Le parlement européen adopte l’accord de pêche incluant le Sahara

Après l'accord agricole en janvier, le Parlement européen a donné son approbation le 12 février à Strasbourg pour l’adoption du 4e protocole de pêche avec le Maroc. Contrairement au précédent accord, arrivé à son terme en juillet et retoqué par la justice européenne, cette version mentionne explicitement le Sahara et permettra aux navires européens de pêcher dans les eaux marocaines contre 50 millions d’euros annuels.

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Le représentant permanent du Maroc auprès de l'UE, Ahmed Reda Chami aux côtés de Abderrahim Atmoun, président de la commission parlementaire mixte Maroc-UE Crédit: Thomas Savage/TelQuel

Les députés européens réunis à Strasbourg en plénière le 12 février ont adopté à 12h37 une résolution par laquelle il donne leur accord à la conclusion d’un nouveau protocole de pêche avec le Maroc qui inclut explicitement le Sahara dans son champ d’application.

Le représentant permanent du Maroc auprès de l’UE, Ahmed Reda Chami à quelques minutes du vote de l’accord de pêche par le parlement européen.Crédit: Thomas Savage/TelQuel

415 eurodéputés ont voté pour, 189 contre, 49  se sont abstenus.

Le résultat du vote affiché sur les écrans du parlement européen.Crédit: MAECI

Une autre proposition, déposée par plus de 76 eurodéputés, et qui prévoyait de recueillir l’avis de la Cour de justice de l’Union européenne sur cet accord a été rejetée par 410 eurodéputés alors que 189 ont voté pour.

En vertu de ce nouveau protocole, 126 navires européens sont donc autorisés à pêcher dans les eaux marocaines, Sahara compris, en contrepartie d’environ 50 millions d’euros par an (de 48,1 millions d’euros la première année à 55,1 millions la 3e et 4e année). Une partie de ces sommes sont versées par les armateurs européens au titre de redevance. Une autre partie est versée par l’UE à la fois au titre de compensation pour l’accès des navires européens à ces eaux, et d’autre part comme appui au secteur marocain de la pêche.

Le parlement européen lors du vote de l’accord de pêche Maroc-UECrédit: Thomas Savage / TelQuel

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), dans un arrêt du 27 février 2018, avait jugé que la précédente version de cet accord n’était pas applicable au Sahara. Problème : 90 % des captures de la flotte européenne sont réalisées dans les eaux adjacentes au Sahara. Le précédent accord de pêche — le 3e conclut entre le Maroc et l’UE — arrivait de toute façon à son terme le 14 juillet 2018.

Il s’agissait donc pour la Commission européenne et son partenaire marocain de renégocier un nouvel accord en se conformant à la jurisprudence européenne. Dans ces attendus, la CJUE énonçait deux conditions à faire valoir, à savoir « la mention explicite du Sahara occidental ainsi que l’obtention du consentement de la population ». Le Conseil de l’Union européenne a également rajouté un troisième critère, à savoir que l’accord doit profiter à la population locale.

Le Maroc et la Commission européenne s’y sont donc employés de la même manière que pour l’accord agricole, également retoqué par un autre arrêt de la CJUE en décembre 2016, mais adopté dans une nouvelle version par le parlement le 16 janvier.

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Dans ce nouvel accord de pêche, la Commission européenne mentionne explicitement les zones de pêche comme étant « les eaux de l’Atlantique Centre-Est situées entre les parallèles 35° 47`18 Nord et 20° 46` 13 Nord, y compris les eaux adjacentes du Sahara occidental, couvrant l’ensemble des zones de gestion. »

Pour ce qui est de la consultation des populations concernées, le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) et la Commission européenne « ont conduit un processus de consultation des populations locales du Sahara occidental et des parties intéressées. Une majorité d’interlocuteurs se sont prononcés en faveur d’un nouvel accord de pêche et pour le renouvellement du protocole, » rappelle le parlement européen, précisant que « d’autres interlocuteurs, notamment le Front Polisario, considéré comme le représentant du peuple du Sahara occidental par les Nations unies et partie au processus de paix, n’a pas souhaité participé à la consultation. Les discussions techniques menées avec le Front Polisario ont fait ressortir l’opposition de principe du Front Polisario à l’accord ».

Quant aux bénéfices pour le secteur de la pêche au Sahara, « il figure parmi les secteurs à fort potentiel de croissance et d’emplois » selon le Parlement européen, qui rappelle que l’UE « a aussi financé un grand nombre d’actions telles que la construction d’infrastructures et d’équipements permettant d’améliorer la compétitivité et l’emploi du secteur de transformation des produits de la pêche. »

Au-delà de l’aspect diplomatique pour le dossier du Sahara, les 50 millions d’euros de l’accord de pêche sont une goutte d’eau comparés aux 35 milliards de dirhams d’exportations agricoles marocaines préservées par la modification en janvier de l’accord de pêche. Pour ce vote, la pression était donc davantage du côté de l’Europe. Et notamment de l’Espagne, dont la flotte trépigne dans les Canaries et qui espère voir ses navires larguer les amarres pour les côtes marocaines « avant l’été ».