Avec son père bloqué au Maroc pendant toute la dernière période de confinement et de fermeture des frontières, Latifa Bisbis, employée municipale à Istres dans le sud-est de la France, a craint le pire. “Imaginez qu’il soit mort là-bas, nous n’aurions même pas pu assister à ses funérailles”, témoigne la jeune femme, frissonnant encore d’effroi à cette perspective.
“Mon père, à 80 ans, a passé le ramadan tout seul, poursuit-elle. Ça a été un vrai traumatisme pour toute la famille. Avant la crise sanitaire, son objectif était de s’installer définitivement au Maroc. Nous, ses enfants, nous aurions fait des allers-retours. Aujourd’hui, il n’en est plus question. Il restera désormais plus de temps en France qu’au Maroc.”
De cette éprouvante expérience, Latifa Bisbis conserve une grande colère contre le royaume : “Pendant cette crise, le Maroc a donné des informations cruciales à la dernière minute. Le consulat du Maroc à Marseille ne m’a jamais répondu au téléphone. Je trouve que le pays ne respecte pas son peuple.”
Opacité, complotisme et paranoïa
Mohsin Mouedden, militant associatif et figure de la communauté marocaine en Belgique, partage ce sentiment de dépit. En mars 2020, il a créé la page “Belgo-Marocains bloqués au Maroc/coronavirus” afin de permettre à tous les MRE du Plat pays coincés de l’autre côté de la Méditerranée de trouver des informations et de l’aide pour rentrer chez eux.