Le Haut Commissariat au plan (HCP) a réalisé une enquête parue ce jeudi 24 septembre, dédiée à l’impact du Covid-19 sur la situation socioéconomique et psychologique des réfugiés au Maroc. Cette enquête a été réalisée en partenariat avec le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), du 2 au 8 juin, en se basant sur un échantillon de 600 ménages, “représentatif des différentes catégories de réfugiés, au sens du HCR, selon le pays d’origine, la ville de résidence, l’âge, le sexe et le niveau scolaire”.
L’enquête du HCP révèle que le Maroc compte environ 7000 réfugiés
Il convient de préciser au préalable que selon le HCR, le terme réfugié désigne “toute personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays”.
En se basant sur ces critères, l’enquête du HCP révèle que le Maroc compte environ 7000 réfugiés, ceux-ci étant principalement syriens (48 %), yéménites, centrafricains, sud-soudanais, et ivoiriens. Ils sont répartis en 2168 ménages, majoritairement situés à Rabat et Casablanca.
1. “99,3 % des réfugiés ont respecté les mesures de confinement sanitaire”
L’enquête menée par le HCP et le HCR se fonde tout d’abord sur un profilage rigoureux des populations réfugiées au Maroc. Elle établit ainsi que plus de 50 % des réfugiés présents sur le territoire marocain sont arrivés après 2015.
Un chef de ménage réfugié sur deux dispose d’un titre de séjour en cours de validité. Le même chiffre s’applique aux chefs de ménage en situation de célibat, et disposant d’un niveau d’enseignement supérieur. Environ 20 % des chefs de ménage réfugiés sont en situation de chômage : 44,9 % d’entre eux sont ivoiriens.
Les réfugiés au Maroc occupent majoritairement des appartements en location, ont une situation de salariat ou de travail indépendant, principalement dans les services et la construction.
Toujours selon l’enquête du HCP-HCR, 99,3 % des réfugiés déclarent avoir respecté les mesures de confinement sanitaire. Parmi eux, 90,4 % estiment avoir fait preuve d’un respect total, et 8,9 % d’un respect partiel des mesures de confinement. Pour information, seulement 79 % des ménages marocains ont fait preuve d’un respect total des mesures de confinement, et 21 % d’un respect partiel.
Seuls 3,9 % des réfugiés n’avaient aucune connaissance des symptômes du Covid-19, 66,3 % étaient au courant des numéros verts mis en place par les autorités sanitaires, et 42 % d’entre eux se tournaient vers les réseaux sociaux afin de s’informer quant aux nouvelles dispositions mises en place par le gouvernement.
2. “47 % des ménages réfugiés ont déclaré avoir connu des moments où ils n’avaient pas assez de produits alimentaires”
Une seconde partie du rapport est consacrée au mode de vie et de consommation des réfugiés pendant le confinement sanitaire. Ainsi, 18,3 % d’entre eux n’ont pas été en mesure d’obtenir une attestation exceptionnelle de sortie, et 6,8 % de ceux qui l’ont obtenue estiment l’avoir eue “difficilement”.
Toujours pendant la période de confinement, seulement un réfugié sur deux disposait de médicaments. Parmi ceux-là, 37,2 % en disposaient de façon jugée suffisante, et 40 % n’en avaient pas pour des raisons financières. Cela dit, seulement 7 % des ménages réfugiés ne disposaient pas de bavettes et masques de protection.
Quatre ménages de réfugiés sur dix ont reçu des aides alimentaires pendant le confinement : 60 % de ces aides provenaient d’associations et d’organisations non gouvernementales. Par ailleurs, 47 % des ménages réfugiés ont déclaré avoir connu des moments où ils n’avaient pas assez de produits alimentaires, et près d’un ménage sur dix (9,8 %) a eu recours à la mendicité.
3. “9 chefs de ménage de réfugié sur 10 ont cessé de travailler pendant le confinement”
Durant le confinement, près de 90 % des chefs de ménage de réfugié sur dix ont dû cesser de travailler. Parmi ceux-ci, 81,4 % n’ont reçu aucune indemnité. Sur les 11,6 % qui ont pu continuer à exercer leur activité professionnelle, seuls 4,1 % ont pu garder leur emploi à plein temps.
Parmi ceux qui ont reçu des indemnités (6,1 % en ont reçu de la part de l’État ou de leur employeur), 92,2 % jugent ces aides insuffisantes à compenser la perte de revenus occasionnée par l’arrêt du travail.
Par ailleurs, l’enquête révèle que la cause principale du manque du soutien financier relevé par les réfugiés est leur statut légal. De son côté, le HCR est le principal fournisseur d’aides financières et alimentaires aux réfugiés, et ce sous la forme d’allocations financières.
Durant le confinement, la première source d’inquiétude des ménages de réfugiés était la baisse du revenu, et la seconde était la perte d’emploi.
4. “35,1 % des réfugiés souffrant d’une maladie chronique n’ont pas pu accéder au service de soin par manque d’argent”
Sur 2168 ménages de réfugiés, 51,6 % ont des membres scolarisés, dont 20 % dans des établissements privés. Ainsi, les membres scolarisés de huit ménages sur dix ont pu suivre des cours à distance, et 63,7 % d’entre eux les ont suivis régulièrement. Cela dit, 47,9 % évoquent comme raison de non suivi des cours “le manque ou l’insuffisance des outils et supports nécessaires”. Enfin, trois quarts des ménages de réfugiés ont été en mesure d’assister leurs enfants scolarisés dans leur enseignement à distance.
Sur une population d’environ 7000 réfugiés, 31 % souffrent d’une maladie chronique. Parmi eux, 62,8 % ont accédé aux services de santé pendant le confinement, et 35,1 % n’ont pas pu accéder aux services de soin par manque d’argent.
Sur le plan psychologique et mental, un quart des ménages se disent “très inquiets” des effets probables de la pandémie : contamination, perte d’emploi, insuffisance alimentaire… Les principaux impacts psychologiques sur cette population ont été l’anxiété, la peur et la dépression, relevés chez 52,5 % des réfugiés. Enfin, seulement 10 % des ménages de réfugiés ont bénéficié d’un service de consultation à distance pendant le confinement.