Accusé de harcèlement, le remplacement sans tambour de l'ambassadeur au Ghana

Nommée nouvelle ambassadrice du Maroc au Ghana lors du conseil des ministres du 7 février, Imane Ouaadil prend la tête d'une ambassade qui a récemment fait le coup d'une mission d'inspection du ministère des Affaires étrangères après une plainte pour harcèlement sexuel.

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Le ministère des Affaires étrangères à Rabat. Crédit: MAP

Le Conseil des ministres du 7 février présidé par Mohammed VI a acté la nomination d’une jeune diplomate, Imane Ouaadil, au poste d’ambassadrice en République du Ghana. Une nomination passée presque inaperçue malgré le parfum de scandale qui a agité l’ambassade d’Accra, à la mi-janvier.

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Le 14 janvier, une délégation composée de deux inspecteurs de l’Inspection générale du ministère des Affaires étrangères et d’une cadre des affaires consulaires s’étaient rendus dans la capitale ghanéenne après que le département de Nasser Bourita a reçu une plainte pour agression sexuelle visant le chef de la délégation marocaine au Ghana, alors en poste, Mohamed Farahat. Un voyage de trois jours afin “d’écouter” le haut-fonctionnaire et “[revenir] avec des recommandations”, d’après les informations recueillis à ce moment par TelQuel.

Dans une lettre adressée à la direction des ressources humaines du ministère, datée du 4 janvier, Jeminah Flintwood-Brace, une employée de l’ambassade du Maroc au Ghana, expliquait avoir été “harcelée sexuellement à deux reprises”, les 11 et 20 décembre 2018, par l’ambassadeur marocain. Dans un autre courrier, cette fois adressé directement à l’ambassadeur – et dont TelQuel détient une copie -, elle regrettait “que la personne auprès de laquelle nous devrions pouvoir trouver refuge en cas de harcèlement par nos collègues de l’Ambassade [soit] précisément celle responsable de ces agissements sans scrupules”.

Une tête pas si nouvelle à Accra

Depuis, l’épisode n’a plus fait l’objet de communication officielle. Contacté par TelQuel, le ministère des Affaires étrangères explique que “le rapport de la commission a été rendu à la hiérarchie”, sans pour autant apporter plus d’informations. L’ambassadeur a pourtant été remplacé alors qu’il était en poste depuis moins d’un an. Y-a-t-il un lien de cause à effet ?

Au ministère, on met surtout en avant les compétences de sa remplaçante, dans un soucis de préserver le reste de corps diplomatique très sollicité par les dossiers en cours. Le bientôt sexagénaire Mohamed Farahat cède la place à la même pas quarantenaire Imane Ouaadil. “C’est une jeune diplomate que l’on comptait, hier encore, parmi la relève du ministère, nous confie notre interlocuteur au ministère. Désormais elle se retrouve ambassadeur, ce qui est logique après avoir été au Ghana pendant six ans.” 

Cette dernière a occupé dernièrement le poste de Chef de division de l’Afrique centrale et australe auprès du ministère. “C’est quelqu’un de sérieux, qui a le sens de la gestion”, confie Najoua El Berrak, actuelle Consul du Maroc à Rennes et qui a côtoyé un temps Imane Ouaadil dans les bureaux du ministère. Avant d’ajouter : “Elle est reconnue au ministère pour avoir effectué du bon travail lors de ses missions”.

Interprète de formation, Imane Ouaadil a beaucoup oeuvré dans les relations bilatérales. Mais c’est surtout son expérience ghanéenne qui lui a permis de prétendre à son premier poste d’ambassadrice. Celle-ci y a passé en tout six ans, dont deux comme chargée d’affaires de l’ambassade du Ghana entre 2011 et 2013. Entre-temps, elle s’était envolée dans les valises de Latifa Akharbach, pour la seconder aux ambassades de Bulgarie-Macédoine, puis en Tunisie. “Forcément, Imane Ouaadil a donné grandement satisfaction. Elle connait très bien le Ghana et c’est une cadre très compétente”, argue-t-on du côté du ministère.