Le think tank Policy Center for the New South – le nouveau nom adopté le 7 décembre par OCP Policy Center -, rassemble 350 participants de 90 nationalités différentes pour aborder les grands enjeux géopolitiques et économiques du bassin Atlantique.
Karim El Aynaoui, Directeur général de Policy center for the new South, présente cet évènement international, les thématiques sur lesquelles se penche le think tank marocain, mais également des enjeux de développement en Afrique.
TelQuel : « The Atlantic Dialogues » en sont à leur 7ème édition, quel bilan de parcours faites-vous ?
Karim El Aynaoui : L’idée à travers l’organisation de cette 7e édition de « The Atlantic Dialogues » est de créer une communauté de l’atlantique, ou ce qu’on appelle l’Atlantique élargi qui s’étend au-delà de la relation traditionnelle transatlantique Nord, en y intégrant la façade africaine et sud-américaine de l’Atlantique.
Après 7 ans, nous sommes parvenus à créer une communauté avec un esprit particulier, puisqu’il ne s’agit pas d’un bloc ou d’une catégorie des relations internationales établies, comme la relation États-Unis-Europe. On a réussi à faire progresser cette idée, à l’instar d’autres think tanks. Cependant, on s’est démarqué en parvenant à façonner un espace où le nord vient à la rencontre du sud, quelque part.
Notre communauté compte plusieurs milliers de personnes, dont 300 jeunes leaders, qu’on a formés au fil des années. On se réjouit également, car on a pu changer le tracé de l’histoire en ouvrant la possibilité aux individus de ces régions de se connaître et d’interagir.
La conférence est le produit d’un processus qui se déroule tout au long de l’année. Ce mois, on a publié notre rapport annuel, comme chaque année. Les auteurs sont divers ce qui fait beaucoup d’interactions et rend considérable l’apport de tout un chacun. On organise également des rencontres avec un certain nombre de personnes et des partenaires tout au long de l’année. Donc, la 7e édition de la conférence « The Atlantic Dialogues » est le couronnement d’au moins une année de travail du Policy Center.
En quoi le travail du Policy Center contribue aux problématiques de développement en Afrique ?
On travaille essentiellement sur deux piliers, le premier est relatif aux questions globales telles que les relations internationales et géopolitiques. Le deuxième, quant à lui, est plutôt économique. Nous accordons beaucoup d’intérêt à la question du développement, notamment en Afrique.
Notre posture, dans ce sens, est de voir le monde à partir du Sud, c’est-à-dire, avec notre propre vue. Cela suppose beaucoup de travail, un investissement dans la recherche, et un développement de l’expertise. Quand on communique entre pays du Sud, on parle avec une vue lucide de ce que nous faisons. Quand on s’engage ensuite dans le dialogue avec les pays du Nord, nous arrivons avec nos propres perspectives sur des questions globales qui nous interpellent tous, comme la migration, la problématique du commerce, la remise en question du bilatéralisme tel qu’on l’a connu depuis plusieurs décennies, etc.
Le retour du Maroc au sein de l’Union africaine vous a-t-il aidé à mieux établir ce dialogue ?
Le retour du Maroc au sein de l’Union africaine émane d’une décision clairvoyante, d’ailleurs nous l’avons mentionné pas mal de fois dans nos travaux. En effet, ce retour a donné plus d’espace à des institutions comme la nôtre sur l’ensemble de l’Afrique et nous a permis de nous ouvrir davantage sur les différents pays du Continent.
Selon vous, quelles sont les menaces qui pèsent sur la région atlantique ?
Il convient de souligner que nous vivons dans une période d’incertitude qui pèse sur le monde entier. La région atlantique est la scène des crimes transnationaux, elle est également une route de transit pour le trafic de la drogue, en plus des risques de ralentissement de l’économie.
C’est une période d’incertitude pour l’ensemble des pays ce qui rend plus important la coopération et le partenariat. C’est aussi une région où il y a peu de conflits, car même en Afrique la plupart des conflits ne sont pas frontaliers, il s’agit plutôt de conflits internes.
Actuellement, l’idée est de voir comment on organise cette coopération ? Comment met-on en place les bonnes institutions ? Comment intègre-t-on le secteur financier à ce processus de développement ? Comment échange-t-on les matières premières sur la base de gain mutuel ? En plus de la coopération, le rôle du dialogue et des connaissances interpersonnelles est très important aussi, car, in fine, c’est comme ça que les choses se font, et c’est comme ça que nous essayons de faire ici. Et pour information, nous comptons parmi nous à cette conférence pas moins de 40 ou 50 institutions think-tanks représentés, dont les principaux think tanks d’Afrique et d’Amérique du Sud, avec qui on collabore et on continue à faire des choses après la fin de cet évènement, à investir, à travailler ensemble et à codiriger des travaux.
Pensez-vous que les chefs d’Etat accordent assez d’intérêt à l’Afrique ?
On aimerait bien que chaque Chef d’État dans le monde consacre une heure par mois à l’Afrique, qu’il donne du temps politique et du capital pour l’Afrique. Hors temps de crises, pour penser le futur de l’Afrique et proposer des améliorations.
Je pense que l’Afrique est la dernière frontière du développement et c’est un bien public pour le monde. D’abord, parce que l’Afrique pollue peu, et parce que son défi du développement est une sorte de croissance extraordinaire pour le reste du monde. Il faut absolument que cette croissance se fasse dans des conditions soutenables et à l’opposé du parcours de développement de la Chine, devenue le pays le plus pollueur au monde. L’Afrique doit être aidée pour faire cela d’une manière verte, étant un bien public mondial, tout le monde doit s’y intéresser, et on y a tous intérêt.