Exclusif : Ce que dit l'étude qui a mené à l'adoption de GMT+1

La décision du  gouvernement d’adopter GMT+1 a été prise en raison de considérations énergétiques, sécuritaires et économiques issues des résultats d’une étude commandée par le ministère délégué chargé de la réforme de l’Administration. Les détails. 

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Rachid Tniouni/TelQuel

Comment et pourquoi le Maroc a-t-il pris la décision d’adopter GMT+1 ? C’est la question que tout le monde se pose depuis la décision prise le 26 octobre par l’Exécutif de maintenir l’heure d’été, et ce de manière permanente. Une partie de la réponse est à trouver du côté de l’étude commandée par le gouvernement visant à évaluer l’impact des changements d’heure sur les citoyens marocains. Contactée par TelQuel Arabi, une source gouvernementale nous a révélé les principales conclusions de ce rapport et auxquelles le ministre de tutelle, Mohamed Benabdelkader, a réagi répondant ainsi aux questions que bon nombre de Marocains se sont posées. Éclairage.

Quand la grogne fait réagir

Courant mars, le ministre délégué chargé de la réforme de l’Administration a une idée : celle d’établir une étude portant sur la réaction des Marocains au changement d’heure. « C’est en voyant la réaction défavorable des Marocains au changement d’heure (le Maroc passait alors à l’heure d’été, ndlr) que notre réflexion a débuté.  Il a fallu quelques préparations avant que le coup d’envoi de cette étude ne soit donné au mois de mai. C’est au mois d’octobre que nous avons obtenu les premiers résultats , relate Mohamed Benabdelkader.

Puis, selon une source au sein de l’Exécutif, c’est le 9 octobre que le ministre reçoit les résultats de ladite étude. Mais, à ce stade, il ne s’agit que de résultats préliminaires. Le ministre chargé de la réforme de l’Administration nous le confirme : « L’étude n’est pas encore terminée et il a été convenu de l’approfondir. Une fois qu’elle sera conclue, nous tiendrons les Marocains informés de ses résultats ». C’est sous la supervision directe du Chef du gouvernement, Saad Eddine El othmani, que l’étude a été menée.

« Décision politique »

Que révèlent donc les résultats préliminaires de cette étude ? Suggèrent-ils ou recommandent-ils un changement d’heure ? « L’étude n’incluait pas de questions directes sur les préférences des Marocains (quant à un changement d’heure, ndlr) », précise Mohamed Benabdelkader à TelQuel Arabi. Qu’est-ce qui a alors poussé le gouvernement à adopter une telle mesure, alors que la population sondée par l’étude n’a pas été interrogée sur ce point ? « L’étude avait pour objectif de connaître les effets du changement d’heure sur les Marocains. Nous avons constaté que 68% d’entre eux préfèrent la stabilité. La décision de maintenir l’heure d’été est une décision politique », indique le ministre chargé de la réforme de l’Administration.

Le but de cette étude n’était-il pas de déterminer la réticence des Marocains à changer d’heure et d’organiser une réflexion autour de ce problème ? Et à Mohamed Benabdelkader de justifier : « Lorsque nous avons étudié l’impact de quatre changements d’heure par an, nous avons constaté que cela affectait les Marocains. Que cela suscitait des tensions et des maladies. Nous avons également étudié l’aspect économique ce problème. Je répète il s’agit d’une décision politique du gouvernement (le passage à GMT+1, ndlr). Cette décision a été adoptée sur la base d’une étude comparative avec les pays développés. Nous avons préféré maintenir l’heure d’été, car il s’agit d’une décision qui aura un impact positif sur la vie publique et la vie privée des citoyens ».

Arguments énergétiques, économiques et sécuritaires

Selon la source gouvernementale citée par TelQuel Arabi, deux scénarii ont été étudiés pour évaluer les impacts d’un maintien de l’heure d’été et un passage définitif à l’heure d’hiver (GMT). Parmi les arguments en faveur du maintien du changement d’heure d’été : les économies d’énergie que le maintien de GMT+1 pourrait générer. « La consommation annuelle d’énergie entre 2008 et 2017 a été étudiée. 53 gigawatts sont consommés en moyenne (au niveau national, ndlr) tandis qu’aux heures de pointe la consommation est de 84 gigawatts. Cela correspond à 200 millions de dirhams en termes d’investissement et à une somme estimée entre 800 millions et un milliard de dirhams en termes de consommation d’électricité ».

Pour appuyer son argumentaire, cette source gouvernementale évoque également « la menace pesant sur la sécurité énergétique. Il faut savoir que nous achetons notre électricité d’Espagne. Il faut donc éviter une synchronisation des heures de pointe des deux pays. Avec l’adoption de l’heure d’été, nous bénéficierons d’une heure de différence entre nos deux heures de pointe ». Autre élément ayant joué un rôle dans la décision de l’Exécutif : la criminalité. « Les taux de criminalité sont plus élevés en soirée que durant les heures de la matinée. Nous avons donc intérêt à ce que la nuit tombe le plus tard possible », poursuit notre interlocuteur.

L’alignement du Maroc sur les fuseaux horaires de partenaires économiques comme la France a également joué un rôle dans l’adoption de cette mesure. « Le Maroc a décidé de miser sur des métiers mondiaux et les considère comme une clé pour la création d’emploi. Aussi, l’adoption permanente de l’heure d’été représentait un point positif pour les personnes issues de la formation professionnelle qui travaillent dans certains secteurs (aéronautique, automobile, électronique) ». Dernier argument avancé : l’émission et la consommation d’énergie fossile qui serait réduite lorsque l’heure d’été est en vigueur, selon les conclusions préliminaires de l’étude.

Quid des écoliers?

En plus de lister les avantages du passage à GMT+1, l’étude a également mis en lumière trois problèmes posés par ce changement. Le premièr : la sécurité des enfants censés être sur les bancs des écoles à partir de 8h30. « Le gouvernement a décidé de changer les horaires scolaires et de mettre en place des formules adaptées à chaque domaine d’activité. Cela sera mis en place à travers un décret dont l’application sera flexible », indique notre source. En ce qui concerne les changements entraînés par le passage à GMT+1 pour le monde agricole, le gouvernement a convenu de confier la gestion de ces changements aux régions.

L’adoption permanente de l’heure d’été aura aussi, selon le gouvernement, un impact sur la fonction publique dont les horaires de travail sont, eux aussi, amenés à changer. Un décret de loi prévu à cet effet, devant être publié avant la fin des vacances scolaires, est en cours d’élaboration indique notre interlocuteur, sans toutefois donner plus de précisions.

Qu’en est-il des employés du secteur privé dont les horaires seront affectés par les changements des horaires scolaires de leurs enfants ?  » Cela était prévu dans l’étude et cet élément ne posera pas de problème. Et en ce qui concerne les employés du secteur privé exerçant dans des entreprises ayant adopté l’horaire continu, le gouvernement compte ouvrir prochainement le dialogue avec eux. Il s’agit d’un changement radical pour le Maroc et nous dialoguerons avec ce secteur pour trouver les bonnes solutions », assure la source au sein de l’Exécutif, toujours citée par TelQuel Arabi.

La possibilité d’un retour à GMT

Le décret adopté le 26 octobre par le gouvernement octroi au Chef du gouvernement, pour une période limitée, la possibilité de restaurer l’heure d’hiver. Le but de cette disposition ? « Permettre au chef de l’Exécutif de revenir au GMT durant le mois de ramadan », poursuite notre interlocuteur. D’autant plus que, selon les conclusions de l’étude, le mois de ramadan aura lieu durant le printemps et l’été jusqu’en 2025..

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