L’Etat marocain se prépare à lever un milliard de dollars à l’international cette année. Cette opération est prévue par la loi de finances 2019. Dans un entretien accordé à Bloomberg le 7 avril, le ministre des Finances a annoncé qu’un consortium de banques a été mandaté pour l’opération. Pour maintenir une stratégie cohérente, une seconde levée à l’international se fera en 2020, a expliqué le ministre.
Sous forme d’émission obligataire sur les marchés internationaux, cette sortie à l’international se fera dès que les conditions le permettront, a déclaré Benchaaboun, sans préciser le calendrier de cette opération. Pour l’ancien PDG de la Banque centrale populaire, le pays continuera à recourir au marché international “de la manière la plus naturelle possible, car la dette se déprécie par essence; il est donc évident que vous devez augmenter la part du financement extérieur dans la dette globale”.
Cette sortie sur deux ans a aussi un autre avantage : “Lorsque vous êtes régulièrement présent sur le marché obligataire international, vous fixez votre objectif de prix pour la dette que vous souhaitez contracter et, évidemment, vous mobilisez plus rapidement des financements auprès des prêteurs, car ils vous connaissent”, a expliqué Benchaaboun.
Ce projet marque un changement de stratégie par rapport à son prédécesseur, Mohamed Boussaid. En cinq ans à la tête du ministère des Finances, ce dernier n’a jamais consenti à contracter une dette sur les marchés internationaux. Cette décision intervient aussi à un moment où le gouvernement cherche des solutions alternatives de financement pour les grands projets du royaume, afin de les rendre moins dépendants du financement public.
Dans l’état actuel des choses, la dette est considérée comme quasi souveraine, ce qui limite la marge de manœuvre de l’administration. Le royaume compte revenir sur le marché obligataire international afin de financer un large programme de restructuration de l’économie nationale. Bloomberg rappelle ainsi que le 12 octobre dernier, Mohammed VI a annoncé la mise en place d’une “commission ad hoc” pour synthétiser la réflexion sur un nouveau modèle de développement et en présenter un avant-projet.
Les responsables marocains ont du mal à relancer la croissance qui a été freinée ces deux dernières années par la sécheresse et la faible demande intérieure. Lors du dernier examen de sa ligne de précaution et de liquidité (LPL) conclue avec le pays au début du mois, le fonds monétaire international a déclaré que “l’amélioration de la gestion budgétaire et de la diversification économique” ont permis à l’économie marocaine d’être plus résiliente, même si le chômage reste élevé, en particulier chez les jeunes. Pour le fonds basé à Washington, le gouvernement doit accélérer les réformes “afin d’accroître les gains de productivité, de créer des emplois et d’accroître le potentiel de croissance”, conformément à ses objectifs à moyen terme.
“Le résultat de la croissance ne peut se résumer en un trimestre”, a déclaré Benchaaboun dans cet entretien accordé à Bloomberg, soulignant l’impact de la sécheresse sur le secteur agricole à forte intensité de main-d’œuvre et “un PIB non agricole affichant des niveaux de croissance satisfaisants”.
Le gouvernement s’en tient à sa prévision budgétaire d’une croissance de 3,2%, a déclaré le ministre. Le mois dernier, Bank al Maghrib a revu à la baisse ses prévisions de croissance pour 2019 pour la ramener à 2,7%, à cause principalement d’une production agricole plus faible. Parmi les mesures prises par le gouvernement pour stimuler la croissance, un projet de loi – actuellement au Parlement – visant à protéger les droits des actionnaires minoritaires dans les entreprises, ainsi que le lancement cette année du premier fonds de placement immobilier, ou REIT (Real Estate Investment Trusts), qui fourniront “une source de financement pour les entreprises à tous les niveaux”. “Les répercussions ne seront pas ressenties du jour au lendemain,” a déclaré Benchaaboun, soulignant que le gouvernement est convaincu que ces mesures stimuleront la croissance et créeront des emplois.