Vers une meilleure protection des lanceurs d’alerte dans la fonction publique?

Une loi spéciale pour protéger les lanceurs d’alerte dans la fonction publique est en cours d’élaboration. Elle devrait faciliter les dénonciations émanant des fonctionnaires témoins d’actes délictueux dans l’exercice de leurs fonctions.

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"Whistleblower" (image d'illsutration) Crédit: David Goehring / CC0 / Wikimedia Commons

Le Maroc et l’UNESCO, présidée par Audrey Azoulay, ont signé, le 18 février à Rabat, un plan d’action de coopération pour le droit d’accès à l’information.

Signé par le ministre délégué chargé de la réforme de l’Administration et de la fonction publique, Mohamed Benabdelkader, et la directrice du bureau de l’UNESCO à Rabat, Golda El Khoury, ce plan d’action vise à mettre en place un programme commun pour appuyer et accompagner les chantiers de réforme en matière d’accès à l’information.

Le plan d’action prévoit notamment la mise en place d’un guide descriptif des différentes applications des dispositions de la loi n° 13.31 relative au droit d’accès à l’information, le lancement de sessions de formation à distance au profit des personnes chargées de fournir l’information, la mise en place d’un programme visant à former les formateurs dans ce domaine à l’échelle centrale et locale, outre l’élaboration des bases et supports de communication pour assurer la généralisation du droit d’accès à l’information.

Selon Les Inspirations ÉCO, le texte en préparation vise à protéger le fonctionnaire dénonciateur de toute exclusion et à lui fournir les garanties nécessaires pour l’encourager à aviser qui de droit. La loi aura également à charge d’éviter les règlements de compte et les dénonciations abusives. Un statut spécifique stipulera clairement ses droits et ses devoirs au lanceur d’alerte dans la fonction publique. L’instance qui recueillera les dénonciations est à déterminer.

Ahmed Bernoussi de Transparency Maroc salue l’initiative de ce projet de loi. «L’État doit avant tout protéger la carrière des agents publics qui dénoncent les cas de corruption. Si le lanceur d’alerte se sent protéger, alors il sera encouragé à faire preuve de courage pour dire ce qu’il a vu», déclare-t-il.

Même si elle était promulguée, cette loi ne constituerait que la moitié de chemin. Ahmed Bernoussi explique en effet l’article 18 de la loi sur la fonction publique, qui invite les fonctionnaires à faire preuve de discrétion sur ce qu’ils voient et entendent lors de l’exercice de leurs fonctions, doit encore être abrogé pour permettre l’assainissement des pratiques.

Parallèlement, une révision du décret sur les inspections générales est dans les tuyaux. Selon Les ECO, on se dirigerait vers la formation d’une inspection générale unique qui serait placée sous la tutelle du chef du gouvernement. L’inspection générale relève actuellement du ministère dont elle dépend, ce qui a pour effet de limiter son périmètre d’action. La question de la formation et de la compétence des agents chargés des inspections devrait également être mise sur la table.

Enfin, le code de déontologie des fonctionnaires, débattu lors de la dernière réunion du Conseil supérieur de la fonction publique, va également voir le jour. Le texte, qui n’aura pas le pouvoir de sanctionner, sera révélé au terme des concertations avec les partenaires sociaux et les départements ministériels concernés. À cet égard, l’OCDE recommande d’élaborer un code de conduite spécifique pour les fonctionnaires impliqués dans la gestion des marchés publics.

Mohamed Benabdelkader a déclaré à la presse que cet accord s’inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre de l’accord de coopération conclu avec la directrice de l’UNESCO dans le domaine de l’accompagnement technique et du partage de l’expérience de l’UNESCO en matière de la mise en oeuvre du droit d’accès à l’information.

Le ministre a en outre indiqué que le Maroc dispose aujourd’hui d’un texte de loi élaboré en partenariat avec le gouvernement, la société civile, et les organisations professionnelles. Ce dernier entrera en vigueur en mars prochain. « Nous sommes donc en train de former les fonctionnaires qui seront en charge de la mise en oeuvre du droit d’accès à l’information », a-t-il expliqué.

«Il s’agit de créer une nouvelle fonction publique dans le cadre de la transparence et de corrélation entre responsabilité et reddition des comptes ainsi que de s’ouvrir sur le citoyen marocain», a-t-il précisé.

Pour sa part, Golda El Khoury a fait savoir que l’objectif du plan d’action est de permettre à tous les citoyens du Maroc d’accéder à une information «complète et transparente», leur permettant de s’informer sur ce qui se passe dans leur pays afin de prendre des décisions sur la base des données réelles ainsi que pour contribuer au processus démocratique au Royaume.

« Je suis ravi de faire en sorte que plusieurs agences (…) travaillent sur cette question avec le gouvernement pour accompagner la réforme et la modernisation de l’administration publique et fournir une offre cohérente d’appui et d’expertise technique au ministère », a fait savoir de son côté le coordonnateur résident du système des Nations Unies pour le développement au Maroc, Philippe Poinsot, considérant la question de l’accès à l’information comme essentielle dans la bonne gouvernance.

Avec MAP