Digitalisation, Assurance maladie obligatoire (AMO) pour les salariés du secteur public, doublement des succursales de la CNSS à travers le Maroc, diminution des effectifs… En quatorze ans à la tête de la CNSS, Saïd Ahmidouch a été un manager capable de renouveler une administration boursouflée par les scandales financiers et qui a trainé une image d’un organe public malade durant des décennies.
De proches collaborateurs de Saïd Ahmidouch à la CNSS décryptent la méthode de celui qui a été nommé wali de la région Casablanca-Settat le 18 février.
“Dégraisser le mammouth”
Lors de son arrivée en 2005, Saïd Ahmidouch commence une restructuration en profondeur de la CNSS, notamment à travers la diminution des dépenses. Il instaure une politique de départs volontaires. “En 2005, nous étions près de 6.000 personnes, désormais, nous sommes moins de 4.000,” constate une source proche de l’ancien patron de la CNSS. Le nouveau wali de la capitale économique est-il un coupeur de têtes ? “Il était nécessaire pour que la mécanique progresse, que la taille des effectifs de la CNSS soit optimale” répond notre source, tout en insistant sur le fait qu’il ne s’agissait pas de licenciements, mais bien de départs volontaires des salariés les plus âgés, remplacés par des collaborateurs plus jeunes.
Corporatisation de la CNSS
Par ce “dégraissage du mammouth”, Ahmidouch a donc aussi modernisé et rajeunie la CNSS. Ce mouvement a également été accompagné d’une vision très “corporate et privée” de l’ancien directeur. “Le terme « usager » n’est plus utilisé dans la maison. Saïd Ahmidouch a mis au centre de nos préoccupations, le client. Depuis 2007, notre approche administrative a aussi changé. La CNSS s’est transformée en entreprise devant répondre aux grilles de performance d’une société privée,” décrit notre source.
C’est donc de « clients » que la CNSS a cherché à se rapprocher, en doublant le nombre d’agence de la CNSS à travers le Royaume. A l’arrivée d’Ahmidouch en 2005, il y a en avait moins d’une soixantaine. Aujourd’hui, c’est presque 120 locaux de la CNSS dédiés à la réception des clients qui sont répartis sur le territoire. Pour les citoyens les plus isolés, la CNSS a également mis en place des agences mobiles pour aller à la rencontre de ceux situés dans les zones les plus reculées du royaume. “Ces agences mobiles sont des vans équipés de matériel informatique ainsi que deux agents qui vont au contact des assurés. Cette impulsion a été initiée par Saïd Ahmidouch,” explique notre source au sein de la CNSS.
Une numérisation de fond en comble
Comme l’explique Lahcen Larhdir, inspecteur général de la CNSS, “Saïd Ahmidouch a énormément travaillé sur la numérisation et la digitalisation du service et a permis de faire un saut qualitatif très important”. La déclaration des salaires en ligne a été l’une des réformes notables dans la stratégie de numérisation de la CNSS, dont la procédure, qui part de loin, a été simplifiée. “Il fallait généraliser la déclaration directement sur le portail de la CNSS plutôt que de continuer à passer par le papier ou par la poste,” se souvient un collaborateur. Une étape cruciale, puisque cette déclaration est à la base des droits des assurés qui en découlent.
“Si le système avait été fragile, cela aurait créé beaucoup d’anomalies, de rejets, et donc de réclamations,” pointe notre source. Désormais, la CNSS permet à plus de 210.000 entreprises de déclarer leurs salariés et engrange plus de 21 milliards de dirhams de cotisations (chiffres de 2017, NDLR). “Cette dématérialisation a permis d’assurer plus de 6 millions de personnes en matière de maladie et nous a rapproché de nos clients. Nous traitions 1.000 dossiers par jour il y a 10 ans. Nous en traitons plus de 20.000 aujourd’hui. Les dossiers AMO sont aujourd’hui traités en moyenne en 5 jours, soit des performances supérieures à certaines institutions privées;” explique un cadre de la CNSS.
Les opportunités de carrière
Saïd Ahmidouch aurait donc su trouver les dynamiques technologiques revigorer la CNSS. Cela est allé de pair avec des investissements dans la formation des salariés de l’entreprise. L’ancien directeur a développé des partenariats avec des universités comme l’ISCAE, les Mines de Paris ou Polytechnique, pour donner aux salariés un accès à des formations diplomantes, gravir plus rapidement les échelons de l’administration, mais aussi monter en compétence. “Des cadres et des agents en bénéficient. Saïd Ahmidouch avait établi des plans triennaux de formation. Il y avait des formations en interne ainsi qu’externe avec des masters disponibles notamment à l’étranger, payés par la CNSS,” explique un collaborateur.
Cet ancien cadre dans les assurances transposera-t-il ses méthodes du privé dans la gestion de la préfecture de la capitale économique, comme il l’a fait pour la CNSS ?