La Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI) s’est réunie pour parler de l’état du marché le 12 février dernier. Le bilan est alarmant et les chiffres parlent d’eux même. La production a chuté de 51% depuis 2011. En 2018, on déplore un recul de 35% des mises en chantier. Le secteur immobilier, censé être une locomotive économique, va mal. A l’origine de cette décadence, la solvabilité des ménages, le pouvoir d’achat en berne, et la taxation foncière conséquente, entre autres causes.
Des taxes qui pèsent
« Le secteur est passé par plusieurs crises différentes : crise du foncier, des autorisations, du pouvoir d’achat, des produits bancaires, des plans d’aménagements », énumère le vice-président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI), Rachid Khayatey. Pour lui, la principale épine dans le pied des promoteurs est la taxation. L’augmentation des frais de la conservation foncière et le raccordement des domiciles aux réseaux téléphoniques et électriques représentent des « coûts considérables » pour les acteurs du secteur immobilier. Depuis 2012, année marquant le début de la crise immobilière, l’administration publique a décidé de faire passer les droits d’enregistrement de 3 à 4%. Les droits de mutation et de propriétés sont eux passés de 1 à 1,5%.
« Les promoteurs ont déployé de nombreux efforts pour arriver à un prix optimal. En se conformant aux standards internationaux, et en se comparant au reste du monde, il faut savoir que le Maroc possède les offres parmi les plus alléchantes. Mais maintenant, il y a de nombreuses taxes qui ont été greffées. Aujourd’hui, le coût de viabilisation d’un terrain (raccord à l’eau, téléphone, électricité, NDLR) par un promoteur est aussi cher, voire moins, que les taxes associées à ce terrain », déplore Rachid Khayatey. Ce niveau de taxation est rédhibitoire pour les promoteurs souhaitant investir et développer des parcs immobiliers, en raison de rendements moins intéressants qu’auparavant, assure-t-on du côté de la FNPI.
Décalage entre l’offre et la demande
A l’heure actuelle, les promoteurs immobiliers sont devant une impasse. « Le pouvoir d’achat n’est pas au mieux. L’Etat, au lieu de nous aider à mieux faire correspondre l’offre et la demande, nous a surtaxés. Donc on ne peut plus baisser les prix », dénonce le vice-président de la FNPI.
Actuellement, on note un déficit de 400.000 logements par an. Ce déficit s’accentue de 200.000 logements par an au gré des intégrations au marché du travail. Qui plus est, il existe une inadéquation entre les besoins des citoyens et les caractéristiques des offres proposées en termes de finitions, prix, équipements et emplacements, souligne la FNPI. L’écart entre l’offre et la demande pourrait économiquement signifier que les prix sont tirés vers le haut. Or, il n’en est rien. Les cours suivent en effet une tendance baissière.
Pour Mustapha Allali, vice-président de la commission communication et relations internationales à la FNPI, le souci concerne également la compréhension des besoins des citoyens. « Pour être clair, le marocain ne trouve pas chaussure à son pied. On a un logement économique en périphérie, éloigné des zones d’activités économiques. Le Marocain de la classe moyenne ne peut pas se contenter du logement social, mais il ne peut pas accéder au haut standing non plus », nous explique-t-il.
La crise actuelle du logement est aussi liée à un « manque crucial de politique urbaine ». Elle s’explique également par l’émergence d’une catégorie « non solvable », selon Rachid Khayatey. Le manque de moyens de financement adaptés n’y est pas étranger. « Les banques ont beaucoup compté sur la solidarité familiale. Quand le fils achète, la sœur, le père, la mère participent également et cofinancent le bien. Les banques n’ont donc pas développé assez de plans d’accès à la propriété, ni de livrets d’épargne logement, de crédit à taux zéro, etc. Au Maroc, ces produits financiers sont inexistants », nous apprend le vice-président de la FNPI.
Les prix ne se sont donc pas envolés, car le pouvoir d’achat des ménages, ainsi que leurs aptitudes à trouver des financements ne suivent pas. En effet, la dotation des crédits est au ralenti : +3,6% en 2018 contre +3,9% l’année d’avant. « Ces derniers restent également plus onéreux (5%) que dans certains pays d’Europe où le taux d’intérêt est à moins de 2% parfois », conclut Rachid Khayatey.