Afghanistan : les talibans appellent les pays musulmans à reconnaître leur gouvernement

Les talibans ont appelé mercredi les pays musulmans à devenir les premiers à reconnaître officiellement leur gouvernement, dans l’espoir de permettre un retour de l’aide internationale indispensable pour endiguer la crise humanitaire qui frappe l’Afghanistan.

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Des combattants talibans lors d'un rassemblement à Kaboul le 31 août 2021. Crédit: Hoshang Hashimi / AFP

Jappelle les pays musulmans à se montrer précurseurs et à nous reconnaître officiellement. Jespère que nous serons ensuite capables de nous développer rapidement”, a déclaré Mohammad Hassan Akhund lors d’une conférence de presse.

Face aux craintes qu’un éventuel retour de l’aide internationale, qui finançait près de 80 % du budget afghan, ne profite aux talibans, le Premier ministre a tenu à distinguer son gouvernement du peuple afghan.

Nous (le gouvernement) ne voulons de laide de personne. Nous nen voulons pas pour les responsables. Nous en avons besoin pour notre population, a-t-il expliqué, en estimant que les talibans avaient rempli les conditions pour être reconnus, en ramenant la paix et la sécurité.

Pour l’instant, aucun pays n’a reconnu le gouvernement taliban. La communauté internationale attend de voir comment ces fondamentalistes islamistes comptent gouverner l’Afghanistan, après avoir largement piétiné les droits de l’homme lors de leur premier passage au pouvoir entre 1996 et 2001.

Si les talibans assurent s’être modernisés, les femmes restent largement exclues des emplois publics et les écoles secondaires pour filles restent pour la plupart fermées.

La situation humanitaire en Afghanistan a pris un tour dramatique depuis août et le retour au pouvoir des talibans, confrontés à des caisses quasiment vides après leur conquête éclair du pays. L’aide internationale s’est soudainement arrêtée, et les États-Unis ont également gelé 9,5 milliards de dollars d’avoirs de la Banque centrale afghane. De nombreux fonctionnaires n’ont reçu aucun salaire depuis des mois et le chômage a explosé.

Plus d’un demi-million d’Afghans ont perdu leur emploi lors du troisième trimestre 2021, selon une estimation de l’Organisation internationale du travail (OIT) publiée mercredi. Les femmes sont particulièrement touchées : leur taux d’emploi a chuté de 16 % sur cette période.

La famine menace aujourd’hui 23 millions d’Afghans, soit 55 % de la population, selon l’ONU, qui a besoin de 4,4 milliards de dollars des pays donateurs cette année afin de faire face à la crise humanitaire dans le pays.

L’appel à l’aide des Nations Unies a pour l’instant été peu suivi. Les diplomaties de monde entier cherchent encore des moyens pour acheminer l’aide vers l’économie afghane sinistrée sans soutenir le gouvernement, qui comprend de nombreux membres visés par des sanctions internationales.

Le respect des droits des femmes et un exécutif qui reflète la diversité de l’Afghanistan font partie des conditions exigées par les donateurs pour la reprise de l’aide internationale.

Mercredi, le vice-Premier ministre, Abdul Salam Hanafi, a toutefois précisé que le gouvernement taliban, exclusivement masculin et composé presque uniquement de membres de l’ethnie pachtoune, ne sacrifierait pas lindépendance économique du pays en se pliant aux conditions des donateurs.

Les affaires vont mal, nous navons pas beaucoup de clients

Sur un marché de Kaboul, Mohammad Moktar Naseri espère que la position de la communauté internationale va évoluer. Cet ancien policier de 24 ans a perdu son emploi depuis l’arrivée au pouvoir des talibans et est désormais forcé de vendre des légumes. Notre situation dépend toujours des Américains, estime-t-il. Cela sarrangera uniquement sils décident darrêter les sanctions.

En décembre, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté une résolution qui facilite pendant un an l’aide humanitaire à l’Afghanistan, une décision présentée comme un bon pas par les talibans.

Le mois dernier, les pays de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) ont refusé de reconnaître le gouvernement taliban et ont pressé le nouvel exécutif à se conformer aux obligations internationales concernant les droits des femmes.

L’organisation a toutefois promis de travailler avec l’ONU pour débloquer des centaines de millions de dollars d’avoirs afghans et mettre en place un fonds de donations pour pallier la crise humanitaire.

Le Pakistan, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis étaient les trois seuls pays à avoir reconnu le précédent régime taliban.