Confusion et désarroi à l’aéroport de Kaboul, où des milliers d’Afghans essaient de fuir

Les troupes américaines ont tiré en l’air et les vols commerciaux ont été annulés lundi à l’aéroport de Kaboul, où des milliers d’Afghans ont envahi le tarmac dans l’espoir de prendre un vol leur permettant d’échapper au nouveau régime taliban.

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Les Afghans se pressent sur le tarmac de l'aéroport de Kaboul le 16 août 2021 pour fuir le pays. Crédit: AFP

Des images vidéo publiées sur les réseaux sociaux montrent des scènes de chaos total sur le tarmac, des civils bataillant pour grimper le long de passerelles ou d’escaliers menant à des avions. Ils essaient désespérément de fuir l’Afghanistan, où les talibans ont pris le pouvoir dimanche, craignant que ceux-ci n’instaurent le même genre de régime fondamentaliste que lorsqu’ils dirigeaient le pays, entre 1996 et 2001.

Sous le regard de centaines d’autres personnes, ceux qui avaient réussi à monter en haut des escaliers, des jeunes surtout, tentaient ensuite d’aider autres à faire de même, dont certains s’agrippaient de toutes leurs forces aux barreaux. Des familles en panique, avec des enfants effrayés, cherchaient à s’enfuir avec leurs lourds bagages.

Ruée vers l’aéroport

La cohue était telle que les troupes américaines sécurisant l’aéroport ont tiré en l’air pour contrôler la foule, selon un témoin, et que tous les vols commerciaux en partance ont été annulés. “J’ai très peur. Ils tirent des coups de feu en l’air”, a indiqué à l’AFP ce témoin, qui n’a pas souhaité donner son nom, de peur que cela compromette ses chances de partir.

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Le département d’État a annoncé que le périmètre de l’aéroport avait été sécurisé. Les Américains ont envoyé 6000 militaires pour évacuer quelque 30.000 diplomates américains et civils afghans ayant coopéré avec les États-Unis qui craignent les représailles des talibans.

“C’est dangereux pour moi de vivre ici car les talibans me cibleront, c’est sûr”

Un ancien militaire afghan

L’ambassade américaine à Kaboul a demandé sur Twitter aux citoyens américains qui pourraient encore se trouver dans le pays et aux Afghans de “ne pas se déplacer à l’aéroport”. Mais des milliers d’Afghans, même n’ayant jamais travaillé pour les Américains et n’ayant aucune chance d’obtenir un visa à ce titre, se sont rués vers l’aéroport.

Quelques heures auparavant, les talibans avaient demandé à leurs combattants d’entrer dans Kaboul pour y maintenir l’ordre, puis avaient investi le palais présidentiel, d’où le président Ashraf Ghani venait de fuir en direction d’un autre pays. “Nous avons peur de vivre dans cette ville et nous tentons de fuir Kaboul”, a raconté à l’AFP depuis l’aéroport Ahmad Sekib, 25 ans, un autre témoin utilisant un faux nom.

Vietnam bis

J’ai lu sur Facebook que le Canada accepte des demandeurs d’asile d’Afghanistan. J’espère que je serai l’un d’eux. Comme j’ai servi dans l’armée, j’ai perdu mon boulot, et c’est dangereux pour moi de vivre ici car les talibans me cibleront, c’est sûr”, a-t-il expliqué.

Des talibans montent la garde dans une rue près de Zanbaq Square à Kaboul, le 16 août 2021.Crédit: Wakil Kohsar / AFP

Les États-Unis ont confirmé avoir évacué tout le personnel de leur ambassade vers l’aéroport. Mais les diplomates sont gardés à l’écart des civils afghans qui essaient de quitter le pays par leurs propres moyens.

D’autres vidéos postées dans la nuit sur les réseaux sociaux montrent des gens se bagarrant pour entrer dans un avion-cargo déjà bondé. Le reste de la capitale était en revanche plutôt calme ce lundi 16 août. Des talibans en armes patrouillaient les rues et installaient des postes de contrôle.

Le mollah Abdul Ghani Baradar, co-fondateur des talibans, a appelé ses hommes à faire preuve de discipline. “À présent, nous devons montrer que nous pouvons servir notre nation et assurer la sécurité et le confort dans la vie”, a-t-il affirmé dans une vidéo.

Les scènes de chaos à l’aéroport rappellent un souvenir douloureux aux Américains, celui de la chute de Saigon au Vietnam, en 1975. Même si la comparaison a été récusée par le secrétaire d’État, Antony Blinken, qui a assuré sur CNN : “Ceci n’est pas Saigon.”