L’ancien Premier ministre portugais a affirmé à la présidence de l’Assemblée générale et au Conseil de sécurité qu’il était “disponible pour un second mandat comme secrétaire général des Nations unies”, a déclaré son porte-parole, Stéphane Dujarric. Son mandat actuel s’achève fin décembre. Il revient maintenant à l’Assemblée générale de l’ONU de confirmer formellement dans l’année sa prolongation pour un nouveau et dernier mandat de cinq ans allant de 2022 à 2026.
À ce stade, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité (États-Unis, Chine, Russie, France et Royaume-Uni), prévenus dès vendredi lors d’un déjeuner et dont le feu vert est crucial pour un nouveau mandat, le soutiennent, ont indiqué à l’AFP des diplomates. Lors d’un entretien, le Premier ministre britannique Boris Johnson a “chaleureusement félicité” Antonio Guterres pour sa décision, en saluant “le succès de son premier mandat”, selon un communiqué de Downing Street.
Il fait “un travail fantastique” et “ce serait une erreur de le remplacer juste pour des raisons symboliques”, à savoir nommer une femme pour la première fois de l’histoire de l’ONU, indique sous couvert d’anonymat un ambassadeur d’un pays membre du Conseil de sécurité. “Il est très réfléchi dans son analyse” et “dans la manière dont il plaide pour de nouvelles solutions aux nouveaux problèmes, le changement climatique, l’inégalité socio-économique croissante, l’égalité des sexes”, estime ce diplomate.
Avec un solide parcours onusien comme Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés (2005-2015), Antonio Guterres, adepte de la diplomatie des coulisses, ne présente cependant pas comme secrétaire général de bilan fructueux dans la résolution des conflits depuis son entrée en fonctions en 2017. Il n’a pu empêcher un génocide en Birmanie, la Syrie et le Yémen sont toujours déchirés par la guerre, et le chef de l’ONU a été humilié lors d’une visite en avril 2019 en Libye qui avait coïncidé alors avec le début d’une offensive militaire contre le gouvernement reconnu par l’ONU. Louée par nombre d’États, son image pâtit de critiques de diplomates et d’ONG qui le trouvent trop frileux sur la défense des droits humains. Lui s’en défend, assurant aborder le sujet lors de réunions internationales davantage que certains dirigeants dits démocrates.
À la mi-2019, il a opéré un tournant dans ses priorités en se voulant à la pointe du combat contre le réchauffement climatique. “Je ne prétends pas régenter le monde”, mais “mon objectif principal est de faire le plus de bruit possible” contre les dérives climatiques, explique alors l’homme au sourire discret, cheveux grisonnants tirés sur le côté. Pour cela, il va dans le Pacifique voir des îles menacées d’être englouties par la montée des eaux ou aux Bahamas se retrouver au milieu de ruines provoquées par un ouragan.
Au quotidien, Antonio Guterres a une montre bizarrement toujours en avance de trois quarts d’heure — un élément perturbant pour ses interlocuteurs. Sur son poste, il indique avec humour ne pas être “sûr que ce soit le pire travail au monde”.
“Le boulot de quelqu’un qui travaille 50 heures par semaine dans un des pays les moins développés pour un salaire de 2 ou 3 dollars par jour est pire que le mien”, ajoute ce catholique pratiquant, qui affirme vouloir “faire tout ce qu’il peut pour les milliards de gens qui vivent dans des conditions difficiles”. Selon un diplomate s’exprimant sous couvert d’anonymat, Antonio Guterres, né le 30 avril 1949 et dont la femme vit à Lisbonne, “ne peut concevoir sa vie sans être au contact des grands de ce monde”.
Selon plusieurs ambassadeurs, il n’aurait pas été candidat à un second mandat si Donald Trump, qui a fait sortir les États-Unis de plusieurs agences onusiennes et s’est affranchi de nombre de résolutions adoptées par son pays, avait été réélu. Au printemps 2020, le chef de l’ONU avait dénoncé la pandémie de Covid-19 comme “une menace pour l’humanité entière”. Cette crise est “le plus grand défi pour nous depuis la Seconde Guerre mondiale”, avait-il dit, exhortant à la solidarité et à la coopération. En vain. Le secrétaire général est davantage secrétaire que général et il est parfois sans pouvoirs face aux grandes puissances qui régentent la planète.