non équitable”, relève le CESE.
“Ce débat devrait porter également sans tabou sur les questions relatives aux droits individuels, à la santé et au bien-être des femmes”
Conscient de la primordialité de disposer d’un arsenal juridique qui sécurise les citoyens, et notamment les femmes, et les protège contre toute forme de discrimination ou de violence, le conseil appelle ainsi à opérer une révision du Code de la famille en lançant sans tarder le “débat public ouvert, pluriel et responsable”.
Le conseil appelle également à la réflexion collective, éclairée par le concours de l’expertise des instances compétentes en la matière sur l’ensemble de questions liées au mariage, au divorce, à la succession, à la filiation, au droit de garde des enfants et à la reconnaissance du travail domestique des femmes.
“Ce débat devrait porter également sans tabou sur les questions relatives aux droits individuels, à la santé et au bien-être des femmes”, a conclu la note.
(avec MAP)