13 rue Fnideq. Je n’oublierai jamais cette adresse. Et la galère du taxi à dénicher cette villa à Anfa – Casablanca (la toute première adresse de TelQuel, ndlr). C’était en 2006. J’étais alors étudiant en journalisme, grand lecteur notamment de TelQuel et du défunt Le Journal. Deux titres porte-étendards d’une nouvelle ère, qui était aussi celle d’un journalisme critique, irrévérencieux et briseur de tabous, notamment sociétaux, pour le cas de TelQuel. The place to be, en somme.
Je débarquais à la rédac’ un peu comme un groupie dans une loge de rockstars. Et pour cause ! C’était la flamboyante époque des joutes par éditos interposés entre TelQuel, Attajdid ou encore Al Massae ; de l’ambiance Mad Men en conf’ de rédaction, du soutien à la jeune scène artistique marocaine que TelQuel rêvait en Movida et des couv’ sur le sexe que des kiosquiers pudibonds cachaient sous une pile d’autres magazines.
De cette époque, je garde le souvenir de quelques articles écrits sous la supervision du très méticuleux Driss Ksikes, je me souviens aussi de l’exigence et de l’intelligence d’Ahmed Benchemsi, des portraits-enquêtes de Driss Bennani et de ses analyses sur le Sahara, des reportages couillus de Chadwane Bensalmia, des fines analyses économiques de Khalid Tritki, des billets d’humeur de Hassan Hamdani que je lui rappelle toujours dans les couloirs aujourd’hui…
2015. Ayant pris un peu plus de bouteille après des expériences chez plusieurs médias, je rejoins cette fois la rédaction digitale en tant que rédacteur en chef. TelQuel, qui avait donné ses lettres de noblesse au newsmagazine marocain, investissait enfin le digital. Je ne pouvais rater ce virage, sentant que mon journal et moi évoluions dans la même direction.
C’était l’époque du site telquel-online.com, hérité du site d’archivage, des bugs et de cette bande de jeunes qui font du Web. Avec quelques jeunes journalistes, des idées fraîches et le soutien de Aïcha Akalay, alors directrice de la publication et irréductible défenseuse de l’indépendance du site, Telquel.ma a gagné en galons, jusqu’à finalement fusionner avec son grand frère, le magazine TelQuel.
En 2018, TelQuel entamait – et moi avec lui- un nouveau virage : celui du revenu généré par les lecteurs à travers les abonnements. Une nécessité pour qui veut garder son indépendance et continuer à faire du journalisme malgré la concurrence des géants du Web. Un nouveau jalon aussi dans la transformation digitale de TelQuel, renforcée depuis par d’autres projets comme Diaspora, destiné aux Marocains du monde, et Qitab.ma, site de vente de livres par TelQuel.
En 20 ans, TelQuel a été pour ses lecteurs, comme pour ceux qui le font chaque jour, un laboratoire d’idées, un incubateur de talents et un média dont les pages papier et HTML sont porteuses de nos espoirs, de nos ambitions et de nos rêves.