Accusé de viol, Saad Lamjarred accablé par de nouveaux témoignages

Dans son édition diffusée le 10 février, l'émission Sept à Huit livre de nouveaux témoignages des victimes présumées de viol du chanteur marocain, Saad Lamjarred. L'enquête décrit le double visage de la pop-star, mais aussi les tentatives d'acheter le silence des plaignantes qui évoquent, pour la plupart d'entre elles, des vies brisées.

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AFP

Des révélations qui font froid dans le dos. Ce dimanche 10 février, le magazine télévisé français Sept à Huit, diffusé sur TF1, a consacré une enquête à Saad Lamjarred, vedette de la pop marocaine, mis en examen et placé sous contrôle judiciaire pour des viols répétés. Dans ce sujet intitulé «Saad Lamjarred, star et violeur», de jeunes femmes, victimes présumées du chanteur, prennent la parole et donnent leur version des faits.

Parmi elles, une Marocaine explique avoir été violée à trois reprises par le chanteur, en avril 2015 à Casablanca. À visage couvert et souhaitant garder l’anonymat – l’émission lui donnera le prénom d’emprunt de Sara -, elle explique avoir rencontré Saad Lamjarred lors d’une soirée avant de s’être «retrouvée seule avec lui, dans sa garçonnière». La jeune fille décrit alors une personne changeant rapidement de visage : d’abord charmeur puis violent, avant de redevenir doux et attentionné. Son témoignage révèle un aspect de la protection des autorités dont bénéficie l’artiste. Un fil rouge, que l’on retrouve tout au long de l’enquête de TF1.

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Des refus de policiers, avocats et gynécologue

« Je suis allée au commissariat avec des bleus partout sur le visage et un peu de sang qui sortait de ma bouche », raconte Sara. La jeune fille affirme qu’à son arrivée, les policiers lui disent : «Ah bon c’est la star ? La star vous a fait ça ?». Sara répond par l’affirmative et explique alors vouloir porter plainte. On lui répond alors : «Première des choses, étiez-vous vierge au moment des faits ?» Une demande hors de propos, faisant fi des traces de coups et blessures présentes sur le visage de la plaignante. La jeune femme explique alors que les policiers ont refusé d’enregistrer sa plainte, et qu’elle a essuyé de nouveaux refus de la part d’un gynécologue, à l’hôpital, qui n’a pas souhaité l’ausculter. Sara affirme également que des avocats ont refusé de la défendre. Sa réaction ? Du «dégoût» et le sentiment de n’être «pas respectée du tout et extrêmement salie», explique-t-elle

Un autre témoignage vient souligner la crainte de s’exposer juridiquement face au chanteur. Dans un long courrier relayé par Sept à Huit, une jeune Franco-Marocaine, qui affirme également avoir été violée par la pop-star en 2015 à Casablanca, déclare avoir fait face à une nouvelle défiance. Cette fois de son entourage proche. « J’ai appelé mes parents au Maroc pour raconter ce qui s’est passé et après un court silence, je ne sais plus lequel des deux m’a dit : retire ta plainte ». La raison invoquée par les parents : « On ne pourra pas supporter le scandale ». « Contrairement à sa victime parisienne (Laura Prioul, NDLR), toi tu es Marocaine et tu es la seule responsable de ce qu’il t’est arrivé », aurait-on rétorqué à la jeune fille. Sa mère l’aurait alors menacée pour qu’elle retire sa plainte, déposée au tribunal de Paris en novembre 2016. Cette victime présumée s’est finalement rétractée.

Omerta et retrait de plaintes

Laura Prioul, autre victime présumée du chanteur qui a porté plainte à Paris en octobre 2016, s’exprime également dans cette enquête où l’on peut voir des images de blessures au visage et au dos qui lui auraient été infligées par le chanteur. Des proches du chanteur auraient « essayé d’acheter son silence », affirme-t-elle.

« J‘ai reçu des messages en me disant que des Saoudiens sont venus en France pour libérer Saâd Lamjarred », raconte Laura Prioul, évoquant des propositions de 500.000 euros, puis 1 million d’euros pour « laisser Saad tranquille ». Des propositions rejetées par la jeune femme. Le lendemain de leur rencontre, le chanteur avait été mis en examen pour viol aggravé, puis écroué à la prison de Fleury-Mérogis. Dès lors, Laura Prioul a été la cible d’une campagne de cyberharcèlement, et a notamment essuyé des insultes sur les réseaux sociaux.

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Plus récemment, la dernière victime présumée du chanteur aurait également reçu une proposition de 200.000 euros pour retirer sa plainte. Cette saisonnière à Saint-Tropez, âgée de 29 ans, est à l’origine de la dernière mise en examen de Saad Lamjarred pour des « faits caractérisés de viol ». La troisième plainte pour viol visant le chanteur de 33 ans en France. Placé en détention le 18 septembre, l’artiste a été remis en liberté sous contrôle judiciaire par la chambre d’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, le 6 décembre 2018. Interrogé, son avocat Jean-Marc Fédida reconnaît que des tentatives d’acheter les présumées victimes ont pu se produire. Il explique néanmoins qu’il s’agit « d’éléments parfaitement contestables pour impliquer Saad Lamjarred ». « Ça ne le sert pas, ça le dessert, avance son avocat. Avant d’ajouter : Ça serait reconnaître qu’il y a eu violence puisqu’il y aurait une indemnisation qui aurait été proposée. Or Saad Lamjarred a toujours contesté cet élément ».

Contacté par Sept à Huit, Saad Lamjarred n’a pas souhaité s’exprimer. Ses victimes présumées, elles, expliquent pour la plupart que leur vie semble détruite par la faute du chanteur. L’une d’elles, qui a écrit à Laura Prioul, livre un témoignage glaçant : « Il a pris ma virginité. Pour cette raison, je ne peux pas parler. Je pense au suicide parce qu’il m’a détruit et détruit ma vie ».