Bouteflika candidat annoncé, mais pas confirmé

 Si elle semble donner une idée des intentions du président algérien Abdelaziz Bouteflika pour la prochaine présidentielle, l'annonce par le chef de son parti que l'intéressé briguera un 5e mandat en 2019 ne vaut pas candidature officielle, selon des analystes.

Par

AFP

Secrétaire général du Front de libération nationale (FLN), parti présidé par M. Bouteflika dont il est un proche de longue date, Djamel Ould Abbes a pour la première fois affirmé dimanche, à six mois de la présidentielle, que M. Bouteflika, 81 ans, « sera le candidat du FLN en 2019« .

Le chef de l’Etat, affaibli par les séquelles d’un accident vasculaire cérébral qui l’a cloué depuis 2013 dans un fauteuil roulant et largement privé de la parole, n’a lui toujours pas fait part officiellement de ses intentions. Les propos du patron du FLN ont été relayés par l’agence de presse d’Etat algérienne APS, mais télévision et radio nationales sont restés assez discrètes.

« La sortie d’Ould Abbes est l’annonce que Bouteflika briguera un 5e mandat« , estime lundi le quotidien francophone Liberté. Pour le site d’information TSA (Tout sur l’Algérie) « à première vue, c’est le scénario de (la présidentielle de) 2014 qui est en train de se répéter« . « Avec d’abord de sérieux doutes sur la santé du chef de l’État et sa capacité à poursuivre sa mission à la tête du pays, puis des appels incessants (…) à la +continuité+, suivis de l’annonce par le FLN du nom de son candidat« , écrit TSA. En 2014, M. Bouteflika n’avait officiellement déposé sa candidature que dans les derniers jours avant la date limite.

Professeur de sciences politiques à l’Université d’Alger, Chérif Driss reste prudent: « Tant que Bouteflika ne s’est pas prononcé, on ne peut pas considérer qu’il est candidat« , explique-t-il à l’AFP. « Entre l’annonce d’Ould Abbes et le moment où Bouteflika rendra publique sa candidature – s’il décide de briguer un 5e mandat – il peut se passer beaucoup de choses« , note-t-il. TSA souligne que « l’évolution de l’état de santé du président demeure la grande inconnue » d’ici à la présidentielle.

L’idée que le patron du FLN ait été chargé d’annoncer la candidature de M. Bouteflika est totalement écartée par les analystes. « On ne peut pas déléguer à quelqu’un d’autre l’annonce d’une candidature à la présidence« , souligne Chérif Driss. Ancien professeur à l’Ecole nationale supérieure des Sciences politiques d’Alger, Mohamed Hennad assure que « Ould Abbes ne joue aucun rôle dans la prise de décision » sur un éventuel 5e mandat et que « personne ne lui a rien demandé« .

Il n’est pas exclu que les propos de M. Ould Abbes, intervenant au lendemain de déclarations d’allégeance à M. Bouteflika de deux autres partis, soient l’aboutissement d’une surenchère au sein du camp présidentiel. « Il y a des raisons de croire que les chefs des partis de la majorité ne font que jouer à qui se montrera le plus fidèle au président« , souligne TSA.

Samedi, Seddik Chihab, porte-parole du Rassemblement national démocratique (RND) du Premier ministre Ahmed Ouyahia, principal allié au Parlement du FLN, avait estimé « impossible de trouver un président de consensus autre que Bouteflika » et qualifié de « nécessité politique« , le maintien de ce dernier à la tête de l’Etat. Le même jour, Amara Benyounes, président du Mouvement populaire algérien (MPA) affirmait le « soutien (…) absolu, sans conditions » de son parti au chef de l’Etat.

« Le FLN a toujours eu cette stratégie de prendre les devants« , analyse Chérif Driss, « avec son annonce, Ould Abbes veut couper l’herbe sous le pied de ses alliés, il veut être la locomotive et faire des autres les wagons« . « En plus, Ould Abbes est contesté au sein de son parti, par son annonce il veut dire à ses opposants: +C’est moi le secrétaire légitime du FLN, qui parle au nom du président du parti qui n’est autre que le président de la République« , ajoute-t-il.

Peu d’analystes en revanche doutent de l’intention de M. Bouteflika de se représenter. « Tant qu’il est en vie, Bouteflika est candidat » à un 5e mandat, résume M. Hennad.

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