“Une amitié marocaine” : Tamy Tazi, Fernando Sanchez et Yves Saint Laurent à l’honneur au Musée YSL

Le Musée Yves Saint Laurent à Marrakech rouvre ses portes le 16 octobre sur une exposition sous le signe de l’amitié qui liait les trois créateurs.

Par

Tamy Tazi et Yves Saint Laurent lors d’un déjeuner en plein air organisé par Tamy Tazi à Marrakech, au début des années 1970. Crédit: Fondation Jardin Majorelle

Fermé pendant plus d’un mois pour travaux, le musée Yves Saint Laurent rouvre ses portes sur une ode à l’amitié. L’exposition “Une amitié marocaine” investit les lieux à partir du 16 octobre, et jusqu’au 29 mai 2022, pour mettre la lumière sur la complicité entre les créateurs de mode Tamy Tazi, Fernando Sanchez (1935-2006) et Yves Saint Laurent (1936-2008).

Cette exposition, qui se décline en cinq parties (Un album de famille, L’atelier, Inspirations, Masculin-féminin et Explosion de couleurs), est la première à confronter leurs regards et à évoquer les moments clefs de ce dialogue qui a commencé dès la fin des années 1960, relève la Fondation Majorelle dans un communiqué.

La passion en partage

Les trois créateurs se sont passionnés pour les arts décoratifs et les arts appliqués du Maroc. Ils portent une attention particulièrement aiguë “au mystère des rues de Marrakech” (Fernando Sanchez), à cette ville qui leur a “amené la couleur” (Yves Saint Laurent). Leur passion pour cette “merveilleuse inconnue” les réunira régulièrement.

“Les audaces qui sont depuis les miennes, je les dois à ce pays, à la violence des accords, à l’insolence des mélanges, à l’ardeur des inventions”

Yves Saint Laurent, en 1983

L’exposition, qui souhaite refléter cette amitié et cette passion marocaine qui les anime, est pensée à la lumière des mots révélateurs d’Yves Saint Laurent, qui déclarait en 1983 : “Bien qu’habitué à la lumière et aux couleurs de l’Afrique du Nord, c’est plus tard, lorsque je découvris le Maroc, que je compris que mon propre chromatisme était celui des zelliges, des zouacs, des djellabas et des caftans. Les audaces qui sont depuis les miennes, je les dois à ce pays, à la violence des accords, à l’insolence des mélanges, à l’ardeur des inventions. Cette culture est devenue la mienne, mais je ne me suis pas contenté de l’importer, je l’ai annexée, transformée, adaptée.

Yves Saint Laurent, croquis de recherche pour la collection haute couture automne-hiver 1976 dite “Opéra – Ballets russes”, 1976.Crédit: Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent

En hiver 1966, Yves Saint Laurent visite Marrakech pour la première fois ; le coup de foudre est immédiat. Dès lors, il s’y rend plusieurs fois par an jusqu’à la fin de sa carrière pour se ressourcer, mais aussi pour y dessiner ses collections.

Parmi les premières amitiés qu’il noue au Maroc, la créatrice de caftans Tamy Tazi. Quant à Fernando Sanchez, Yves Saint Laurent l’a connu bien plus tôt, sur les bancs de l’École de la Chambre syndicale de la couture parisienne.

Fernando Sanchez et Yves Saint Laurent, vers 1975. Photographe inconnu.Crédit: Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent

Alors que les trois amis vivaient respectivement à Casablanca, New York et Paris, ils se retrouvaient régulièrement à Marrakech, partageant la même fascination pour la richesse du patrimoine marocain.

Au fil des années

On ne peut comprendre l’itinéraire riche et foisonnant de l’œuvre de Yves Saint Laurent sans tenir compte de son amitié avec Tamy Tazi et Fernando Sanchez, entretenue pendant quarante ans. Leurs œuvres, qui entrent souvent en résonance les unes avec les autres, en témoignent.

Caftan de Tamy Tazi, en
bourrette de soie ornée d’une broderie inspirée de Chaouen.Crédit: Collection Tamy Tazi Mezian

Yves Saint Laurent a revendiqué haut et fort l’influence du Maroc dans sa création. Il a su s’approprier mais aussi réinventer le burnous, le saroual, et d’autres vêtements traditionnellement masculins, pour dessiner de nouvelles silhouettes féminines.

Il a su aussi emprunter au Maroc ses couleurs mélangeant des tons vifs et chauds à d’autres plus sobres. Rappelons que Yves Saint Laurent, avant de découvrir le Maroc, consacrait à la couleur noire une place prégnante dans ses collections.

Quant à Tamy Tazi, elle a su réinventer le caftan, en lui donnant une silhouette plus élancée et plus affinée, offrant aux femmes une aisance nouvelle, tout en soulignant leurs lignes. Elle s’est intéressée à la coupe et, plus particulièrement encore, à la broderie. Elle en élargit le répertoire, en jouant tant des codes vestimentaires que de la variation des formes et des couleurs.

Elle va par ailleurs constituer une extraordinaire collection de broderies et de textiles anciens, laquelle lui a permis d’élargir son regard et de nourrir sa création mais aussi de partager sa passion avec Yves Saint Laurent et Fernando Sanchez, qu’elle a initié à cet univers si particulier.

Toutes les créations exposées doivent être vues et perçues à la lumière de leur amitié réciproque et de leur jeu permanent de réinterprétations successives et de reprises créatrices.

(avec MAP)